La fuite des cerveaux est un phénomène qui affecte particulièrement les pays africains. Dans le cas des ingénieurs, ce sont surtout ceux du Maghreb qui sont les plus touchés.
Si les vagues de départs d’ingénieurs en informatique avaient suscité l’inquiétude dans ces pays, le phénomène ne semble pas s’estomper en Tunisie. En atteste la déclaration dans Tunisienumerique par Kamel Sahnoun, président de l’Ordre des ingénieurs tunisiens (OIT), dans laquelle il avance que 6.500 ingénieurs quittent annuellement la Tunisie.
Cette fuite des compétences s’explique par plusieurs facteurs. En premier lieu, il y a la forte demande en ingénieurs à l’international, notamment par les pays développés. Cet intérêt trouve son origine dans la qualité des ingénieurs de la région qui bénéficient de formations de qualité, quasi identiques à celles des pays développés. De plus, ces ingénieurs s’adaptent rapidement à leurs nouveaux environnements.
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Ensuite, il y a bien entendu leurs salaires perçus en Tunisie autrement plus faibles comparativement à ceux pratiqués par des pays relativement comparables en termes de niveau de développement, comme le Maroc. «Les salaires des ingénieurs au Maroc sont estimés à quatre fois celui d’un ingénieur tunisien. Les salaires des professionnels du secteur en Jordanie sont le double de ceux en Tunisie», a expliqué Kamel Sahnoun. Comparativement aux pays développés, le différentiel de salaire est énorme, même en tenant compte de la différence des niveaux de vie entre la Tunisie et la France, principale destination des ingénieurs tunisiens.
A ces facteurs s’ajoute la conjoncture politico-économique qui prévaut en Tunisie depuis quelques années et qui pousse de nombreux ingénieurs à vouloir évoluer dans des environnements plus favorables.
Cette fuite des cerveaux n’est pas sans conséquences sur l’économie tunisienne. Ces expatriations constituent un manque à gagner pour l’Etat et les entreprises qui doivent se rabattre sur des profils moins qualifiés. Ce qui impacte la productivité, l’innovation et la compétitivité des entreprises dans un monde de plus en plus concurrentiel.
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Ensuite, le coût que représente la formation des ingénieurs pour l’Etat, et donc pour le contribuable tunisien, est énorme. Selon le président de l’Ordre des ingénieurs tunisien «les dépenses de l’Etat sont estimées à 100.000 dinars pour chaque ingénieur (...) La Tunisie offre environ 650 millions de dinars chaque année à des pays étrangers».
En plus, ces départs sont autant de pertes de recettes fiscales pour l’Etat qui en a grandement besoin dans une conjoncture marquée par une baisse des recettes budgétaires consécutive à la morosité économique.
Les grands bénéficiaires de ces fuites des cerveaux tunisiens sont bien évidemment les pays européens, notamment la France, pour des raisons culturelles et linguistiques.