Libye: Haftar triomphant à Syrte, l'ONU impuissante et l'Union africaine absente

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Le 07/01/2020 à 11h19, mis à jour le 07/01/2020 à 11h22

Le maréchal Khalifa Haftar vient de remporter une importante victoire militaire. Pourtant, il n'est pas totalement à l'abri d'un revers dans ce contexte libyen qui tend à se complexifier. Les Nations unies et l'Union africaine son de plus en plus en marge du conflit.

La Libye continue d’être au centre de l'actualité internationale et du continent. En attendant l'intervention turque, Khalifa Haftar reste le maître du jeu.

Il vient de le confirmer par une offensive sur la ville stratégie de Syrte, tenue jusqu'ici par les milices fidèles au gouvernement d'entente nationale (GNA) de Fayez El-Serraj, basé à Tripoli.

Hier lundi 6 janvier 2020, l'Armée nationale libyenne (ANL) de Khalifa Haftar a affirmé dans un communiqué que "Syrte a été entièrement libérée". Les combats n'ont duré que 3 heures, preuve que les forces fidèles au GNA ne font pas le poids face à leurs frères ennemis de l'est du pays.

Le plus difficile est à venir

Une fois Syrte conquise, le plus difficile est à venir pour les hommes de Haftar, car désormais il y aura deux fronts, celui de Tripoli où les combats font rage depuis avril dernier et celui de Syrte qu'il faudra défendre et conserver, en espérant que d’autres comme Ibrahim Jadhran n’en profite pour refaire surface.

Car faut-il le rappeler, ce n'est pas parce que Syrte a été prise, que les troupes de Haftar pourront la conserver en défendant leurs positions, au niveau de son important port et de son très stratégique aéroport.

Dans le passé, les troupes du maréchal Haftar avaient réussi à prendre des positions similaires, mais ont été contraintes de les défendre en permanence. C'est le cas notamment en septembre 2016, quand elles se sont emparées du croissant pétrolier, notamment Ras Lanouf et Al-Sedra qui regroupent l'essentiel des terminaux pétroliers du pays.

Les enseignements du Croissant pétrolier

Il y a eu d’abord les milices fidèles à Tripoli qui ont plusieurs fois attaqué les positions de Haftar avant de renoncer à la confrontation.

Mais, ce sont surtout les troupes d'Ibrahim Jadhran qui ont été les plus nuisibles à Haftar et au pétrole libyen. Elles ne sont jamais avouées vaincues. En juin 2018, elles ont formé une nouvelle coalition et recruté un millier de mercenaires tchadiens pour aller à l'assaut du croissant pétrolier.

Les conséquences vont être catastrophiques, selon la National Oil Company (NOC) libyenne. Les combats qui ne dureront que quelques jours causeront la perte de deux réservoirs. La capacité globale de stockage de la NOC passera de 950.000 de barils à 550.000 millions de barils et les réparations devraient prendre plusieurs années dans le contexte d'insécurité actuelle.

Certes, les troupes de Haftar vont reprendre le dessus en chassant Ibrahim Jadhran et ses hommes vers le sud et l'est du pays, mais le mal était déjà fait.

Pour Syrte, ville stratégique située à mi-distance entre Ras Lanouf et Misrata et ancien fief de Moammar Kadhafi, il faut s'attendre à ce que les combats ne s'arrêtent pas immédiatement. Les milices de Misrata, fidèles au GNA, vont sûrement revenir, même si pour le moment, elles ont tant à faire avec les combats de Tripoli. L’arrivée des troupes turques et des mercenaires syriens pourraient changer leurs perspectives.

La communauté internationale impuissante

Pendant ce temps, les déclarations et les mises en gardes ses multiplient. Le président congolais Denis Sassou Nguesso qui a en charge le groupe de l'Union africaine pour la Libye est sorti de sa réserve. Selon lui, toute solution qui marginalise l'Afrique sera "'inefficace" et "contre-productive".

"La Libye est un pays africain et les victimes du conflit libyen sont essentiellement en Afrique. Dès lors, toute stratégie de règlement de la crise libyenne tendant à marginaliser le continent africain pourrait se révéler complètement inefficace et contre-productive", a déclaré Sassou Nguesso, ce lundi 6 janvier, devant des diplomates africains et occidentaux.

Pour sa part, Ghassan Salamé, envoyé spécial des Nations-Unies a appelé "les pays impliqués en Libye de cesser leurs ingérences". Il a également regretté que l'embargo contre les armes soit sans cesse violé aussi bien par ceux qui l'ont adopté que par les autres pays.

Evidemment, ce n'est pas la timidité de la réaction de l'Union africaine ou les complaintes de l'ONU qui changeront la situation actuelle. Pour sûre, la situation devrait se compliquait encore un peu plus, notamment si Recep Tayyip Erdogan s'entête en impliquant réellement son armée.

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 07/01/2020 à 11h19, mis à jour le 07/01/2020 à 11h22