Plus de cent ans après leur création en 1921, les Mondiaux, après être allés au Venezuela, au Japon ou en Australie, s’apprêtent à s’ouvrir au dernier continent sur lequel ce sport très européen n’avait encore jamais posé ses roues.
L’Union cycliste internationale (UCI), dont le président David Lappartient avait fait de ces Mondiaux en Afrique une promesse de campagne lors de sa première élection en 2017, table sur «une ferveur populaire jamais vue» avec plus d’un million de spectateurs certains jours.
Les premiers coups de pédale seront donnés dimanche lors des contre-la-montre hommes et femmes avec notamment un duel très attendu entre le Slovène Tadej Pogacar et le Belge Remco Evenepoel.
Les épreuves reines auront lieu le week-end suivant sur un circuit considéré comme le plus difficile de l’histoire, avec une succession de côtes raides, dont le redoutable «mur de Kigali», rendant hommage au surnom du Rwanda, le pays des mille collines.
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L’altitude - la capitale rwandaise est située à près de 1.600 m - et l’humidité en cette saison vont corser les débats pour les athlètes qui attendent l’événement avec un mélange de curiosité et d’excitation.
Une vitrine pour le Rwanda
«Ce sera une expérience unique. Je suis vraiment curieux de ce que ça va donner niveau public et parcours», souligne Evenepoel.
Lors de la course en ligne, Pogacar défendra son maillot arc-en-ciel et sera le grandissime favori face à Evenepoel, Tom Pidcock, Ben Healy ou ses coéquipiers d’UAE Isaac del Toro et Juan Ayuso.
La présence dans les rangs français de Paul Seixas, qui fête ses 19 ans mercredi, sera l’une des attractions. Jonas Vingegaard a préféré faire l’impasse.
Chez les femmes, la Française Pauline Ferrand-Prévot, dans la foulée de sa victoire dans le Tour de France, tentera de redevenir championne du monde sur route, onze ans après son premier titre avant de se consacrer au VTT.
Entre les chronos et les courses en ligne, la semaine sera rythmée par un relais mixte et les épreuves juniors et espoirs avec la participation de plusieurs coureurs africains.
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Ces premiers Mondiaux en Afrique ont une forte portée symbolique sur un continent où le cyclisme est très populaire dans certains pays comme l’Erythrée mais dont le coût constitue un frein énorme à son développement.
Pour le Rwanda, dont la candidature a été préférée à celle du Maroc, c’est aussi une vitrine, trente ans après le génocide des Tutsis.
«Impact sur les jeunes»
Très actif dans le sport, Kigali accueille chaque année la Ligue africaine de basket, tournoi parrainé par la Fiba et la NBA, et ambitionne d’organiser un Grand Prix de Formule 1, alors que son slogan «Visit Rwanda» est visible sur les maillots d’Arsenal et du PSG.
Pour les détracteurs de Paul Kagamé, qui préside le pays d’une main de fer depuis 2000, cette image masque des entraves aux droits humains.
Au printemps, l’UCI a dû démentir l’existence d’un possible déplacement des Mondiaux en Suisse en raison du conflit dans l’est de la voisine République démocratique du Congo (RDC) où le groupe armé M23 soutenu par Kigali avait lancé fin 2024 une offensive meurtrière.
Les deux pays ont depuis signé un accord de paix, fin juin à Washington.
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Doté d’un territoire de 26.000 km2, soit environ la taille de la Belgique, l’ancienne puissance coloniale, Kigali met en avant son savoir-faire en matière d’organisation, avec notamment le Tour du Rwanda, une course de bon niveau que le pays accueille tous les ans.
Mais l’Afrique peine toujours, malgré un potentiel immense, à faire éclore des coureurs professionnels, hormis quelques rares exceptions comme le sprinteur érythréen Biniam Girmay, triple vainqueur d’étape sur le Tour de France.
«Par rapport au football ou l’athlétisme qui sont très populaires en Afrique, le cyclisme est très en retard. C’est bien d’avoir un tel événement et j’espère que cela aura un impact sur les jeunes», souligne «Bini» qui déplore cependant la difficulté de parcours que la plupart des coureurs africains en lice auront, selon lui, «du mal à finir».