Khaled Chelly a été nommé ce vendredi 12 mars Président-directeur général de Tunisair. Il remplacera à ce poste Olfa Hamdi, nommée début janvier dernier, et limogée un peu plus d'un mois plus tard, le 22 février plus exactement.
Cette nomination intervient après une réunion d’un conseil ministériel restreint autour du Premier ministre, Hichem Mechichi, et du ministre des Transport et de la Logistique, Moez Chakchouk, consacrée au sauvetage de la compagnie. Moez Chakchouk avait affirmé auparavant, lors d'une séance d’audition au parlement, que la compagnie était bord du gouffre.
Contrairement à sa prédécesseure, Khaled Chelly connaît bien la maison et le secteur aérien, pour avoir occupé plusieurs postes de responsabilité au sein de la compagnie.
Lire aussi : Tunisie: limogeage de la nouvelle PDG de Tunisair
Titulaire d’un diplôme en comptabilité de l’Institut des hautes études commerciales de Carthage en 1989, il a occupé le poste de représentant de Tunisair pour l’Europe centrale et l’Amérique du Nord.
Auparavant, il a occupé les postes de directeur pour l’Afrique du Nord de l’Association du transport aérien international -IATA, de 2009 à 2012, celui de directeur adjoint de Tunisair (de 2012 à 2014), de directeur général de Tunisair Express (en 2012 et de 2014 à 2015) et il a été le PDG de l’Office de l’aviation civile et de l’aviation de 2015 à 2018.
Agé de 54 ans, il aura la lourde tâche de redresser la compagnie, actuellement au bord du gouffre.
Lire aussi : Tunisie: licenciement de 1.200 employés et mesures financières pour sauver Tunisair
Ainsi, le nouveau PDG a l’atout, contrairement à ses prédécesseurs, de bien connaître la maison, pour y avoir occupé plusieurs postes de responsabilité.
Toutefois, redresser la compagnie ne sera pas une tâche facile, tant la crise qu’elle traverse est profonde.
Quelques jours avant sa nomination, le secrétaire général de la fédération tunisienne des agences de voyages avait déclaré à Tunisienumérique que «8.000 salariés pour 22 appareils, c’est trop», ajoutant qu’il fallait licencier au moins les deux tiers des travailleurs, pour avoir une chance de sauver la compagnie.
Avec 7.800 salariés du groupe pour une flotte de 32 appareils dont certains sont cloués au sol, Tunisair est loin d’être compétitive. Cependant, avec la conjoncture difficile que traverse la Tunisie, le licenciement risque d’être une opération difficile à réaliser, à cause des troubles sociaux qu’elle peut entraîner.
Lire aussi : Tunisair: des pertes de 80 millions de dinars par mois et une absence de visibilité pour l’avenir
La crise du Covid-19 est venue plomber une situation déjà difficile. En 2020, la compagnie a perdu 75% du nombre de ses passagers, comparativement à l’exercice précédent. Une situation qui a aggravé la crise financière de la compagnie. D’ailleurs, tous les plans visant à redimensionner le personnel ont jusqu’à présent échoué.
Tunisair traverse donc une crise financière aigüe, avec un déficit cumulé de 1,8 milliards de dinars tunisiens, soit plus de 560 millions d’euros, à fin 2020. Selon le ministre des Transport et de la Logistique, les fonds propres de la compagnie sont évaluées à -870 millions de dinars.
Pourtant, avant la Révolution du Jasmin, Tunisiair réalisait en moyenne 30 millions de dinars de bénéfice par an et disposait de réserves de 500 millions de dinars. Mais depuis 2011, la situation s’est inversée et les déficits se sont accumulés. Rien que pour l’exercice 2020, la compagnie a enregistré un déficit de 300 millions de dinars, notamment à cause des effets de la pandémie du Covid-19.
Lire aussi : Tunisair menacée de saisie de comptes bancaires par la société turque TAV
La crise financière de Tunisair est aujourd'hui rendue à un point tel, qu’en février dernier, TAV airports holding, entreprise turque en charge de la gestion des aéroports d’Enfidha-Hammamed et de Monastir-Habib Bourguiba, avait menacé de saisir les comptes en banque de la compagnie aérienne tunisienne.
En conséquence, Tunisair, contrôlée majoritairement par l’Etat tunisien, attend une recapitalisation de l’Etat pour pouvoir se relancer convenablement et préparer l’après-Covid-19.
Par ailleurs, à cause de cette crise, l’entretien de la flotte fait défaut, et plusieurs appareils se retrouvent actuellement cloués au sol, faute de pièces de rechange et d’entretien.
La situation de la compagnie est donc clairement catastrophique. En tout état de cause, il devient urgent pour le nouveau commandant de Tunisair de restructurer la compagnie, afin qu’elle devienne compétitive et puisse se frotter à la concurrence... Avant le lancement de l’Open sky, que la Tunisie prépare avec l’Union européenne et qui ouvrira le ciel tunisien aux compagnies aériennes du vieux continent. Immense défi.