Cameroun: sur les réseaux sociaux, les conflits communautaires exploités à fins électoralistes

Place J'aime mon pays à Yaoundé, au Cameroun.

Le 22/05/2023 à 07h57

VidéoLa fête de l’unité nationale sera célébrée ce samedi 20 mai. Un évènement commémoré dans un contexte marqué par de multiples messages de haine et de tribalisme véhiculés par certains sur les réseaux sociaux, ce que la majorité des citoyens considère comme une simple instrumentalisation des hommes politiques à des fins électoralistes.

Le Cameroun compte environ 240 ethnies réparties en trois grands groupes que sont les Bantous, les Semi-Bantous et les Soudanais. Toutes ces ethnies vivent sur un territoire d’une superficie de 475.442 km². Les Bantous sont majoritaires. Le pays a acquis son indépendance le 1er janvier 1960 après une lutte farouche des nationalistes contre les colons français et anglais.

C’est ce peuple qui va célébrer sa fête nationale le 20 mai dans chacune de ses dix régions. Une célébration dénommée Fête de l’unité nationale en référence au référendum du 20 mai 1972 et à l’issu duquel les Camerounais avaient voté massivement pour un Etat unifié par opposition à l’Etat fédéral alors en vigueur. La République fédérale du Cameroun devenait ainsi République unie du Cameroun.

Unité dans la diversité pour un Cameroun prospère, a-t-on coutume de dire. Malheureusement le concept du vivre-ensemble s’effrite sous l’effet de l’usure du temps. Actuellement, c’est l’ère de la promotion du tribalisme et de la propagation de messages de haine sur les réseaux sociaux.

Les Camerounais sont habitués à de telles pratiques depuis la dernière élection présidentielle de 2018. Et depuis lors, la montée en puissance de ces tares est perceptible au quotidien au point que certains citoyens, vivant dans leurs aires géographiques d’origine, n’hésitent plus à demander à ceux qui s’y sont installés de quitter leurs territoires même s’ils sont propriétaires de terrains acquis par achat. «Le foncier est l’élément qui va déclencher une guerre tribale ici au Cameroun si l’Etat ne règle pas ce contentieux comme il se doit. Car certaines tribus redoutent la spoliation de leurs terres contre de modiques sommes d’argent», déclare un citoyen rencontré au centre-ville de Yaoundé.

Une dénonciation qui s’ajoute à bien d’autres qui ont trait à la mauvaise gouvernance avec en prime le favoritisme, le népotisme et le clientélisme dont sont victimes des milliers de jeunes Camerounais.

Y-a-t-il un réel problème de tribalisme au pays? A cette question, les aînés répondent par la négative. «Il suffit juste de voir comment les Camerounais se comportent entre eux pour conclure qu’il n’y a pas un problème de tribalisme. Les nordistes se marient avec les sudistes, ceux du Centre avec ceux de l’Ouest et vice-versa. En plus, dans aucun coin du pays, il n’y a de forme de discrimination réelle», soutient un septuagénaire rencontré dans un taxi de ville.

Dans l’ensemble, les citoyens estiment que ce sont les hommes politiques qui alimentent les querelles intestines pour des raisons inavouées. Le Cameroun est néanmoins à la veille d’une présidentielle très sensible, celle de 2025.

Par Jean-Paul Mbia (Yaounde, correspondance)
Le 22/05/2023 à 07h57