La conjoncture actuelle est difficile pour presque tous les pays. Toutefois, certains d’entre eux risquent d’en souffrir plus que d’autres du fait du modèle économique sur lequel ils se sont basés.
C’est particulièrement le cas pour l’Algérie dont l’économie repose essentiellement sur la rente pétrolière et qui figure, du coup, parmi les pays dont les perspectives économiques sont alarmantes à cause des effets conjugués du coronavirus et de la chute des cours du baril de pétrole.
Le pays va connaître des turbulences budgétaires considérables avec des dépenses imprévues consécutives au Covid-19 et à ses conséquences économiques, dans un environnement marqué par un double choc pour un pays exportateur de pétrole: une baisse de la demande mondiale de l’or noir et une chute des prix du pétrole.
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En clair, le pays fait face à une importante chute de ses recettes budgétaires à cause notamment de la chute des recettes tirées des hydrocarbures qui représentent 60% des recettes fiscales du pays, alors que les dépenses explosent à cause du coronavirus et ses effets néfastes sur la machine économique.
En effet, alors que l’Algérie avait tablé dans son budget 2020 sur un cours du baril de Brent de 60 dollars pour espérer limiter son déficit budgétaire autour de 12,5 milliards de dollars, le baril s’échange actuellement à moins de 30 dollars, après avoir frôlé les 20 dollars en fin mars dernier. Face à cette situation, le gouvernement a déjà annoncé une diète budgétaire portant sur plus de 30% des dépenses de fonctionnement pour éviter l’explosion du déficit.
Malgré tout, et sur la foi des projections du FMI, le déficit budgétaire va se détériorer très fortement. En effet, selon les estimations de l’institution financière de Bretton Woods, ce déficit devrait atteindre -20% du PIB du pays en 2020, soit le pire de toute la région Moyen-Orient et Afrique du Nord.
Il faut dire qu’avec un «point mort fiscal», c’est-à-dire un cours du pétrole en dessous duquel le budget est dans le rouge, point se situant à 109 dollars le baril pour l’Algérie, l’explosion du déficit était inévitable avec un baril à moins de 30 dollars.
De même, les hydrocarbures représentant 95% des recettes d’exportations du pays, le cours actuel du baril va détériorer davantage le déficit commercial, sachant que les importations (produits alimentaires, pharmaceutiques, équipements, etc.) du pays sont globalement incompressibles. La situation est d’autant plus inquiétante que, selon les dernières projections du FMI, le cours du baril de pétrole devrait se situer au dessous des 45 dollars jusqu’en 2023.
Du coup, le déficit de la balance des opérations courante devrait à son tour se creuser et s’établir à -18,3% du PIB, selon le FMI.
Partant, les réserves de change du pays seront mises à rude épreuve. Celles-ci s’établissaient déjà sous la barre des 60 milliards de dollars avant que le pays n’enregistre son premier cas de coronavirus. Et face aux dépenses budgétaires occasionnées par le Covid-19 et ses conséquences économiques, le matelas financier en devises du pays devrait fondre et ne plus assurer l’équivalent d’une année d’importation de biens et services.
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En clair, l’Algérie restera au bord d’un gouffre financier inquiétant durant les années à venir. Pour y faire face, le gouvernement d’Abdelmadjid Tebboune n’a pas beaucoup de marges de manœuvre.
Le recours à l’endettement reste une option. En février, le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, en a annoncé la couleur en évoquant le recours à des financements extérieurs à long terme. Toutefois, à cause des dogmes dépassés auxquels tiennent encore quelques caciques du régime, l’Algérie ne compte pas recourir aux prêts du FMI et de certains bailleurs de fonds, comme la Banque mondiale, qui n’ont cessé de demander aux dirigeants algériens d’entreprendre des réformes structurelles.
Ainsi, le gouvernement sera obligé de faire appel à des institutions africaines (BAD) et arabes pour financer son déficit budgétaire abyssal. Il partira avec un atout favorable, le pays étant très peu endetté.
A défaut, l’autre option, déjà expérimentée sans succès par le gouvernement d’Ahmed Ouyahia lors des dernières années d’Abdelaziz Bouteflika, sera une fois encore le recours à la planche à billets avec tous ses défauts, notamment l'inflation. Mais, le gouvernemen aura t-il le choix,...