Algérie. Présidentielle 2019: entre maintien, report et chaos

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Le 17/12/2018 à 18h23, mis à jour le 18/12/2018 à 20h24

La prochaine présidentielle divise plus que jamais la classe politique algérienne. Désormais, l’affrontement n’est plus le 5e mandat, mais le report ou non de l’échéance électorale. Le seul objectif qui compte pour le pouvoir est la pérennisation de Bouteflika sans élections.

Après 4 mandats et 20 ans au pouvoir, Abdelaziz Bouteflika n’a pas préparé sa succession. Du coup, tout porte à croire que la transition risque de ne pas se passer dans la sérénité. Conséquence: à l’approche de la convocation du corps électoral pour l’élection présidentielle algérienne d’avril prochain, des manœuvres insolites sont initiées par les cercles du pouvoir et leurs souteneurs en vue de remettre en cause la tenue de l’élection présidentielle dans les délais impartis par la Constitution. 

Une chose est claire, pour les partisans du président Abdelaziz Bouteflika, l’heure n’est plus au 5e mandat, surtout en ce moment où le président est, dit-on, gravement malade, mais de le maintenir au pouvoir sans passer par les urnes et ce pour quelques années de plus.

Mais comment y parvenir?

Selon observalgerie.com, le schéma concocté est simple: «le président de la république, Abdelaziz Bouteflika, adressera prochainement une lettre aux citoyens, dans laquelle il convoquera les chefs des partis politiques, les syndicats, la société civile, les présidents des conseils, les anciens ministres et anciens chefs de partis, les membres du Conseil de la nation ainsi que ceux de l’Assemblée populaire nationale».

Selon le média électronique algérien, tout ce beau monde sera réuni pour mettre en place des amendements à la constitution, avec à la clé des discussions longues qui nécessiteront un report de la présidentielle de 2 ans maximum. Une période considérée comme largement suffisante pour un président dont l’activité a été réduite au strict minimum. Une prolongation du mandat du président, synonyme de statu quo qui arrange la nomenclature dirigeante, soucieuse de conserver ses privilèges en perpétuant l’hégémonie du clan.

Parmi les farouches partisans du report figure Abderazak Makri, président du Mouvement de la société pour la paix (MSP). Pour lui, le maintien coûte que coûte des délais constitutionnels au nom de la démocratie, pourrait entraîner «la fraude électorale, le maintien du statu quo, la corruption, l’hégémonie de la minorité dominante».

«Ceux qui saisissent les enjeux économiques, politiques et sociaux, ainsi que la situation au plan international connaissent la dangerosité de l’heure pour tous», a t-il souligné. Partant, il prône le «consensus national» pour conjurer «le danger des ambitions politiques au détriment de la stabilité du pays et de son avenir». Pour Makri, ce report se fera en contrepartie «de réformes politiques, des garanties juridiques pour limiter la fraude».

Face à l’opposition, qui est contre le report, Makri assène: «Si elle n’est pas consciente de cette réalité, elle court vers sa perte et sera alors seule responsable du chaos du pays, à Dieu ne plaise».

Mais du côté des opposants, on n'entend pas céder. Le mouvement Mouwatana met en garde, dans un communiqué, contre une prolongation du mandat présidentiel, synonyme d’«attentat à la morale, à l’Etat de droit, à la démocratie, aux intérêts stratégiques du pays». Selon le coordinateur national du mouvement, Soufiane Djilali, «proposer une prolongation à vie au régime moribond, au motif que celui-ci est dans l’embarras, c'est tout simplement trahir l’espoir d’un changement que les Algériens appellent de tous leurs vœux».

Pour le mouvement, «dans cette période de crise, engendrée par l’incompétence, l’irresponsabilité et la malhonnêteté du pouvoir, il aurait fallu laisser cette caste au pouvoir, seule, face à ses méfaits et non pas se proposer de lui offrir une couverture politique en négociant sur le dos du peuple».

Reste que même au niveau du bloc au pouvoir, on ne joue plus la même partition. Désormais, beaucoup de partisans et soutiens du RND voient en Ahmed Ouyahia, le profil idéal pour succéder au président Bouteflika. Même au sein du FLN, certains pensent qu’il est le meilleur candidat pour succéder au président. Du coup, ses partisans voient mal un report de la présidentielle.

Seddik Chihab, proche de Ouyahia s’est insurgé contre le report en soulignant que cela «sous-entend qu’il existe une situation exceptionnelle, or ce n’est pas le cas».

C’est dire que ceux qui tiennent au report de la présidentielle risquent de conduire l’Algérie vers l’incertitude et le chaos.

Par Karim Zeidane
Le 17/12/2018 à 18h23, mis à jour le 18/12/2018 à 20h24