Afrique du Sud: d'un Zuma l'autre et la débâcle de l'ANC inévitable en 2019

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Le 30/06/2017 à 16h36, mis à jour le 30/06/2017 à 16h40

Zuma veut une dévolution monarchique au sommet de son pays Il souhaite que son ex-femme Dlamini-Zuma lui succède afin d'étouffer les dizaines de scandales du clan. Sauf que les électeurs ont déjà montré qu'ils ne pardonneraient ni la corruption, ni l'impunité qu'il veut imposer à l'Afrique du Sud.

Indéboulonnable? "Oui", répondent ses fervents partisans qu'il continue de rouler dans la farine. "Peut-être bien", disent les opposants qui n'ont pas réussi à le faire chuter malgré des épreuves évidentes de corruption. Pourtant, il faudra bien que son parti, le Congrès national africain (ANC), lui trouve rapidement un remplaçant. C'est le principal point à l'ordre du jour de la réunion d'une semaine qui a débuté ce vendredi 30 juin à Johannesburg, même si l'ANC n'a prévu de le remplacer qu'en décembre 2017.

L'enjeu est de taille, puisque celui qui prendra la place de Zuma au sein du parti a de forte chance d'être le prochain président de la République. Mais, ce vieux loup de la politique sud-africaine ne veut pas d'un successeur qui aura tendance à trop fouiller dans son passé de corrompu, ses relations ténébreuses avec les Gupta, sa villa rénovée à près de 15 millions de dollars aux frais du contribuable sud-africain, la résidence de 25 millions de dollars acquise grâce à ses «amis» à Dubaï, etc.

Un bon profil pour les intérêts de Zuma

Il aurait aimé que Dlamini-Zuma, son ex-femme, ex-présidente de la Commission de l'Union africaine, ex-ministre des Affaires étrangères pendant huit ans, lui succède explique Le Monde. C'est la manière la plus sûre d'éviter des noises et des poursuites judiciaires qui pourraient troubler ses vieux jours. Dlamini Zuma a le soutien des femmes et des jeunes du parti. Cependant, elle n'est pas en odeur de sainteté avec les compagnons de lutte de Zuma qui ne veulent pas que se perpétue un système nuisible au parti et à l'Afrique du Sud.

Face à Nkosazana Dlamini-Zuma, il y a son actuel vice-président Cyril Ramaphosa, 64 ans. Ramaphosa est un ex-syndicaliste devenu un puissant homme d'affaires. Il a avec lui tous ceux qui, mécontents des mille et un scandales, veulent se débarrasser du clan Zuma. Il ne mâche pas ses mots quand il s'agit de critiquer le chef de l'Etat sud-africain. "Notre mouvement va mal, le pays va mal. Nous avons beaucoup de ressources, mais plusieurs mauvaises personnes à des postes clés", a-t-il regretté moins de deux semaines avant cette grand-messe de Jo'Burg, dans la réunion de la cellule locale de Stellenbosch.

Une victoire de Dlamini-Zuma sonnera la fin de l'ANC

Pour Dlamini-Zuma, face aux scandales à répétition de son ex-mari, il faut surtout se montrer discrète. Même quand elle acceptait son investiture comme candidate à la présidence du parti le 16 juin dernier, elle a tout juste salué l'honneur que lui faisait la Ligue des jeunes de l'ANC. Il s'agit d'une stratégie qui tranche avec celle de Ramaphosa. Certains analystes politiques estiment que cela pourrait se montrer payant d'essayer de convaincre les groupes de militants au sein de l'ANC qui sont de vrais électeurs plutôt que de s'adresser à l'opinion sud-africaine tout entière.

Mais, si elle gagne contre Ramaphosa, c'est l'opposition qui jubilera. Car les militants de l'ANC auront purement et simplement choisi la continuité, la corruption et l'impunité. Ils auront ainsi préféré tout ce que l'opinion publique sud-africaine est très nombreuse à rejeter. Dans le cas où les Zuma se succèderaient à la tête de l'ANC, il faut s'attendre à une débâcle électorale en 2019, lors des présidentielle. Les élections municipales de 2016 ont donné une idée du niveau de mécontentement des électeurs contre Jacob Zuma et les caciques du parti. L'ANC avait effectivement perdu la quasi-totalité des grandes villes sud-africaines. Ce serait pour Zuma et les siens l'occasion de répéter l'erreur de l'année dernière en espérant obtenir un résultat différent. C'est là que commence la folie.

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 30/06/2017 à 16h36, mis à jour le 30/06/2017 à 16h40