Ahmed Ouyahia, le Premier ministre algérien, ne dit pas toute la vérité à ses compatriotes sur la situation économique réelle que traverse leur pays. En l’espace d’une semaine, Ouyahia, dont le pays n’a toujours pas signé les accords de l’OMC, a publié une liste de 851 produits interdits temporairement à l’importation, ensuite expliqué que les réserves de change fondaient comme neige au soleil et enfin, il a envoyé une note sévère à ses ministres pour les rappeler à l’ordre face aux dépassements non autorisés par le budget.
Les Algériens sont désormais privés d’une longue de liste de produits de première nécessité, smartphones et autres appareils électroménagers autrefois importés. Selon le Premier ministre algérien, c’est pour éviter que les réserves de change, dont il ne resterait plus que 98 milliards de dollars, continuent de diminuer au rythme annuel de 20 à 25 milliards de dollars.
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Mercredi 27 décembre, une des notes envoyées par le chef du gouvernement un mois plus tôt à ses ministres a été diffusée par Tout sur l’Algérie. Il y affirme avoir eu "connaissance que des ordonnateurs du budget d’équipement de l’État procèdent à l’engagement de dépenses en violation de la législation et de la réglementation". Selon lui, "certains ordonnateurs se sont laissé aller à contrevenir à des décisions centrales de gels d’opérations, alors que d’autres se sont engagés dans des dépenses non couvertes par les crédits qui leur sont notifiés".
Mais si Ouyahia vocifère tant, exprimant une colère feinte, c’est juste pour préparer les Algériens à la triste réalité qu’ils sont appelés à vivre. En réalité, dans ce pays connu pour son manque de rigueur dans la gestion, les ordonnateurs ont toujours fait des dépassements budgétaires. On peut se référer au défunt Fonds de régulation des recettes (FRR), censé recueillir le surplus des revenus des hydrocarbures. Sur les 1000 milliards de dollars de revenus engrangés entre 2000 et 2016, il ne reste pas un seul dinar.
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Tout a été dépensé jusqu’au moindre centime parce que l’Algérie vit au-dessus de ses moyens. Quant au fameux FRR, mis en place en 2000, il atteignait 7917 milliards de dinars, soit un peu moins de 72 milliards de dollars, en 2012. Mais durant les cinq années qui ont suivi, la totalité des recettes annuelles a été dépensée dans des charges de fonctionnement et d'armement. De surcroît, le FRR a été régulièrement ponctionné. Aujourd’hui, il n’en reste plus rien.
Une fois ce matelas de sécurité totalement rogné, il restait, en mars 2017, deux options à l'Algérie, une mauvaise et une pire. La mauvaise, c’est l’endettement, notamment extérieur, puisque la dernière tentative de lever des fonds sur le marché local s’est soldée par un échec. Mais les dirigeants algériens affirment qu’ils veulent garder l’indépendance financière de République démocratique et populaire. Cet entêtement les aurait honorés s’ils avaient investi l’argent du pétrole dans la diversification de leur économie et dans une industrie de substitution aux importations, c’est-à-dire dans une vraie création de valeur. Malheureusement, la logique qui a prévalu durant les années fastes, celles où les cours du brut atteignaient 120 à 150 dollars, a été la redistribution.
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D’ailleurs, quand l’opposition algérienne a demandé où étaient passés les 1000 milliards de dollars, Chakib Khelil, aux commandes pendant cette longue période, a répondu sur les réseaux sociaux que "200 milliards de dollars ont couvert les charges d’exploitation, alors que les 800 milliards restants ne correspondent en fin de compte qu’à 166 dollars par Algérien et par an pour une population de 40 millions d’habitants". L’aveu est clair : les dirigeants n’ont jamais eu l’intention de bâtir un meilleur futur pour les Algériens.
L’autre solution, la pire, consiste à actionner la planche à billets. C’est pour cette dernière que l’Algérie a malheureusement opté, qui n'est que la suite logique de la philosophie des gouvernements de Abdelaziz Bouteflika. La planche à billets est bien utile quand il s’agit de payer les salariés et les entreprises dans une monnaie de singe, le dinar. Néanmoins, quand il faut importer de la marchandise, les devises étrangères exigées par les fournisseurs n'apparaissent pas dans les caisses de la Banque d’Algérie d'un claquement de doigts.
Pour l’heure, le montant des réserves de change tournerait autour de 98 à 100 milliards de dollars, sachant que les versions de Ouyahia et de son ministre des Finances divergent sur ce point. Mais le compteur tourne et si la tendance ne s’inverse pas, dans un avenir proche, l’Algérie pourrait vivre une situation similaire à celle du Venezuela ou du Zimbabwe, incapables d'importer des médicaments ou du blé.