Flambée des prix et pénuries de produits alimentaires de première nécessité sont le lot quotidien des Tunisiens, depuis le début du mois de ramadan. Ainsi, le pain, aliment de base, est globalement introuvable dans de nombreuses boulangeries à partir de certaines heures. Ces pénuries concernent particulièrement les produits subventionnés: huiles, sucre, farine, semoule,… Ainsi, pour le pain, il faut se lever tôt pour le trouver puisque de longues files se forment devant les boulangeries.
Conséquence de ces pénuries, les prix des produits alimentaires flambent. De nombreux produits affichent des hausses exceptionnelles. C’est le cas des œufs (+24,2%), la volaille (+21,5%), l’huile d’olive (+21,7%), les fruits (+17,9%), le poisson (+9,2%),… Et les tickets ne s’arrêtent de valser quotidiennement. De l’aveu de nombreux Tunisiens, des prix pareils, c’est du jamais vu.
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Face à cette situation, après la lutte contre les spéculateurs qui jouent aussi sur la carte de la rareté afin d’augmenter les prix et accroître leurs marges, avec à la clé de nombreuses saisies de denrées alimentaires dans des entrepôts illégaux et d’arrestations, mais dont l’impact est négligeable, les autorités ont décidé d’agir sur l’offre. Ainsi, selon Tunisie numérique, «le porte-parole du ministère du Commerce Mohamed Ali Ferchichi, a annoncé que pour lutter contre la hausse des prix des fruits et légumes, le ministère du Commerce a pris la décision d’interdire toutes les exportations de produits agricoles jusqu’à nouvel ordre».
Cette mesure radicale est sensée augmenter la disponibilité de produits agricoles sur le marché et donc d’entrainer la baisse des prix de ces produits.
Cette décision devrait permettre d’orienter les exportations de nombreux produits agricoles vers le marché intérieur. A ce titre, il faut souligner que la Tunisie exporte principalement de l’huile d’olive (environ 60% des importation de l’Union européenne) dont le prix a fortement augmenté sur le marché intérieur, des agrumes et des dattes,… Hormis les dattes, les prix des autres produits ont fortement augmenté sur le marché intérieur. Ces mesures vont donc impacter positivement l’approvisionnement du marché en fruits et légumes dont les prix sont aussi touchés par cette flambée des prix.
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Seulement, si cette mesure radicale peut avoir un impact indéniable l’offre, il peut s’avérer difficile à mettre en œuvre, surtout pour certains exportateurs qui ont des contrats à respecter avec leurs clients étrangers. De plus, ce sont des sources de devises qui vont tarir alors que le pays en a vraiment grand besoin.
En outre, cette décision ne va pas toucher les produits les plus concernés par la pénurie: farine, huile, sucre,… ni ceux dont les prix ont fortement augmenté, comme les viandes, les œufs,…
Et concernant les causes de ces pénuries et fortes hausses des prix, plusieurs facteurs sont avancés. D’abord, il y a la guerre en Ukraine qui a entrainé le renchérissement des cours du baril de pétrole et donc du fuel nécessaire au transport maritime, la hausse du cours du blé du fait que la Russie et l’Ukraine assurent 30% des échanges mondiaux de blé (la Tunisie importait historiquement 48% de son blé de l’Ukraine et 8% de la Russie) et la pénurie de l’huile de tournesol dont l’Ukraine et la Russie représentent 80% des exportations mondiales de cette huile… Tous ces facteurs ont impacté négativement le marché tunisien en entrainant des pénuries et des hausses des prix. De même, la forte hausse des prix des engrais impacte négativement la production agricole en poussant les agriculteurs à réduire le recours aux engrais avec un impact négatif sur les rendements agricoles.
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En clair, selon les observateurs, c’est la guerre en Ukraine qui nourrit la spirale de la spéculation et de l’inflation en Tunisie, comme c’est le cas dans le reste du monde.
Toutefois, en Tunisie, cette situation est aggravée par d’autres facteurs dont la crise économiques et financière que traverse le pays depuis plus d’une décennie. Ainsi, la dégradation de la note du pays par les grandes agences de notation internationales -Moody’s, Standard & Poor’s et Fitch-, poussent les opérateurs étrangers à être méfiants dans leurs transactions avec la Tunisie, en exigeant souvent un paiement anticipé par crainte d’un défaut de paiement. Une situation qui impacte négativement l’approvisionnement de certains produits alimentaires.
De même, la hausse à deux reprises en un mois des prix du carburant impacte aussi négativement les prix des denrées alimentaires en augmentant le coût du transport des marchandises.
Enfin, ces pénuries s’expliquent aussi par les comportements des citoyens qui recourent aux achats de précaution en achetant de grandes quantités afin de se prémunir des pénuries. Une situation qui amplifie les pénuries et suscite l’inquiétude des consommateurs, ce qui encourage les comportements des spéculateurs qui jouent à fond la carte de la rareté et aggravent la flambée des cours des produits alimentaires.