Depuis la mi-mars dernier, les frontières des pays africains sont fermées à cause de la pandémie du coronavirus. Une situation qui a fortement ralenti les économies du continent, qui sont passées d’une crise sanitaire à une crise économique aiguë, qui a mis en péril de nombreuses entreprises du secteur des voyages. Conséquence, le continent devrait entrer en récession cette année, une première depuis plus d’un quart de siècle.
Face à cette grave crise économique, conséquence de la pandémie et des mesures mises en place pour freiner l’expansion de la pandémie (confinement, fermetures des frontières aériennes et terrestre, etc.), les pays africains, à l’instar de ceux d’Europe et du reste du monde, se sont engagés dans des processus de déconfinement, visant à atténuer les effets de la crise sanitaire sur leurs économies.
Dans ce cadre, l’heure est aujourd’hui, un peu partout en Afrique, à l’ouverture des frontières aériennes.
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La Zambie figure parmi les pionniers, en décidant d’ouvrir immédiatement ses aéroports le jeudi 25 juin dans le but de relancer son économie. Elle a été suivie le lendemain par la Tunisie qui a ouvert, samedi 27 juin, ses frontières aériennes, maritimes et terrestres. Le Liberia a lui aussi annoncé l’ouverture ce dimanche 28 juin de ses frontières aériennes pour relancer son économie.
Quant à la Côte d‘Ivoire, après le redémarrage des vols domestiques le vendredi 26 juin, les autorités ont décidé de l’ouverture des frontières aériennes à partir du 1er juillet, et donc la reprise des vols internationaux, suspendus depuis trois mois à cause du coronavirus. Toutefois, les frontières terrestres et maritimes du pays resteront fermées au moins jusqu’au 15 juillet prochain.
L’état d’urgence et le bouclage de la région d’Abidjan, qui concentre 96% des cas de contamination du pays, restera en vigueur au moins jusqu’au 15 juillet.
Pour les pays de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), les frontières terrestres entre les pays membres vont s’ouvrir le 1er juillet prochain. L’ouverture des frontières aériennes et vols au sein de la communauté est prévue pour le 15 juillet. Le 22 juillet, l’espace aérien de la CEDEAO sera ouvert à l’ensemble du continent et le 1er août, la zone sera ouverte au reste du monde.
En Egypte, les autorités ont programmé depuis quelques semaines la réouverture des frontières aériennes du pays dans le but de relancer le secteur touristique, l’un des poumons de l’économie du pays.
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Au Maroc, après le redémarrage du transport aérien domestique par la compagnie Royal Air Maroc, les frontières aériennes devraient rouvrir en juillet prochain, après la levée de l’état d’urgence sanitaire, prévue pour le 10 juillet prochain.
Plusieurs facteurs justifient actuellement la réouverture des frontières, notamment aériennes. En effet, à l’instar des pays européens, principaux partenaires, et zone de destination privilégiés des voyageurs africains, le déconfinement est décrété partout, et le mot d’ordre, qui est désormais d’«apprendre à vivre avec le virus», ne devrait pas disparaître de sitôt.
Ensuite, il y a l’urgence de limiter la casse économique occasionnée par le Covid-19, notamment au niveau des secteurs du tourisme et du transport aérien. En effet, ces deux secteurs connaissent une crise sans précédent, et de nombreuses entreprises spécialisées dans le voyage et des compagnies aériennes risquent la faillite.
Le tourisme et le transport aérien sont à l’arrêt depuis la mi-mars dernier. Les pertes occasionnées dans ces deux secteurs sont conséquents, notamment pour les pays touristiques du continent: le Maroc, l’Egypte, la Tunisie, l’Afrique du Sud, le Zimbabwe, etc.
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Ainsi, pour l’Egypte, la Tunisie et le Maroc, qui figurent parmi les pays les plus touristiques du continent, avec le ralentissement de la pandémie en Europe, principal marché émetteur de touristes, l’ouverture des frontières devrait permettre de sauver une partie de la saison touristique en tirant profit des quelques semaines de vacances d’été.
A titre d’exemple, pour la Tunisie, les recettes touristiques ont chuté de 43%, s’établissant à un milliard de dinars tunisien (environ 312 millions d’euros) à la date du 20 juin dernier et ce, par rapport à la même période de l’année dernière.
Les pertes de la fermeture des frontières ont été aussi énorme sur les activités des agences de voyage, durement affectées par la pandémie en Afrique. En Tunisie, l’impact est estimé à 300 millions de dinars (102 millions d’euros) durant le premier semestre de l’année en cours.
