«Quand le jeune intègre l’académie, il est pris en charge totalement: restauration, hébergement, scolaire, médical», explique à l’AFP M. Khazri, responsable du recrutement de l’AMF, un immense complexe sport-études situé à Salé, ville jumelle de Rabat.
Environ «90%» des enfants viennent de «familles pauvres», souligne-t-il, précisant que c’est le roi Mohammed VI «qui donne de l’argent de ses propres fonds» pour financer l’académie.
Sur plus de 17 hectares, l’AMF aligne une dizaine de terrains, des vestiaires, des salles de classe, de musculation, de jeux équipées de consoles, de babyfoot et billards, des multiples dortoirs, un vaste réfectoire, un pôle médical sur trois étages, une piscine et une mosquée.
Cette année, l’académie, inaugurée en 2010, accueille 121 jeunes garçons - uniquement — entre 12 et 18 ans, venant de tout le pays ainsi que du territoire désertique du Sahara occidental, contrôlé en majeure partie par le royaume chérifien mais considéré comme non autonome par les Nations unies.
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«On a des cellules de recrutement» implantées localement qui «dénichent les meilleurs joueurs» à partir de six ou sept ans puis les «développent» sur le plan athlétique pendant plusieurs années, explique Tarik El Khazri, 42 ans.
Titulaires en Europe
Sur un terrain extérieur, des joueurs de 17-18 ans s’échauffent avec un «toro», jeu où deux d’entre eux placés au centre d’un cercle tentent de récupérer le ballon que leurs coéquipiers font circuler.
Pour Laurent Cauger, entraîneur français de 56 ans et à l’Académie depuis sept années, ces jeunes ont pour ambition commune de «réussir dans le football».
Au Maroc, dit-il, «j’ai vu des situations familiales très difficiles» avec des jeunes venus du bas de l’échelle sociale, donc quand un joueur «arrive à bien gagner sa vie grâce au football, cela sauve une famille».
Il évoque néanmoins des périodes de doutes traversées par certaines recrues, dont aucune n’a pu être interviewée directement par l’AFP faute d’autorisation.
Ce fut le cas de Yassir Zabiri, aujourd’hui international en moins de 20 ans (U20) et membre de l’équipe victorieuse en octobre de la Coupe du monde de la catégorie d’âge, le premier trophée mondial remporté par une sélection marocaine.
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Avant ses 15 ans, il a été surclassé avec les moins de 17 ans mais «ne jouait pas souvent» car il était plus jeune que ses coéquipiers et avait peur de ne pas être gardé par l’académie, relate M. Cauger.
D’après le recruteur Tarik El Khazri, l’académie compte 26 joueurs devenus titulaires en Ligue 1 marocaine, une trentaine évoluant en Europe -comme Abdelhamid Aït-Boudlal à Rennes, en France- et au moins cinq sélectionnables pour le Mondial-2026 en Amérique du Nord puis la Coupe du monde 2030, dont le Maroc sera co-organisateur avec l’Espagne et le Portugal.
Mais, avant cela, le Maroc accueille en décembre et janvier la Coupe d’Afrique des nations.
100% au bac
Le Français Hervé Renard, sélectionneur du Maroc entre 2016 et 2019, se félicite auprès de l’AFP d’avoir «eu la chance de récolter les premiers fruits» de l’AMF. Notamment en faisant débuter à 19 ans l’attaquant Youssef En-Nesyri, désormais âgé de 28 ans et qui évolue à Fenerbahçe (Turquie), «l’un des grands artisans» du parcours historique du Maroc jusqu’en demi-finale du Mondial-2022.
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Pour les jeunes de l’académie, la journée commence à 07H00, avec des cours dès 08H15 avant l’entraînement du matin. Après le déjeuner, ils retournent en classe, puis enchaînent avec une seconde séance sportive jusqu’en fin d’après-midi, avant une heure d’étude puis le dîner.
En classe, ils suivent le programme national, vêtus du même uniforme floqué «AMF».
Lorsqu’une équipe du Maroc joue, «impossible de les canaliser, ils n’écoutent rien des cours», glisse en souriant Fetiha, responsable adjointe au pôle éducation, rappelant qu’ils «sont encore très jeunes».
Le directeur du pôle, Abderrazak El Rhomari, 78 ans, admet que la coordination peut être compliquée «lorsqu’ils partent pour des compétitions» au Maroc ou à l’étranger, mais assure qu’en dix ans, ils ont «toujours obtenu 100% de réussite au baccalauréat».
C’est essentiel, dit-il, car «le football, c’est risqué. Du jour au lendemain, on peut avoir un accident et plus de foot. Donc, au moins, ils ont un diplôme.»



