L'édition 2019 du classement mondial relatif à la liberté de la presse de RSF montre une dégradation mondiale de celle-ci. Cette tendance n’épargne évidemment pas le continent africain.
Selon ce rapport, en 2018, «22 pays sur 48 sont classés en rouge (situation difficile) ou en noir (situation très grave) en Afrique subsaharienne».
«La haine des journalistes, les attaques contre les reporters d’investigation, la censure, notamment sur Internet et les réseaux sociaux, les pressions économiques et judiciaires, contribuent à affaiblir la production d’une information libre, indépendante et de qualité sur un continent où la liberté de la presse a connu d’importantes évolutions en 2018», souligne l’ONG dans son rapport sur le «Classement mondial de la liberté de la presse 2019».
Lire aussi : Liberté de la presse, quels sont les 5 champions africains?
En Afrique, des évolutions contrastées ont été enregistrées en 2018. C’est désormais la Namibie qui trône au sommet de ce classement de la liberté de la presse en Afrique.
Avec un gain de trois place, elle se hisse au 23e rang mondial et devance ainsi le Cap-Vert, qui se classe au 25e rang mondial.
Le Ghana, qui occupait quant à lui le premier rang africain de l’édition 2018, est désormais relégué au 3e rang du continent après avoir perdu 4 places pour se situer au 27e mondial en 2019.
Le pays a perdu son rang de leadership africain pour ne pas avoir protégé un groupe de reporters d’investigation qui enquêtaient sur la corruption dans le milieu du football ghanéen. L’un des membres de ce groupe avait d'ailleurs été abattu par des inconnus en janvier 2019.
Il faut aussi noter que si certains pays ont enregistré des progrès notables en matière de liberté de la presse, grâce à des changements politiques au sommet de l’Etat, d’autres ont continué à enregistrer d'inquiétants reculs.
Lire aussi : Cameroun. Liberté de la presse: la responsabilité des journalistes en question
Au niveau des évolutions positives, c’est l’Ethiopie, abonnée aux pires classements, qui réalise le meilleur bond avec un gain de 40 places pour se situer à la 110e place sur 180 pays classés.
Cette forte progression est consécutive au changement de régime qu'a connu le pays. Le nouveau Premier ministre, Abiy Ahmed, a en effet rapidement apporté d’importants changements en libérant des journalistes et des blogueurs, et en mettant fin à l’interdiction de plusieurs centaines de sites et de médias.
Le président éthipien a également réformé le cadre légal répressif contre les journalistes. Ainsi, «pour la première fois depuis plus de 10 ans, aucun journaliste ne se trouvait en prison dans le pays à la fin de l’année 2018», souligne RSF.
Derrière l’Ethiopie, la Gambie aussi a fait un bond notable en gagnant 30 places, grâce à une excellente dynamique engagée depuis le départ de Yahya Jammeh avec la création de nouveaux médias et le retour de journalistes exilés.
De plus, la diffamation a été reconnue comme étant anticonstitutionnelle.
Au niveau des pays qui ont enregistré des reculs notables en matière de liberté de la presse au niveau du continent, il y a la Tanzanie qui a perdu 25 places pour occuper le 118e rang mondial à cause des attaques sans précédent contre les médias et les journalistes.
Outre la disparition en novembre 2017 du journaliste Azory Gwanda, en 2018, ce sont deux enquêteurs sur sa disparition qui ont été contraints de quitter le pays.
Lire aussi : Mauritanie: atelier régional sur la liberté de la presse alors que les médias mauritaniens agonisent
De même, la Mauritanie a connu un net recul en matière de liberté de presse au cours de ces dernières années et a perdu 22 places pour se situer au 94e rang mondial.
La Mauritanie, qui était il y a quelques années encore la référence des pays arabes en matières de liberté de la presse, poursuit sa chute dans ce classement RSF.
Outre le fait que le blogueur Mohamed Cheikh ould Mohamed Mkhaitir, qui dénonçait l’instrumentalisation de la religion pour justifier l’esclavage, condamné à la peine de mort pour apostasie en 2014, avant que sa peine ne soit commuée à deux ans de prison en novembre 2017, n’a pas encore été remis en liberté après avoir purgé sa peine, plusieurs journalistes ont eu des déboires avec le pouvoir dont un photo-reporter étranger, qui s'était intéressé à l’affaires Mkhaitir.
Pour ce qui est des pays africains où la liberté de la presse est fortement piétinée on retrouve Djibouti (173e rang), le Soudan (175e) et l’Erythrée (178e). En Erythrée, aucun média indépendant n’est autorisé.
Toutefois, avec le chute du régime d’Omar el-Béchir au Soudan et la libération des journalistes et des blogueurs opposés au régime, il est fort probable que le pays enregistre des évolutions positives cette année et améliore son rang dans le prochain classement.
Voici le Top 10 africain du RSF en matière de liberté de la presse
Pays | Rang africain | Rang mondial | gains (en places) |
Namibie | 1er | 23e | 3 |
Cap Vert | 2e | 25e | 4 |
Ghana | 3e | 27e | -4 |
Afrique du Sud | 4e | 31e | -3 |
Burkina Faso | 5e | 36e | 5 |
Botswana | 6e | 44e | 4 |
Sénégal | 7e | 49e | 1 |
Madagascar | 8e | 54e | 0 |
Comores | 9e | 56e | -7 |
Maurice | 10e | 58e | -2 |