Algérie: Tebboune, un pur produit du régime en quête de légitimité

Le président algérien, Abdelmadjid Tebboune.

Le président algérien, Abdelmadjid Tebboune. . DR

Le 30/10/2020 à 09h51, mis à jour le 30/10/2020 à 09h54

Actuellement hospitalisé en Allemagne, le président algérien Abdelmadjid Tebboune, instigateur du référendum de dimanche, est un pur produit du régime, éphémère Premier ministre de Bouteflika à qui il a succédé avec pour mission de tourner la page du "Hirak", mouvement de contestation inédit.

Premier président à ne pas être issu des rangs des anciens combattants de la guerre d'indépendance contre le pouvoir colonial français (1954-1962), M. Tebboune a été élu le 12 décembre 2019 lors d'un scrutin largement boudé par la population.

Souffrant d'un manque de légitimité du fait de cette abstention massive (plus de 60%) dans un contexte de soulèvement populaire, cet homme de 74 ans au regard sévère et au style sobre a promu une réforme de la Constitution, soumise à référendum ce dimanche.

Il devrait toutefois en être le grand absent: après s'être mis "volontairement" à l'isolement du fait de possibles cas de contamination au nouveau coronavirus dans son entourage, Abdelmadjid Tebboune a été hospitalisé en Allemagne pour des "examens approfondis".

Son état est "stable et n'est pas préoccupant", a indiqué jeudi la présidence algérienne, se voulant rassurante, sans toutefois donner de détails sur sa pathologie.

A son retour, et quel que soit le résultat du scrutin, M. Tebboune pourrait se retrouver face à une situation inchangée: toujours membre du Comité central du Front de libération nationale (FLN), l'ex-parti unique, il lui est difficile de représenter le renouveau attendu par la jeunesse, dans un pays dont la majorité de la population a moins de 30 ans.

Malgré l'essoufflement des manifestations du fait de la pandémie de Covid-19 et de la répression, cette jeunesse reste largement incarnée par le "Hirak".

Après avoir obtenu la démission d'Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis deux décennies, en avril 2019, ce mouvement antirégime inédit exige toujours la fin d'un "système" en place depuis l'indépendance et dont M. Tebboune a été un serviteur zélé.

Abdelmadjid Tebboune a fait ses classes dans l'administration préfectorale avant d'enchaîner les postes de wali (préfet) dans les années 1980, sous le règne du parti unique.

Il devient en 1991, une petite année, ministre délégué aux Collectivités locales sous la présidence du colonel Chadli Bendjedid, puis disparaît de la scène politique.

- "Parfait bureaucrate" -

Jamais candidat à une élection jusqu'à la présidentielle de fin 2019, "c'est une caricature du parfait bureaucrate", raconte à l'AFP un de ses anciens collaborateurs.

Visage barré d'une fine moustache, ce gros fumeur n'a jamais été connu pour son charisme ou ses dons d'orateur.

Tout juste élu président en 1999, M. Bouteflika l'avait fait sortir de sa "retraite anticipée", en le nommant ministre de la Communication avant de lui confier d'autres portefeuilles jusqu'en 2002.

Il avait été rappelé au gouvernement en 2012 par M. Bouteflika, avant d'en prendre la tête en mai 2017.

Plus bref Premier ministre de l'histoire algérienne, il a été limogé au bout de moins trois mois pour s'être attaqué aux oligarques gravitant dans l'entourage du chef de l'Etat, attributaires de gigantesques marchés publics, dont la plupart sont aujourd'hui emprisonnés pour corruption.

Au moment de revenir en première ligne, dans le contexte du "Hirak", Abdelmadjid Tebboune a mis en avant ce fait d'armes pour faire oublier son passé au service de M. Bouteflika.

Son entourage n'a toutefois pas été épargné par les affaires, puisqu'un de ses fils a été poursuivi --avant d'être acquitté-- dans une affaire de trafic d'influence impliquant plusieurs hauts responsables, après la saisie de 700 kg de cocaïne dans un port algérien en mai 2018.

Marié, M. Tebboune est père d'un autre garçon et de deux filles.

Dans l'optique de la présidentielle, il avait fait une campagne discrète. Une fois élu, il a essentiellement tenté d'affermir son pouvoir, sur fond de pandémie.

A l'international, tout en restant dans la droite ligne de ses prédécesseurs vis-à-vis de l'ancienne puissance coloniale, il a entamé un timide et délicat dialogue avec la France d'Emmanuel Macron, dans l'espoir commun de solder le lourd passif entre les deux pays.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 30/10/2020 à 09h51, mis à jour le 30/10/2020 à 09h54