Comment un pays de 44 millions d'habitants comptant plus de décès que 52 autres au sein du continent peut-il se contenter de quelques milliers de tests depuis le début de la pandémie? C'est pourtant la triste prouesse de l'Algérie. Ce qui lui vaut de vives critiques. L'Algérie est officiellement le troisième pays le plus touché par la pandémie en Afrique, derrière l'Afrique du Sud et l'Egypte. Mais, en réalité, elle pourrait être la nation la plus infectée, car les cas asymptomatiques passent systématiquement entre les mailles du filet faute de tests.
"Depuis le début de l’épidémie de Covid-19, l’Algérie a dépisté à peine 7.000 cas: l’une des plus faibles capacités de dépistage en Afrique", écrit d'emblée le site d'information Algérie Part Plus en titre d'un article consacré à la faiblesse du nombre de diagnostics.
Ce sont les autorités algériennes, elles-mêmes, qui en font l'aveu en reconnaissant officiellement que depuis le début de l'épidémie sur leur sol, elles n'ont réalisé que cet insignifiant nombre de tests. A titre de comparaison, le Ghana en a réalisé 197.194, le Maroc 155.500, et l'Afrique du Sud 596.777.
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Même des pays comme le Sénégal avec ses 35.016 tests ou la Côte d'Ivoire avec 24.317 diagnostics font nettement mieux que l'Algérie. Pourtant, les plus hautes autorités du pays ne semblent pas avoir pris conscience de cette ubuesque situation. Même Djibouti, avec son million d'habitants a réussi à cumuler plus de 23.000 tests.
Ne se rendant pas compte de l'insuffisance des efforts fournis dans le dépistage, le Premier ministre n'a pas trouvé mieux que de se fendre d'une surprenante déclaration. “Nous sommes arrivés à un chiffre au-delà de 7.000 tests et nous avons aujourd’hui beaucoup de capacités en matière de dépistage”, a-t-il annoncé samedi dernier, alors qu'il présidait le point de presse quotidien sur l'épidémie dans son pays.
N'a-t-il pas réalisé que beaucoup de pays aspirent à réaliser des milliers de tests, non pas depuis le début de l'épidémie, mais plutôt quotidiennement, avant cette malheureuse sortie? En effet, le Maroc s'est doté d'un outil permettant de réaliser jusqu'à 10.000 diagnostics par jour, mais aussi d'un laboratoire mobile. Le Ghana en fait autant. Le Sénégal possède pas moins de trois laboratoires mobiles, à Touba, à Kolda et à Kaolack, lui permettant de cumuler jusqu'à 1.300 tests par jour avec l'Institut Pasteur de Dakar.
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L'Algérie a donc fait le choix de limiter les dépistages qu'au strict minimum. Il y a plus d'une quinzaine de jours, les mêmes autorités étaient fières d'avoir atteint la barre des 400 tests de diagnostic quotidiens, mais force est de constater que ces déclarations ne sont pas confirmées dans les faits, car le cas échéant, au moins 6.000 tests supplémentaires se seraient ajoutés aux 6.500 annoncés par l'Algérie à l'Organisation mondiale de la Santé, début mai. Or, ce n'est pas le cas.
Tout porte à croire que les rares personnes qui sont testées en Algérie sont justement celles qui présentent tous les symptômes du Covid-19 au point que le diagnostic peut être posé par tout médecin, même sans recourir au test.
Cette faiblesse des diagnostics laisse donc penser que des milliers de cas, notamment parmi les patients asymptomatiques, ne seront jamais diagnostiqués. Car, les spécialistes estiment que jusqu'à 80% des malades peuvent ne présenter aucun signe de la maladie. Ce qui veut dire que si l'Algérie affirme avoir 8.503 cas confirmés, le nombre d'infections pourrait être jusqu'à cinq fois plus élevé que ce que montrent les chiffres officiels.