L'Algérie digère mal d'avoir été retirée par l'Union européenne de la liste des pays sûrs

A cause de la faiblesse des tests effectués en Algérie, les voyageurs transportent avec eux le virus hors du pays. . DR

Le 02/08/2020 à 19h57, mis à jour le 04/08/2020 à 09h41

Les autorités algériennes ont réagi avec colère à la décision de l'Union européenne de retirer le pays de la liste des pays présentant une situation sanitaire suffisamment sûre pour permettre à leurs citoyens de se rendre dans les 27 de l'UE.

Le gouvernement algérien l'a mauvaise. Il vient de réagir par le biais d'un communiqué du ministère des Affaires étrangères (MAE) à la liste actualisée pour le mois d'août des pays donc les ressortissants sont autorisés par l'Union européenne à voyager dans les 27 Etats. 

Selon le MAE algérien, cette décision est "sans effet pratique", car l'Algérie, touchée très fortement par la pandémie, avait "déjà décidé de maintenir ses frontières fermées par stricte adhésion au principe de protection de ses citoyens pour les prémunir contre les cas de Covid-19 importés, à l'origine de la propagation initiale du virus en Algérie". 

Evidemment, le MAE ne cache pas sa gêne de voir son pays écarté et se lance dans une explication sans lien avec la dure réalité que traverse le pays depuis le début de la pandémie.

Il rappelle ainsi que "les moyens et les efforts colossaux engagés par l'Etat sont sans nul pareil dans de nombreux pays, où sont enregistrées de plus graves situations, avec des cas de contamination de loin supérieurs à ceux recensés en Algérie".

Et d'ajouter: "les efforts de l'Etat ont permis d'atteindre une importante capacité d'action dans le domaine de la lutte contre le Covid-19, avec notamment près d'une quarantaine de centres de dépistages répartis sur l'ensemble du territoire national et des milliers de tests PCR effectués quotidiennement".

La réalité est est légèrement différente, dans la mesure où, ce 2 août où le communiqué est publié, ont été annoncés par le site d'information Tout sur l'Algérie les décès de quatre membres du personnel soignant, notamment trois médecins et un infirmier, portant le décompte à 48 pour cette catégorie. De même, l'Algérie compte officiellement 1223 victimes de la pandémie, pour ses 30950 cas confirmés. Des chiffres sans doute bien en deça de la réalité. 

Sans doute, le MAE algérien a oublié de contacter son homologue de la Santé qui fait profil bas depuis le début de la pandémie. Ses rares déclarations tournent autour du manque de matériel de protection, notamment quand il demandait à ses concitoyens de confectionner eux-mêmes leurs masques. 

L'ensemble des professionnels de santé algériens ont déploré le manque criard de matériel de lutte, notamment les fameux tests RT-PCR, les seuls permettant de diagnostiquer la maladie au stade précoce, d'engager en conséquence une lutte et qui sont en conséquent reconnus par l'Organisation mondiale de la santé (OMS). 

Car, dans la réalité, si les centres de dépistage existent bel et bien et ont été habilités, les kits de dépistage et les réactifs, quant à eux, font atrocement défaut. Seuls les rares centres de l'Institut Pasteur d'Alger en possèdent. Les experts estiment également qu'il y a aujourd'hui une quinzaine de jours de retard dans les diagnostics, ce qui signifie autant de contaminations non détectées et autant de facteurs de propagation rapide de la pandémie. 

Et au-delà de toutes ces considérations, les faits ont montré qu'un nombre important d'Algériens autorisés à se rendre en Europe ont été testés positifs, alors qu'ils n'avaient pas pu être diagnostiqués dans leur pays. Les médecins français ont été les premiers à tirer la sonnette d'alarme après en avoir fait le constat. Le ministre des Affaires étrangères algérien a encore beaucoup de travail s'il veut contredire le professeur Eric de Caumes, de l'hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière, qui disait que le nombre de cas est "en train d'exploser en Algérie". 

Par Djamel Boutebour
Le 02/08/2020 à 19h57, mis à jour le 04/08/2020 à 09h41