Ethiopie: après les télécoms, l’Etat ouvre le secteur bancaire aux investisseurs étrangers

Addis-Abeba, capitale de l'Ethiopie.

Le 05/05/2023 à 09h36

Deux ans après l’ouverture du secteur des télécommunications à des capitaux étrangers, l’Ethiopie a décidé d’octroyer, dans le secteur bancaire, des licences à des investisseurs internationaux d’ici à 2028. Une mesure qui vise à encourager les investissements étrangers et à stimuler la croissance économique du pays.

La libéralisation du secteur bancaire éthiopien avance à grands pas. Addis-Abeba délivrera jusqu’à cinq licences bancaires à des investisseurs étrangers au cours des cinq prochaines années. C’est ce qu’a déclaré le vice-gouverneur de la banque centrale éthiopienne (National Bank of Ethiopia) Solomon Desta, mercredi 3 mai, selon l’agence Reuters. D’après lui, cette mesure entre dans le cadre d’un programme d’ouverture du secteur des services financiers à la concurrence étrangère. «Les investisseurs étrangers disposent de différentes options pour entrer dans le secteur, notamment la formation de coentreprises avec des acteurs nationaux ou la création de filiales locales», précise-t-il.

Cette annonce marque un tournant majeur dans la stratégie d’ouverture du secteur bancaire éthiopien évoquée ces dernières années par de hauts responsables du pays. Déjà en février 2022, le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed avait annoncé que son gouvernement préparait «un amendement à la politique bancaire qui permet aux investisseurs étrangers de prendre des parts dans les banques éthiopiennes. Une fois que les conditions préalables seront remplies et que les banques préparées, nous l’appliquerons», avait-il déclaré.

Sept mois plus tard, en septembre, les choses s’accélèrent. Le Conseil des ministres adopte un document relatif à la nouvelle politique de libéralisation du secteur bancaire éthiopien dénommée «Banking Business Proclamation». Ce dernier autorise les banques étrangères à acquérir des participations allant jusqu’à 30% du capital des banques éthiopiennes. Toutefois, la participation maximale que les banques locales peuvent céder aux investisseurs étrangers ne peut excéder 40%. Cette libéralisation bancaire ne sera effective qu’après l’adoption, par le Parlement, de cette nouvelle loi bancaire prévue d’ici fin 2023.

Une chose est sûre. Ces déclarations du vice-gouverneur de la National Bank of Ethiopia devraient ravir de grandes banques africaines comme le groupe sud-africain Standard Bank, l’Egyptien Commercial International Bank (CIB), ou encore la Kenya Commercial Bank (KCB) qui ont des visées sur ce secteur depuis longtemps. Trois établissements qui ont déjà ouvert des bureaux de représentation en Ethiopie, respectivement fin octobre 2015, avril 2019 et juin 2019. Paul Russo, PDG de la KCB, avait même annoncé, début avril 2023, avoir entamé des négociations avec trois banques éthiopiennes pour l’acquisition d’une banque locale. Le groupe marocain Attijariwafa bank, qui a acquis, depuis octobre 2019, une participation majoritaire dans la banque rwandaise Cogebanque, pourrait également être intéressé par cette libéralisation bancaire à Addis-Abeba.

Ces banques pourront ainsi rivaliser dans ce secteur qui regroupe 29 banques commerciales, dominé par l’entreprise publique Commercial Bank of Ethiopia qui totalise 16 millions de clients et des actifs d’une valeur totale d’environ 17,7 milliards de dollars.

Cette accélération du projet de libéralisation du secteur bancaire intervient deux ans après l’ouverture du celui des télécommunications. Le gouvernement éthiopien avait entamé la libéralisation du secteur des télécommunications en accordant une licence à un consortium privé dirigé par l’entreprise kenyane Safaricom, le britannique Vodafone, et le japonais Sumitomo, pour un montant de 850 millions de dollars.

L’objectif étant de briser le monopole de l’entreprise publique Ethio Telecom. Le pays a également lancé un processus d’appel d’offres pour céder une participation de 45% d’Ethio Telecom et délivrer une troisième licence de télécommunications. Une décision qui faisait suite à la promesse de l’Etat de libéraliser des secteurs auparavant contrôlés par des entreprises publiques afin de stimuler les investissements étrangers et la croissance économique du pays.

Par Elimane Sembène
Le 05/05/2023 à 09h36