Idem pour les agences de voyages d’Afrique subsaharienne, comme en atteste les témoignages des gérants d’agences de voyage du Mali et de la Mauritanie. Au Mali, à cause de la fermeture des frontières, les gérants des agences de voyages n’ont aucune visibilité sur leur avenir. Ils tablent sur une réouverture rapide des espaces aériens pour ne pas se retrouver en faillite.
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En effet, la fermeture des frontières aériennes a entraîné un arrêt total des activités des agences de voyage avec des conséquences commerciales, économique et sociales importantes. Les agences n’avaient plus de clients pour vendre les billets et devaient faire face aux demandes de clients souhaitant être remboursés de billets non utilisés, ce dont ne veulent pas entendre parler les compagnies aériennes.
Face à cette situation, certaines agences se sont retrouvées obligées de mettre au chômage technique une partie de leur personnel, afin d’atténuer les charges d’exploitation. Les facilités obtenues auprès des banques ont permis à de nombreuses agences de payer les salaires et de faire face à d’autres charges. Elles espèrent que les autorités se pencheront sur leur fiscalité au titre de l’année en cours.
Des agences de voyage qui doivent aussi, du fait de la pandémie, tirait un trait sur les importantes recettes du Haj, suspendu cette année par l’Arabie Saoudite.
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Cela est également valable pour de nombreux autre pays du continent. «Nous devons nous remettre au travail (…), y compris dans le secteur du tourisme. J’annonce donc la réouverture immédiate de tous les aéroports internationaux», a annoncé le président zambien Edgar Lungu, le jeudi 25 juin, lors d’un discours radiotélévisé. Son pays est devenu ainsi l’un des premier du continent à rouvrir ses frontières aériennes.
L’ouverture des frontières permettra également à l’importante diaspora africaine vivant en Europe et les personnes bloquées à l’étrangers à cause de la fermeture des frontières de pouvoir rentrer dans leur pays.
Toutefois, rien n’est encore acquis avec l’ouverture des frontières, tous les pays ne l’ayant pas encore décidé à cause de la persistance de la pandémie. Les ouvertures des frontières devront se faire dans le respect de strictes mesures de contrôle sanitaire, afin d’éviter de relancer la pandémie, qui semble d’ailleurs repartir de plus belle dans de nombreux pays du continent, dans le sillage des processus de déconfinement.
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Les touristes devront continuer de respecter les mesures d’hygiène mises en place: interdictions de grands rassemblements, obligation du port du masque dans les lieux clos et dans les transports publics demeurent en vigueur, auxquelles s’ajoutent de nombreuses règles selon les régions et les situations, etc.
Certains pays n’ont d’ailleurs pas hésité à sélectionner les pays auxquels ils ouvrent leurs frontières. C’est le cas de la Tunisie qui a mis en place deux listes (Verte et Orange) de pays dont les ressortissants sont autorisés à rentrer dans le territoire tunisien.
Pour les ressortissants des pays classés dans la «Liste Verte», considérés comme des Etats à faible taux de contamination (comme l’Autriche, l’Allemagne, l’Italie, le Japon, le Niger, la Côte d’Ivoire, etc.), leurs ressortissants peuvent accéder au territoire tunisien sans contraintes, mais seront tenus à respecter les mesures sanitaires en vigueur.
Quant aux ressortissants des pays de la «Liste Orange» dont figurent le Maroc, la France, l’Espagne, le Canada, et bien d’autres, ils doivent présenter, à leur arrivée sur le sol tunisien, la preuve d’un test de dépistage négatif au coronavirus, de type PCR, fait au plus tard 72 heures avant leur départ vers la Tunisie.
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Et tous les voyageurs en provenance d’autres pays qui ne figurent pas sur ces deux listes, hormis l’Algérie et la Libye, dont l’ouverture des frontières avec la Tunisie se fera dans le cadre des «convenions bilatérales», seront acceptés avec l’obligation de présenter un test PCR négatif de moins de 120 heures, en plus d’un engagement de confinement obligatoire de 14 jours.
Mais le fait de décider d’ouvrir ses frontières ne suffit pas pour nombre de pays africains qui veulent renouer leurs liaisons aériennes avec l’étranger, notamment l’Europe.
En effet, il faudra aussi espérer figurer sur les listes des pays dont les ressortissants seront autorisés à voyager vers les destinations européennes et autres.
A ce titre, pour l’Union Européenne, après avoir annoncé l’ouverture des frontières externes de l’Espace Schengen à partir du 1er juillet et concocté une liste de 51 pays dont 12 africains autorisés à entrer dans cet espace, cette liste a été réduite à 14 Etats, dont seulement 4 africains (l'Algérie, le Maroc, le Rwanda et la Tunisie), avant que cette liste ne soit suspendue, à cause d’un manque de consensus entre Etats européens.