Quand il a été interviewé, le 27 mars, par deux chaînes publiques françaises, Antonio Guterres, le secrétaire des Nations Unies, lançait sa grave alerte relayée par toute la presse.
"Il est encore temps d’éviter le pire, mais sans une mobilisation gigantesque, je crains que nous ayons en Afrique des millions de personnes infectées et des millions de morts", disait-il. Une funeste prédiction qui résonne encore dans les oreilles des Africains.
Il avait certes raison d’appeler à soutenir les efforts de riposte sur le continent et, à sa décharge, il peut évoquer le fameux principe de précaution. Mais, aujourd’hui, force est de constater que le continent est très loin de tels chiffres. Le nombre de cas augmente à un rythme beaucoup moins rapide qu’ailleurs et le taux de mortalité demeure, heureusement, très faible.
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L’Afrique du Sud, pays le plus affecté du continent n’a, à ce jour, que 15.515 cas de contamination, dont 264 décès et 7.005 rémissions. Ce, deux mois et demi après le déclenchement de la pandémie.
Certes, hier, l’Afrique du Sud a enregistré une plus forte progression du nombre de cas confirmés, ce qui laisse craindre le pire. Mais, force est de constater que la pandémie n’évolue pas au même rythme que dans la province chinoise d’Hubei, qui en fut l’épicentre. Elle ne prend pas non plus une trajectoire identique à celle qu’elle a empruntée en Europe. Tant s’en faut.
Par exemple, l’Espagne avait enregistré son premier cas le 31 janvier, alors que l’Afrique a vu l’arrivée du nouveau coronavirus un mois et cinq jours plus tard, le 5 mars. Pourtant, le 13 avril, c’est-à-dire il y a exactement 35 jours, la Péninsule ibérique vivait déjà des jours très sombres: 170.099 cas confirmés. Pire encore, à cette date, l’Espagne cumulait 17.756 décès, soit une létalité de 10,43%.
En Italie aussi, la pandémie a fait son arrivée le 31 janvier, et le 13 avril, le nombre de personnes ayant déjà été testées positives au Covid-19 était de 159.516, pour quelque 20.465 décès.
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Il est clair qu’à durée égale, avec 15.515 cas confirmés et seulement 264 décès, l’Afrique du Sud s’en sort avec un moindre mal. Du moins, pour le moment.
Même les deux pays les plus touchés du continent que sont l’Egypte et l’Algérie s’en tirent à bien meilleur compte. Ces deux Etats d’Afrique du Nord dénombrent, à ce jour, respectivement 12.229 et 7.019 cas, pour 630 et 548 décès. Là encore, on est très loin ce qui s’est passé ailleurs.
Le continent africain, dans son ensemble, avec 1.320 milliard d’habitants, ne connaît pas la même mortalité que l’Europe ou les Etats-Unis.
Pour le moment, sur les 316.900 décès que compte la planète, seuls 2.768 ont eu lieu sur le continent africain. Pourtant, les prévisions restent pessimistes, pour l’on ne sait quelle raison. Pas plus tard que le 18 avril dernier, c’est-à-dire un mois et demi après la sortie d’Antonio Guterres, l’Organisation mondiale de Santé affirmait que l’Afrique risquait d’être le prochain épicentre de la pandémie et prévoyait quelque 300.000 décès en une année.
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Mieux, seuls 7 pays ont enregistré plus d’une centaine de décès depuis le début et huit pays n’ont enregistré aucune victime du nouveau coronavirus. La Tunisie n’est pas très loin de se débarrasser définitivement du virus, puisqu’au cours des dix derniers jours, seuls cinq cas de contamination ont été enregistrés. Au Bénin, depuis le 8 mai, on ne compte que 20 nouveaux cas. Au Burkina Faso, on l’on craignait que le déconfinement ne soit à l’origine d’une nouvelle vague, c’est le calme plat. On ne compte pas plus de 6 à 7 cas de contamination quotidiens.
Dans plusieurs des pays, la pandémie évolue très peu, les décès souvent beaucoup moins. C’est le cas du Lesotho, de la Gambie, des Seychelles, des Comores, de la Namibie, du Botwana.
Lors de l’interview de M. Guterres, le continent comptait 1000 décès pour 19.000 contaminations. Et un mois et demi plus tard, sa prévision ne s’est réalisée qu’à un très faible niveau. L’Afrique attend donc toujours que les macabres annonces la concernant se concrétisent.