Transféré le 28 octobre dernier en Allemagne pour des «examens médicaux approfondis», selon la version officielle, le président Abdelmadjid Tebboune vient de boucler un mois de soins en dehors de l’Algérie.
Durant cette période, le président a raté plusieurs évènements, dont particulièrement le référendum sur la révision constitutionnelle du 1er novembre dont il est l’artisan et qui attend toujours sa promulgation. Il y a aussi la célébration du 66e anniversaire du déclenchement de la guerre de libération nationale, sans oublier l'inauguration de la Grande mosquée d'Alger ou encore la non-célébration de son 75e anniversaire le 17 novembre courant.
Du fait de cette absence, le pays est à l'arret avec un gouvernement qui expédie les affaires courantes.
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La ratification de la loi de finances 2021, qui est passée par les deux chambres parlementaires, attend le retour du président Tebboune, de même que celle de la nouvelle constitution censée être faite dans les 30 jours suivant la publication des résultats du référendum. Or, le Conseil constitutionnel les a déjà rendus publics le 10 novembre. S'il y a encore une certaine marge pour la loi de finances 2021, il ne reste plus que 10 jours pour la nouvelle Constitution.
En attendant, et malgré les annonces rassurantes et parfois contradictoires de la présidence, aucune date de retour du président aux affaires n’est encore annoncée. Pourtant, le 15 novembre, un communiqué officiel affirmait que «le président a achevé le protocole de soins prescrits».
Du coup, cette situation suscite moult interrogations en Algérie et rappelle aussi la maladie de l’ancien président Abdelaziz Bouteflika.
Ainsi, pour le politologue algérien Mohamed Hennad, «cette longue absence pour maladie, doublée d’un ”protocole” d’information langue de bois, indique que le président est vraiment malade».
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Certains commencent déjà à réclamer l’application de l’article 102 de la loi fondamentale, relative à la vacance du pouvoir, afin d’éviter une crise constitutionnelle.
Une chose est sûre: après un mois, l’absence du président a réveillé le spectre de la vacance du pouvoir, comme ce fut le cas en 2013 lors de l’accident vasculaire cérébral et l’hospitalisation du président Abdelaziz Bouteflika en France. L'ancien président n’a jamais retrouvé toutes ses facultés. Finalement, un groupe d'aparactchiks civils et militaires se sont emparés du pouvoir, dont son frère Saïd Bouteflika et feu Ahmed Gaïd Salah, puissant vice-ministre de la Défense et chef d’état-major de l’armée algérienne, d'alors.
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Va-t-on vers un scénario identique? Beaucoup d'Algériens en sont convaincus.
En tout cas, la Constitution du pays ne prévoit pas un délai précis pour destituer un président malade et absent du pays, comme c’est le cas actuellement avec Tebboune.
Concernant la déclaration de vacance du pouvoir, elle se fait en deux temps. Il faut d’abord constater l’état d’empêchement temporaire du président pour une durée maximale de 45 jours, période pendant laquelle l'intérim est assuré par le président du Conseil de la Nation, c'est-à-dire du Sénat. Sur ce point, les nombreux communiqués de la présidence font tout pour écarter cette hypothèse d'état d’empêchement du président Tebboune.
Ensuite, si au bout de ce délai de 45 jours, le président demeure empêché, il est considéré avoir démissionné de plein droit, ce qui correspond à la vacance du pouvoir ouvrant une nouvelle période de 60 jours pour l'organisation d'une élection présidentielle.
Cependant, quand on connaît l’histoire des dirigeants algériens, il n’est pas certain que le Conseil constitutionnel saisira le Parlement sans l'aval de l'armée. Or le général Chengriha lui-même serait actuellement en Suisse, aussi malade que Tebboune.
En attendant, en cas de vacance de pouvoir, c’est le président du Sénat, Salah Goudjil, âgé de 89 ans, qui devrait assurer l’intérim jusqu’à l’élection d’un nouveau président. Ses dernières activités protocolaires laissent voir que le vieil homme s'y prépare déjà.