Arrivé en tête des législatives du 6 octobre, le parti d'inspiration islamiste Ennahdha a désigné mi-octobre un de ses compagnons de route, Habib Jemli, pour diriger ce nouveau cabinet.
Mais cet ancien secrétaire d'Etat (2011-2014) doit d'abord former une équipe susceptible de rassembler une majorité de députés. Un défi de taille alors qu'Ennahdha ne dispose que de 52 des 127 sièges d'un Parlement morcelé entre des dizaines de formations, dont nombre ont exclu de travailler ensemble.
Le premier délai d'un mois -renouvelable une fois- pour former un gouvernement expire ce dimanche, et Jemli a d'ores et déjà indiqué qu'il lui en faudrait un second. Il a mené de très larges consultations avec tous les partis, syndicats et personnalités nationales, mais les négociations patinent.
Deux importants partis, les sociaux-démocrates d'Attayar (22 sièges) et les nationalistes de Al-Chaab (15 sièges), ont renoncé à rejoindre le gouvernement, indiquant ne pas avoir obtenu les ministères clés qu'ils demandaient -notamment la Justice et l'Intérieur.
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De son côté, Qalb Tounes du candidat malheureux au 2e tour de la présidentielle Nabil Karoui, arrivé deuxième avec 38 sièges, est écartelé entre sa promesse électorale de ne pas s'allier aux islamistes et sa volonté de gouverner.
D'autres partis craignent d'être associés à Ennahdha, qui a déjà été directement ou indirectement au pouvoir ces dernières années sans parvenir à faire décoller l'économie, ni répondre aux attentes sociales attisées par la révolution de 2011.
Si M. Jemli échoue à rassembler une majorité parlementaire d'ici mi-janvier, il reviendra au président Kais Saied de proposer un chef de gouvernement. Ce dernier aurait également deux mois pour former un cabinet.
La victoire de Saied, un indépendant très confortablement élu en octobre, avait suscité une vague d'espoir dans le pays, que les clivages dans la nouvelle Assemblée, s'ils perdurent, risquent de décevoir.
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Début décembre, les premiers débats du Parlement, où les trois quarts des députés siègent pour la première fois, ont notamment été perturbés par un sit-in de la députée Abir Moussi et son parti destourien libre (PDL), farouchement anti-islamiste.
Les parlementaires sont néanmoins parvenus à voter à temps cette semaine le budget 2020 préparé par le gouvernement sortant, qui continue de gérer les affaires courantes.
Reste que ce retard dans la formation du gouvernement ralentit le travail de l'exécutif, au seuil d'une année 2020 charnière pour l'économie du pays, dont la croissance reste faible (1,4% prévu cette année), avec les premiers remboursements au Fonds monétaire international (FMI).
Le FMI a versé 1,6 milliard de dollars depuis 2016 à Tunis dans le cadre d'un plan d'aide s'achevant en 2020, en contrepartie de vastes réformes, dont la réduction des dépenses publiques et des déficits.
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Après une politique d'austérité qui a valu des critiques au Premier ministre Youssef Chahed sortant -opposition et syndicats lui reprochant d'avoir trop cédé au FMI- la dette semble se stabiliser.
Mais, selon l'économiste Ezzedine Saidane, "tous les indicateurs" restent "dans le rouge".
"Le retard pris dans la formation du gouvernement et les tiraillements à l'Assemblée ne vont pas permettre de lancer les réformes cruciales", estime-t-il.
La population s'inquiète elle de l'inflation, qui s'est stabilisée sous les 7% mais continue de peser sur les ménages, tandis que le chômage ronge la jeunesse.
A l'approche du mois de janvier, traditionnellement marqué par des mobilisations sociales, le climat est tendu dans l'unique pays rescapé du Printemps arabe.
Début décembre, des manifestations ont éclaté après l'immolation d'un jeune homme protestant contre sa situation dans la région marginalisée de Sidi Bouzid (centre), où avait débuté fin 2010 la révolution tunisienne.