Après un net rebond du cours du baril consécutif à l’accord de réduction de la production de 1,2 million de barils par jour pour les 6 prochains mois, conclu par l’Opep et ses alliés, les cours de l’or noir se stabilisent en ce début de semaine.
Le Light sweet crude (WTI), pour la livraison de janvier, s'échange à 52,61 dollars, alors que le baril de Brent de la Mer du Nord, pour livraison en février, s'échange à 62,13 dollars.
Mais les espoir d’une reprise vigoureuse des cours, suite à cet accord, ont été rapidement douchées par la stabilisation du prix du baril.
Il faut souligner que plusieurs facteurs fondamentaux pèsent sur le niveau des cours.
D’abord, il y a la pression politique américaine sur l’Arabie saoudite, premier exportateur mondial de pétrole. Donald Trump ne cesse en effet de marteler que le prix du baril ne doit pas être élevé. Or, la conjoncture actuelle, notamment marquée par l'affaire Khashoggi au retentissement mondial, pousse les Saoudiens à ne pas trop mécontenter leur protecteur.
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Ensuite, les régles d'un marché caractérisé par la loi de l’offre et de la demande font que le cours du baril est maintenu à la baisse par les producteurs du pétrole de schiste américain, dont la production devient rentable à chaque fois que le prix du baril franchit la fourchette des 55-65 dollars après des investissements réalisés pour améliorer le coût d’exploitation de ce pétrole.
A ces facteurs, s’ajoutent bien évidemment l’impact du ralentissement de la croissance de l’économie mondiale et donc de la demande énergétique.
Cette situation, combinée à la hausse prévue de la production américaine, conduirait à une nouvelle surproduction de pétrole et donc à un nouveau cycle baissier du cours du baril de pétrole.
Selon l’Agence Internationale de l'Energie (AIE), les Etats-Unis pourraient totaliser jusqu’à 80% de l’augmentation de la production du pétrole brut d’ici 2025.
En février dernier, en effet, l’AIE estimait que la production américaine dépasserait bientôt celle du plus grand producteur du cartel de l’OPEP, l’Arabie Saoudite, et pourrait même dépasser celle de la Russie d’ici la fin de l’année en cours.
Et toujours selon l’AIE, la production du brut américain pourrait atteindre 11 millions de bpj d’ici fin 2018.
La hausse de la production américaine a été très rapide et a surtout été accompagnée par une réduction spectaculaire des coûts des producteurs américains, les rendant ainsi beaucoup plus compétitifs.
De fait, cette production concurrence, de plus en plus, d'anciens gros exportateurs comme l’Arabie Saoudite, la Russie, le Nigeria, etc. C'est dire qu'on se dirige vers une surproduction et donc vers un déséqulibre entre l'offre et la demande et, par ricochet, vers une tendance baissière du cours du baril de pétrole.
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Ces projections inquiètent les pays producteurs de pétrole, notamment ceux dont les économies reposent uniquement sur cette rente pétrolière et qui s’attendaient certainement à un rebond plus vigoureux et dans la durée des cours qui ont dévissé de 30% en deux mois.
C’est le cas tout particulièrement de l’Algérie, dont l’économie repose essentiellement sur le pétrole, qui représente 95% des exportations du pays, mais aussi de nombreux pays africains comme la Guinée Equatoriale, l’Angola, le Gabon, le Congo, le Tchad et le Nigeria qui n’ont pas investi les revenus de la rente pétrolière dans la diversification de leur économie.
Ces pays qui se sont même endettés entre-temps, à l’exception de l’Algérie qui a misé sur la planche à billets pour faire face à ses déficits, risquent de connaître des déficits budgétaire et courant importants.
Et pour un pays comme l’Algérie, le déficit budgétaire devrait tourner autour de 15 milliards de dollars, alors que celui de la balance des paiements devrait frôler les 20 milliards de dollars.
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Conséquence, les réserves de change du pays devrait poursuivre leur dégringolade.
Ainsi, le mois dernier, le ministre algérien des Finances, Abderrahmane Raouia, qui présentait les perspectives financières 2019-2021 soulignait que les réserves en devises du pays qui ressortaient à 88,61 milliards de dollars en juin dernier, devraient chuter à 62 milliards de dollars en fin 2019, pour tomber ensuite à 33,8 milliards de dollars à l’horizon 2021.
La chute risque d’être encore plus rapide en cas de dégringolade des cours du baril au cas où les projections de croissance forte de la production pétrolière américaine se confirment.
La situation risque de se corser encore plus pour ces pays rentiers en 2019, si les projections portant sur la forte augmentation de la production pétrolière américaine se confirment.
Cela pourrait même tirer davantage encore les prix du pétrole vers le bas.
En conséquence, les déficits devraient croître pour les pays africains producteurs de pétrole, notamment ceux qui ont basé leurs lois de finance sur des projections de cours du baril plutôt optimistes.
Bref, les pays africains, producteurs ou futurs producteurs de pétrole doivent revoir leurs modèles de développement.
Certains pays, comme le Gabon, ont d'ores et déjà entamé un processus de diversification de leur économie. Mais cette transformation est , de fait, un processus très lent...