Sénégal-Gambie: la défaite de Jammeh largement saluée

Entre le président Yaya jammeh de la Gambie et Macky Sall du Sénégal, l'entente était loin d'être cordiale.

Entre le président Yaya jammeh de la Gambie et Macky Sall du Sénégal, l'entente était loin d'être cordiale.. DR

Le 03/12/2016 à 15h31, mis à jour le 03/12/2016 à 19h39

La défaite du président gambien Yaya Jammeh, après 22 ans de pouvoir absolu et de tensions avec le Sénégal, suscite beaucoup d’espoir au pays de la Teranga. Dakar invite déjà le président élu, Adama Barrow, à travailler ensemble sur les «problèmes et projets communs» entre les deux pays.

22 ans que le Sénégal subissait en silence les manœuvres et la mégalomanie de son voisin gambien. La défaite historique de Yaya Jammeh lors des élections du 1er décembre a été vécue comme un immense soulagement du côté du Sénégal. Et Dakar n’a pas tardé à féliciter son successeur, Adama Barrow, et l’inviter à travailler ensemble.

Aussitôt après la confirmation des résultats, Mankeur Ndiaye, le ministre sénégalais des Affaires étrangères, a félicité le président élu pour sa disponibilité à intensifier les relations entre le Sénégal et la Gambie. Il l’invite à s’attaquer ensemble «aux problèmes et projets qui nous sont communs». Des projets d’intégration communs qu’il nous faut absolument faire avancer, dit-il.

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S’il n’a pas détaillé les projets communs en souffrance, tout le monde a en tête la construction d’un pont sur le fleuve Gambie qui faciliterait le commerce des deux côtés de la frontière et contribuerait grandement au désenclavement de la Casamance, région du sud du Sénégal coupée du reste du pays de la Téranga par la Gambie.

Interrogée par RFI, Fatou Diagne Senghor, directrice Afrique de l’Ouest de l’ONG «Article 19» basée à Dakar, avance que la priorité du président Barrow c’est d’abord de remettre en ordre un pays dont l’économie est en lambeaux. Et dans ce cadre, l'amélioration des relations avec le Sénégal qui sont, d’après Mme Senghor, dans une situation «très déplorable», est sa priorité. «Maintenant qu’il est parti, j’espère que le Sénégal aura des relations normales avec la Gambie», soupire Oumar, étudiant à l’Université de Dakar.

Espoir sur le dossier casamançais

Pour le politologue Babacar Justin Ndiaye, qui réagissait aussi sur les ondes de la radio française, au plan des images, on peut parler de la Gambie comme un caillou dans la chaussure du Sénégal ou d’un pays dans l’estomac du Sénégal. «Du point de vue de la chronologie des événements, Yaya Jammeh n’est pas, bien entendu, celui qui a créé le Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC, rébellion), mais la Gambie est, par le hasard de la géographie, le sanctuaire, la profondeur stratégique du MFDC».

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Cette carte du MFDC, le désormais ex-président gambien n’a jamais hésité à l’utiliser lorsque Banjul se trouvait en tête-à-tête avec Dakar. Soufflant le chaud et le froid, il abritait tantôt des négociations entre le Sénégal et la rébellion, tout en offrant asile et armements à cette rebellion.

Un changement à la tête de la Gambie implique-t-il une nouvelle donne en Casamance? Babacar Justin Ndiaye veut y croire. «Yaya Jammeh, c’est une psychologie, celle d’un dictateur; un mental, celui d’un fonceur. Adama Barrow appartient à une ethnie qui n’a rien à voir avec les diolas, tête de pont du mouvement rebelle. Ce sont autant d’éléments qui se répercuteront forcément sur la nouvelle donne de la politique gambienne vis-à-vis du Sénégal. C’est un tournant électoral qui aura forcément des répercussions sur le dossier casamançais», dit-il.

Par Ibrahima Diallo (Dakar, correspondance)
Le 03/12/2016 à 15h31, mis à jour le 03/12/2016 à 19h39