Dans plusieurs quartiers de Conakry, comme dans les villes de l’intérieur, de nombreuses écoles privées ressemblent davantage à des abris de fortune qu’à des lieux d’apprentissage.
«Dans le primaire et le secondaire, moins du tiers des effectifs étaient scolarisés dans le secteur privé (respectivement 32% et 37%) en 2018. Au deuxième cycle du secondaire, le privé représentait plus de la moitié (51%) des effectifs scolarisés en 2018″ ce témoignage de l‘Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture en dit long sur le rôle des écoles privées qui traversent actuellement des périodes difficiles.
Toits percés, murs fissurés, classes sans bancs ni tableaux fonctionnels… comment expliquer que certains établissements privés se retrouvent dans des situations aussi difficiles? Le plus souvent, ces écoles ont été fondées par des citoyens convaincus que l’éducation est un levier fondamental pour l’ascension sociale.
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À défaut de soutien public, ils ont investi leurs propres économies pour offrir une alternative éducative là où l’État n’intervenait pas. Mais avec le temps, sans accompagnement financier ni encadrement pédagogique, beaucoup se sont retrouvés en grande difficulté.
Bangaly Soumah, DG d’une école privée avance que «nous savons tous que les écoles privées volent de leur propres ailes. L‘Etat ne soutient ces écoles. Ce sont les contributions parentales qui permettent de soutenir tous les frais de l’école».
Il faut pourtant rappeler que les écoles privées représentent une part importante de l’offre éducative en Guinée. Dans certaines zones, elles accueillent jusqu’à 50% des élèves. Malgré cette contribution significative, elles ne bénéficient d’aucune subvention, ni de soutien matériel ou pédagogique de la part du ministère de l’Éducation nationale.
Ainsi, les élèves de ces établissements regrettent l’absence de certaines infrastructures de base «il n’y a pas de bibliothèque, les classes sont surchargées à plus de 50 élèves, les manuels scolaires sont insuffisants, les sanitaires sont soit insalubres soit carrément absents" regrette Damayé Sidibe, élève qui doit suivre ses cours dans des salles où il fait «souvent chaud, et on reste jusqu’à 20 heures».
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Les enseignants, eux aussi, paient le prix fort. Nombreux sont ceux qui exercent dans une grande précarité: salaires dérisoires, contrats non officiels, absence de couverture sociale.
Des enseignant payés 9 mois sur 12
Plus grave, les enseignants du secteur privé ne sont rémunérés que pendant l’année scalaire. Dans un entretien paru en 2024, un enseignant d’économie dans un établissement privé en témoigne «le principal problème réside dans le fait que ces enseignants (du privé, ndlr) sont rémunérés uniquement sur neuf mois (d’octobre à juin). Pendant les trois mois de vacances (juillet, août et septembre), ils ne perçoivent aucun revenu, ce qui rend leur situation financière encore plus précaire.»
Ces établissements, bien qu’imparfaits, jouent un rôle crucial dans la démocratisation de l’accès à l’éducation. En les abandonnant, c’est tout un pan de l’avenir du pays que l’on sacrifie.