Alors que la rue algérienne est sur le point de crier victoire, subsiste la question de savoir ce qui est prévu pour remplacer Bouteflika.
En effet, dans ce pays où le pouvoir s'est évertué à étouffer dans l'oeuf toutes les oppositions depuis son indépendance, en 1962, personne ne semble pour l'heure émerger: ni un Mohamed Morsi égyptien de 2011, ni un Colonel Amadou Toumani Touré malien de 1991, lesquels sauraient prendre les devants.
Et vu que toutes les forces syndicales ont été inféodées au Front de libération nationale, parti au pouvoir, il n'y aura sûrement pas de Lech Waleza polonais.
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Alors comment les Algériens comptent-ils sortir victorieux de cette révolution en cours? Il faut peut-être voir du côté des candidats de l'opposition à l'élection présidentielle qui était prévue le 18 avril prochain.
Aujourd'hui les regards se tournent, avant tout, vers le général-major à la retraite Ali Ghediri.
Cet homme, qui était très actif il y a quelues s emaines encore, notamment dans les médias, juste avant les manifestations est, depuis, bizarrement devenu discret.
Peut-être veut-il éviter qu'on l'accuse de récupération? Possible. La dernièrefois en date où on l'a entendu, c'était au lendemain des premières manifestations du 22 février, soit une dizaine de jours après l'annonce de la candidature de Bouteflika à un cinquième mandat.
"Les dirigeants pensaient que les Algériens ne pouvaient pas avoir de comportement civilisé et exprimer leurs opinions comme tous les peuples, d’une manière organisée. Tous ceux qui ont parié sur l’anarchie hier ont échoué", avait-il dit.
Ali Ghediri avait alors simplement appelé le pouvoir algérien à se "hisser au niveau de conscience politique que le peuple a montrée". Mais depuis, plus rien.
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Ce qui est clair, c'est que Ghediri pourrait bien arborer l'habit de l'homme nouveau que réclament les manifestants anti-système, en tout cas mieux que Ali Benflis, qui, lui, a renoncé à sa candidature alors qu'il était cité comme le plus sérieux challenger de Bouteflika.
Ali Benflis, non plus, n'a pas voulu être sur le devant de la scène lors des manifestations, mais a sévèrement taclé le "régime absolutiste" algérien.
Dans une interview sur la chaîne francophone TV5,Ali Benflisl analyse la situation de non-droit vers laquelle s'achemine l'Algérie, puisque Bouteflika veut prolonger son quatrièreme mandat "hors de tout cadre constitutionnel".
Le régime en place a également décidé de nommer en tant que Premier ministre, Noureddine Bedoui, l'ancien ministre de l'Intérieur à l'origine de la nouvelle "loi électorale" et des "fraude massives des récentes consultations".
Mais pour Ali Benflis, "la rue reste mobilisée et vendredi [soit le 14 avril 2019, Ndlr] elle va rejeter cette mascarade".
Selon lui, dans deux jours, venrderdi prochain, il y aura encore des manifestations pacifiques où pas une seule vitre ne sera cassée. "Ce sera la parole du peuple: nous voulons du nouveau. Le nouveau se construira par une transition démocratique".
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Evidemment, Benflis rejette en bloc l'idée de dialogue que soutient le "système ancien" qui n'a, selon lui, "aucune légitimité". Car la légitimité ne peut s'acquérir qu'au terme d'une élection transparente, ce qui ne risque pas d'être le cas si c'est ce régime qui organise des élections.
A l'entendre, on sent que Ali Benflis ne rechignerait pas à jouer un rôle actif dans cette révolution qui ne dit pas (encore) son nom.
En tout état de cause, en son absence en ce loment, et en celle de l'indépendant Ali Ghediri, il est clair que le manque d'un leader servant de référence pourrait être un sérieux handicap pour la suite des évènements.
D'autres personnes, des activistes comme Rachid Nekkaz, candidat à la présidentielle désormais reportée sine die, pourraient-ils se servir de leur popularité pour devenir des leaders?
Rien n'est moins sûr. Mais cette absence patente d'hommes pouvant assumer ce rôle crucial de guide risque fort de mener les manifestations dans l'impasse.