Algérie: un lourd réquisitoire contre la richissime «fille cachée de Bouteflika»

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Le 09/10/2020 à 15h56, mis à jour le 09/10/2020 à 16h24

Jugée pour corruption et blanchiment d’argent, «Madame Maya» risque gros. Le procureur de la République a requis une lourde peine à l’encontre de celle qu'on a longtemps supposée comme la «fille cachée de Bouteflika».

Nachinachi Zoulikha-Chafika, souvent appelée «Madame Maya» et surnommée «Lemaâlma» (La cheffe), risque de séjourner longtemps en prison. En effet, au terme de son procès, le procureur de la République près du Tribunal de Chéraga d’Alger a requis contre la «fille secrète de Bouteflika», une peine de 15 ans de prison ferme assortie d’une amende de 6 millions de dinars algériens.

Le procureur a également requis des peines de 10 ans de prison ferme assorties d’une amende de 6 millions de dinars à l’encontre des deux filles de Mme Maya.

Maya est accusée d’avoir bâti sa fortune grâce à des affaires publiques lucratives, en partie en utilisant sa relation de longue date supposée avec l’ancien président Abdelaziz Bouteflika. La «fille secrète de Bouteflika» a été aidée par des gouverneurs, des ministres et autres hauts fonctionnaires, dont certains sont jugés en même temps qu’elle, dont Mohamed El-Ghazi, Abdelghani Zaalane, Abdelghani Hamel, Chafik El-Ghazi, etc.

Et le procureur a requis contre les anciens ministres Mohamed El-Ghazi (Travail) et Abdelghani Zaalane (Travaux publics) des peines de 15 ans de prison ferme assorties d’une amende d’un million de dinars algériens. Quant à l’ancien directeur général de la sûreté nationale, Abdelghani Hamel, le procureur a requis une peine de 12 ans de prison ferme et une amende d’un million de dinars.

Comment Madame Maya est devenue la «fille cachée» de Bouteflika? Mohamed Tougab, l’ancien secrétaire de Bouteflika, serait celui qui aurait introduit Madame Maya auprès des personnalités politiques et sécuritaires en tant que «membre de la famille du raïs». Ce qui a ouvert les portes à celle-ci, devenue juste après une femme influente que tout le monde considérait comme la «file cachée de Bouteflika». Il faut dire aussi qu’elle disposait d'entrées au plus haut niveau de la présidence de la République et d’une maison de résidence d’Etat, à Moretti, où se logeait le gotha de la politique et des affaires sous le règne de Bouteflika.

Du coup, tout le monde était à sa botte. Et ce jusqu’en 2017, lorsque Abdelghani Zaalane, alors wali d’Oran, informa Saïd Bouteflika avoir réglé le problème du terrain de sa sœur. Le petit frère et conseiller de l’ancien président explique alors à Zaalane que «Madame Maya» ne fait partie de la famille Bouteflika. Et pour couper toute rumeur de lien avec la famille, Saïd l’a faite arrêtée par les sécuritaires en juin 2017.

Toutefois, après la chute du régime Bouteflika et la lutte contre la corruption enclenchée par l’ancien homme fort du pays Gaïd Salah, chef d’Etat-major et vice-ministre de la Défense, l’affaire de «Madame Maya» prend une nouvelle ampleur.

Elle fait l’objet d’un chapelet d’accusations: blanchiment d’argent, complicité dans l’abus de fonction, violation de la règlementation des changes, complicité dans l’octroi d’indus avantages, corruption, trafic d’influence, etc.

Nachinachi Zoulikha-Chafika est considérée, selon la presse algérienne, comme la fille d’un compagnon de guerre de l’ancien président Bouteflika, et non sa fille. Grâce à ces liens proches avec Bouteflika, Mme Maya aurait amassé une fortune immense en Algérie et à l’étranger composée de terrains, villas, maisons coloniales, appartements luxueux, vitres de luxes parc de loisirs, etc. Elle dispose également de comptes bancaires bien garnis.

D’ailleurs, lors de son arrestation, les enquêteurs ont saisi de l’argent liquide d’une valeur de près d’un million d’euros en monnaie algérienne, 270 000 euros et 30.000 dollars, ainsi que 17 kg de bijoux et de faux documents. A ce titre, elle a déjà été condamnée à 18 mois de prison, avec ses deux filles, pour détention de faux passeports lorsqu’elle a été arrêtée alors qu’elle tentait de quitter l’Algérie avec ses enfants.

Par Karim Zeidane
Le 09/10/2020 à 15h56, mis à jour le 09/10/2020 à 16h24