A l'image d'un secteur trop longtemps négligé, elle n'est désormais plus que l'ombre de sa splendeur passée: la peinture se fane, le toit s'effondre et les bureaux sont vides.
"La maison du cacao était la gloire de la région Ouest", qui couvrait près d'un tiers du pays, explique Pa Olusina Adebiyi, un ancien employé de l'immeuble âgé de 85 ans. "C'est devenu un taudis à l'abandon".
Avant la découverte du pétrole dans les années 70, l'agriculture employait près de 70% de la population active et le Nigeria était le deuxième producteur de cacao au monde.
Eclipsé depuis par les milliards de dollars générés par les hydrocarbures, le secteur a connu un lent déclin.
Selon l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), la production de cacao était de 237.000 tonnes en 2016. Un résultat bien maigre comparé à la Côte d'Ivoire (1,47 million de tonnes) ou au Ghana (859.000 tonnes).
Le gouvernement du président Muhammadu Buhari essait aujourd'hui de redynamiser l'agriculture pour diversifier une économie dépendante de l'or noir (90% des revenus d'exportation, 70% des recettes de l'Etat) qui sort péniblement d'une récession liée à l'effondrement des cours du baril.
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Le cacao, après avoir été "la ressource la plus négligée" du pays, est désormais au coeur de la nouvelle politique agricole, explique à l'AFP Sayina Riman, président de l'Association cacaoyère du Nigeria (CAN), qui a proposé au gouvernement un plan d'action sur 10 ans.
"Nous avons fait des recommandations qui peuvent changer l'histoire du cacao au Nigeria, en espérant qu'elles soient mises en place", dit-il.
Absence de débouchés
Le Nigeria a deux récoltes de cacao par an: une petite d'avril à juin et la principale, d'octobre à décembre.
Sur sa ferme de trois hectares, près du village de Sofolu (Etat d'Ogun), Oluranti Adeboye détache des arbres les cabosses mûres à l'aide d'une machette et d'un bâton.
"Le temps a été bon cette année, les pluies précoces ont stimulé ma récolte", raconte cet ancien fonctionnaire de 62 ans à la maigre ossature. "Ces cosses de cacao sont meilleures que ce que j'ai eu la saison dernière".
Torse nu, il ramasse péniblement les fruits dans des sacs où ils devront fermenter plusieurs jours avant de sécher au soleil et de partir pour être vendus à l'export.
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Chaque année, les paysans nigérians perdent une grande partie de leur production à cause des parasites et de la maladie de la cosse noire - un champignon qui affecte les cacaoyers.
"Ces arbres ont été plantés il y a plus de 10 ans. Ils sont vieux et fatigués. Nous avons besoin de nouveaux semis et de variétés améliorées mais les ressources ne sont pas là", affirme-t-il.
Sunday Ojo Folorunso, basé dans l'Etat voisin d'Ondo, se plaint de l'absence de débouchés pour les petits producteurs, estimant que le prix d'un kilo de cacao vendu à la ferme, soit 650 nairas (1,8 dollar) était "bien trop peu par rapports aux efforts consentis".
"Bel avenir"
Les chercheurs estiment que le Nigeria devrait moderniser ses méthodes de culture, mais aussi encourager l'utilisation de meilleurs semis, d'engrais et de pesticides.
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"Il y a un bel avenir pour l'industrie (du cacao) au Nigeria", déclare Ranjana Bhattacharjee, chercheur à l'Institut international d'agriculture tropicale (IITA) d'Ibadan.
"Si on les assiste, les agriculteurs pourraient passer de 300 kg par hectare en moyenne à 800 kg par hectare pour améliorer leur productivité et leurs revenus", dit-il.
D'après M. Bhattacharjee, le Nigeria pourrait aussi s'inspirer de la Côte d'Ivoire et du Ghana, qui produisent du chocolat et d'autres produits finis à partir de leur cacao, dégageant ainsi de meilleurs revenus.
Le Nigeria possédait autrefois plus de 20 usines de transformation mais l'absence d'investissements et le manque d'électricité pour les faire fonctionner ont réduit leur nombre à trois.
Selon un scientifique de l'Institut nigérian de recherche sur le cacao (CRIN, organisme public), la recherche a elle aussi cruellement souffert de la négligence chronique de l'Etat.
"Au CRIN, vous trouverez des arbres si âgés qu'ils ne produisent plus", confie-t-il sous couvert d'anonymat. "Certains d'entre eux sont aussi vieux que l'institut lui-même"... créé il y a plus de 60 ans.