En juillet 2017, le pianiste afro-cubain, Omar Sosa, avait égayé le Festival international d'Alger par un concert de jazz dont les notes résonnent encore à l'oreille des mélomanes. Quelques années auparavant, le public du Festival panafricain d'Alger avait pu savourer le mbalax de Youssou N'Dour. Mais désormais, tout ceci ne sera que vieux souvenirs pour les Algérois. Leurs autorités culturelles en ont décidé ainsi.
Peu de personnes s'attendaient à la grave décision que vient de prendre le ministère algérien de la Culture. Il vient d'adresser une note à ses délégations dans les wilayas dans laquelle il est clairement indiqué que "désormais les budgets alloués à ces événements (culturels) ne pourront plus servir à payer les cachets des artistes étrangers", explique le site d'information Algérie Focus.
Concernant le budget du ministère de la Culture auxdits festivals, "seuls les Algériens en bénéficieront" tranche le document que cite le même organe de presse. Les artistes étrangers devront se contenter du maigre butin venant des sponsors. Or, dans un pays où les entreprises privées dépendent des subventions et des marchés publics, le secteur privé ne devrait pas tarder à suivre cette directive.
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Il est évident qu'avec une telle mesure les artistes étrangers sont pratiquement persona non grata en terre algérienne. Cette mesure est digne d'un régime qui singe à tous points la Corée du Nord dans sa fermeture au monde extérieur.
Le ministère de la Culture justifie cette hérésie par la nécessité "d'encourager les artistes algériens à se produire partout sur le territoire national". Un argument peu convaincant, puisque la véritable explication tient en deux données. La première, c'est que cette exclusion des artistes étrangers s'explique par la crise financière que traverse le pays et qui n'autorise plus de sortie de devises. La crise est tellement sévère que pour boucler son budget, l'Algérie a recours à la planche à billets. Or, avec une planche à billets, on peut toujours payer des biens ou des services produits par des acteurs économiques locaux. Mais, dès que cela suppose une sortie de devises, les choses se compliquent.
La seconde donnée est encore plus consternante: l'Algérie a fait le choix de l'autarcie dans tous les domaines. En effet, elle a interdit à l'importation une liste de 851 produits. On peut considérer que les spectacles des artistes étrangers ne sont que la 852e ligne de cette fameuse liste d'interdiction. D'ailleurs, l'Algérie a montré à maintes reprises son hostilité vis-à-vis des étrangers et de leurs cultures. Elle reproche aux Français la colonisation, aux Marocains leur attachement à l'intégrité territoriale, aux Africains d'être des envahisseurs, aux Américains de soutenir Israël, etc. Par conséquent, les autorités estiment que les Algériens peuvent très bien se passer de culture musicale étrangère.