Tabaski à Abidjan: la démolition d’un abattoir, l’inattendu ingrédient qui pimente la facture

Le 10/06/2024 à 11h55

Les préparatifs de cette fête religieuse, marquée par le sacrifice rituel de moutons, sont cette année particulièrement complexes, en raison de la destruction récente de l’abattoir de Port Bouet, une infrastructure cruciale pour l’approvisionnement en viande de la capitale économique ivoirienne.

La Tabaski, ou Aïd el-Kébir, est une période où la demande en bétail bat tous les records. A Abidjan, le marché de bétail est en effervescence, les moutons sont déjà visibles dans le parc à bétails d’Adjamé Macassi, approvisionné par le Mali, le Niger et le Burkina Faso. Même si ce n’est pas l’affluence des grands jours, certains clients parcourent le marché pour se faire une idée sur les prix. Cette année, malgré les difficultés logistiques, la demande reste soutenue.

«Nous attendons plus de clients cette année, car la Tabaski est une fête très importante pour nous. Pour l’instant, ce n’est pas encore la grande affluence parce que certains clients attendent à trois, voire cinq jours pour venir faire le marché. Nous sommes optimistes inchallah», explique Diarra Issouf, un marchand de bétail du marché d’Adjamé.

Les prix oscillant entre 75.000 et 1.000.000 Fcfa le mouton, des prix pas du tout appréciés des clients. «A cette allure, tous les ménages ne pourront pas avoir droit à mouton cette année», déplore Oumar Diakité, un client.

Certains justifient cette inflation des prix par les tracasseries routières et le coût élevé des produits d’entretien des bêtes et les différentes taxes communales à payer, quand d’autres évoquent la récente délocalisation de l’abattoir de Port Bouet, ce qui a engendré plus de dépenser.

La destruction de l’abattoir de Port Bouet à quelques jours seulement de la Tabaski, créé un véritable casse-tête pour les commerçants qui pour certains doivent rejoindre le parc à bétails d’Adjamé afin d’écouler leurs marchandises.

Cet abattoir jouait un rôle central dans le traitement et la distribution du bétail. Sa fermeture a entraîné une réorganisation forcée de la chaîne de ravitaillement. «Nous devons maintenant transporter notre bétail jusqu’au marché de bétails d’Adjamé, ce qui augmente nos coûts et réduit nos marges bénéficiaires. Nous nous voyons donc dans l’obligation de rehausser un les prix pour pouvoir sans sortir», se lamente Diarra Adama, vendeur. Et à cela faut-il les tracasseries routières, une réalité bien triste.

Les répercussions sur les prix du bétail sont déjà visibles. Les coûts de transport accrus, le coût élevé des produits d’entretien des bêtes… ont provoqué une flambée des prix. Selon les estimations des commerçants, le prix des moutons a augmenté de 20 à 30% par rapport à l’année dernière. Cette situation inquiète les consommateurs, déjà confrontés à la cherté de la vie. «Le vendeur me dit que le mouton que j’ai choisi coûte 800 000 Fcfa. Je ne sais pas si je pourrai acheter un mouton cette année. Les prix sont trop élevés», confie Aminata Diaby, mère de famille.

En attendant la fête de la Tabaski, les moutons du parc à bétails d’Adjamé attendent des acheteurs qui pour l’heure ne bousculent pas. Les prochains jours seront décisifs pour les commerçants et les familles, qui devront naviguer entre les défis logistiques et économiques pour perpétuer une tradition ancestrale.

Par Emmanuel Djidja (Abidjan, correspondance)
Le 10/06/2024 à 11h55