La compagnie aérienne tunisienne traverse actuellement une crise aigüe et multiforme. Pour y faire face, son management compte revoir la politique de développement mise en place au cours de ces dernières années.
En effet, depuis la révolution du Jasmin, en février 2011, la compagnie publique tunisienne n’a pas retrouvé son équilibre financier et affichait des pertes chroniques. Une situation qui a déséquilibré les finances de la compagnie et qui hypothèque son avenir.
Pour faire face à cette crise, la compagnie a besoin d’importantes ressources financières, actuellement estimées à 1.300 millions de dinars tunisiens, soit 400 millions d’euros.
Mais voilà: en ces temps de vaches maigres, l’Etat tunisien, lui-même confronté à une crise financière aigüe et qui dépend fortement des financements extérieurs, ne peut assurer un nouvel envol de la compagnie.
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Partant, le management table sur une politique de réduction des coûts pour améliorer sa situation financière. Dans ce cadre, la compagnie prévoit d’éliminer certaines dessertes non-rentables vers certains pays européens.
Par ailleurs, face à cette crise, la compagnie compte aussi revoir ses ambitions de développement en Afrique à la baisse. Plus précisément, la compagnie publique compte reporter son plan d’expansion en Afrique.
La compagnie tunisienne, qui dessert actuellemnt les aéroports de Dakar (Sénégal), Bamako (Mali), Abidjan (Côte d’Ivoire), Ouagadougou (Burkina Faso) et Niamey (Niger), avait annoncé son ambition d’ouvrir de nombreuses nouvelles dessertes en Afrique subsaharienne.
Après Conakry (Guinée), Cotonou (Bénin), Tunisair annonçait l’ouverture de nouvelles destinations: Khartoum (Soudan), Addis-Abeba (Ethiopie), Nairobi (Kenya), Douala (Cameroun), Libreville (Gabon) et N’Djamena (Tchad).
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Ces nouvelles lignes programmées vont certainement faire les frais de cette politique de restrictions. Parallèlement, Tunisair va renforcer certaines lignes jugées rentables, comme celle reliant Tunis à Montréal.
Mais il est fort probable que ces mesures seront insuffisantes pour remettre la compagnie sur le trend de la croissance. En effet, le principal problème de Tunisair demeure la pléthore de ses salariés, qui pèse sur les charges de la compagnie. Tunisair compte en effet un total de 7.800 salariés pour une flotte de 30 avions.
A titre d’illustration, Royal Air Maroc, avec une flotte de 56 appareils, compte actuellement moins de 4.000 salariés. Et au niveau mondial, la norme est de 80 agents, toutes spécialités confondues, par avion en exploitation. En août 2018, le PDG de la compagnie, Elyes Mnakbi, déclarait à Reuters qu’il faut au moins licencier 1.200 collaborateurs. Si l’on tient compte des normes internationales, la compagnie doit se séparer des deux-tiers de ses effectifs! Une situation impossible du fait des troubles sociaux que cela genèrerait.
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Et au delà de la réduction des coûts, la compagnie doit aussi poursuivre le rajeunissement de sa flotte. Dans ce cadre, elle doit réceptionner 5 nouveaux appareils Airbus A320 neo entre 2019 et 2021. Reste à savoir si réellement elle a l’assise financière nécessaire pour y arriver, surtout qu’elle ne peut pas trop compter sur les pouvoirs publics qui dépendent des bailleurs de fonds.
Reste que la situation urge. En effet, avec l’ouverture du ciel tunisien (Open sky) dans le cadre d’un accord signé avec l’Union européenne, la concurrence sera rude et elle risque de porter un coup dur à la compagnie publique tunisienne au cas où celle-ci ne réussit pas sa restructuration.