Ce sont les grandes vacances. Pour éviter les ennuis de la maison durant ces trois mois, il faut trouver de quoi occuper les enfants. Face à la rareté des centres de loisirs à Libreville, ce n’est pas du tout évident. Et chaque famille essaye de trouver sa formule.
Chez Rosine, propriétaire d’un salon au quartier Nzeng-Ayong, les vacances riment avec transmission. Pour elle, cette implication relève de la stratégie parentale: «Ma fille vient m’aider pour éviter qu’elle ne tombe dans l’alcool ou la débauche. C’est sa distraction».
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En effet sa fille Arcelia, 16 ans, y consacre ses journées «Avant de sortir, je fais le ménage, la vaisselle, puis je viens ici m’occuper des clientes. Cette activité évite les loisirs inutiles», confie-t-elle. Un constat partagé par d’autres parents, dans une ville où seuls 15% des adolescents auraient accès à des activités encadrées selon les chiffrés du rapport 2024, de l’observatoire gabonais de la jeunesse
Le football de plage: loisir informel faute d’infrastructures
Quelques kilomètres plus loin, la plage du Lycée devient l’échappatoire de Mathurin et ses amis. «À nos heures perdues, on joue au football. Ça évite de traîner sans but», explique-t-il. Cette initiative spontanée pallie l’absence criante d’espaces dédiés. Pourtant, ces matchs improvisés révèlent une frustration croissante. Mbadinga, 16 ans, dénonce: «Les académies privées existent, mais elles coûtent trop cher».
Le témoignage de Mbadinga pointe un enjeu central «l’État devrait créer des académies accessibles à ceux qui n’ont pas les moyens. Ça nous permettrait de mieux occuper nos vacances» Un appel relayé par des éducateurs, qui soulignent que Libreville ne compte que 3 centres sportifs publics pour 200.000 jeunes. Face à ce vide, le «système D» familial reste la norme, comme chez Rosine où le salon devient espace d’apprentissage.
Entre occupation domestique et initiatives informelles, les adolescents gabonais tentent de s’adapter. Mais ces stratégies individuelles ne suffisent pas. Les témoignages convergent vers une urgence, celle de développer des infrastructures publiques gratuites ou low-cost (centres polyvalents, terrains sécurisés, ateliers artistiques). Comme le résume Mbadinga: «Le football, c’est plus qu’un jeu. C’est une école de discipline... si on nous en donne la chance».
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Si l’ingéniosité des Librevillois transforme des espaces privés en lieux de socialisation salons, plages, l’État doit désormais passer à l’action. La demande est claire: des infrastructures accessibles, encadrées par des professionnels pour offrir aux jeunes des alternatives structurées au «vide» estival. En attendant, Rosine résume l’enjeu: «Occuper leurs mains, c’est protéger leur avenir».