Les migrants subsahariens, raison de la fermeture de Caritas Algérie?

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Le 13/10/2022 à 17h27, mis à jour le 13/10/2022 à 17h30

Selon Africa Intelligence, la fermeture récente de Caritas Algérie «est liée à la trop grande visibilité de ses projets sociaux au bénéfice des migrants subsahariens, le plus souvent en situation irrégulière». Une information tout sauf surprenante.

Après 60 ans d’existence, Caritas Algérie a été fermé par les autorités algériennes. «L'Eglise catholique en Algérie a le regret d'annoncer la fermeture complète et définitive de son service appelé "Caritas Algérie", à partir du 1er octobre, et ce conformément à la demande des pouvoirs publics», avait indiqué l'archevêché dans un communiqué publié en fin du mois dernier sur son site internet.

Cette fermeture a des conséquences importantes, puisqu’elle signifie l'«arrêt d'un certain nombre d'activités, notamment l'aide aux migrants», avait déploré l'archevêque d'Alger Jean-Paul Vesco, cité par l’AFP. Quant à la raison de cet arrêt, l’autorité religieuse a expliqué que Caritas Algérie est «une organisation non autorisée». Pour rappel, le gouvernement algérien avait évoqué, en 2018, une nouvelle loi sur les associations pour encadrer les organisations à caractère religieux, décrétant le gel du renouvellement de ce type d'organisations. Cette loi n’a toujours pas vu le jour.

Mais on en sait désormais un peu plus sur les raisons qui ont poussé le gouvernement d’Abdelamadjid Tebboune à fermer Caritas Algérie. Et ce n’est pas l’organisation, mais plutôt la cible de ses actions, qui gênerait l’exécutif algérien. «La fermeture de la branche algérienne de l'organisation internationale Caritas Internationalis (…) est liée à la trop grande visibilité de ses projets sociaux au bénéfice des migrants subsahariens, le plus souvent en situation irrégulière», révèle ce jeudi Africa Intelligence.

Il faut que dire que l’Algérie n’est pas connue pour être un modèle en matière de gestion de la chose migratoire, et ce, depuis longtemps. Les rapports d’ONG internationales, comme Human Rights Watch (HRW) ou Amnesty International, sur les refoulements ou les traitements inhumains infligés aux migrants subsahariens dans ce pays d'Afrique du Nord sont légion.

Pas plus tard qu’en juin dernier, Médecins sans frontières (MSF) a dénoncé «les traitements inhumains» infligés à des migrants ouest-africains voulant aller en Europe et qui ont été refoulés de l’Algérie, mais aussi de la Libye, vers le Niger. «En moyenne, environ 2.000 migrants sont mensuellement expulsés de l’Algérie et de la Libye», avait alerté l’organisation, précisant que parmi ces aventuriers, «on enregistre des blessés graves, des femmes victimes de viols, et des personnes souffrant d’importants traumatismes, abandonnées en plein désert à la frontière algéro-nigérienne».

Et en janvier de cette année, c’est HRW qui épinglait le régime algérien pour le traitement inhumain des migrants subsahariens expulsés vers le Niger voisin, abandonnés en plein désert à la frontière. Peu importe s'ils n'ont pas d'eau ou s'ils risquent de mourir de faim ou de soif. Et parmi eux, l’on compte des dizaines de «demandeurs d’asile» ou des «personnes relevant de la compétence du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés». On est donc en présence d’une «violation du principe de non-refoulement en vertu du droit international des réfugiés», comme le souligne HRW.

Des rapports comme les deux que nous venons de citer, il en sort chaque année et la situation ne change pas en Algérie. Elle devrai, au contraire, s'empirer: avec la fermeture de Caritas Algérie, les conditions de vie, déjà abjectes, des nombreux migrants présents dans le pays ne semblent pas parties pour s’améliorer…

Par Mohamed Koné
Le 13/10/2022 à 17h27, mis à jour le 13/10/2022 à 17h30