Cameroun: polémique autour du projet de loi régissant les associations artistiques et culturelles

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Le 03/07/2020 à 07h56, mis à jour le 03/07/2020 à 13h10

Les artistes accusent le gouvernement de vouloir avoir la main mise sur leurs activités de ne pas avoir été consultés. En face, le ministère des Arts et de la Culture assure que ce texte est la somme des avis des acteurs de ce secteur et leur garantit de meilleures conditions de vie.

Le 29 juin, le gouvernement a déposé pour examen à l’Assemblée nationale, le projet de loi régissant les associations artistiques et culturelles au Cameroun. «L’aboutissement de ce projet de loi va contribuer à structurer le mouvement artistique et culturel du pays à travers la création de véritables entreprises culturelles et partant, à professionnaliser ce secteur potentiellement pourvoyeur d’emplois et de richesses», indique le ministère des Arts et de la Culture.

La présente loi extrait les associations artistiques et culturelles des dispositions de l’article 5 alinéa 3 de la loi du 19 décembre 1990 sur la liberté d’association, et soumet leur gestion à des textes particuliers.

Ainsi, toute association nationale ou étrangère qui souhaite accéder au statut d’association culturelle et artistique doit au préalable obtenir un agrément du ministre en charge de la Culture. 

Cette disposition rompt avec la loi de 1990 qui dispose que les associations nationales sont autorisées par les préfectures, tandis que les associations étrangères ne peuvent exercer aucune activité sur le territoire sans autorisation préalable du ministre de l’Administration territoriale.

Ce projet de loi est cependant critiqué par les acteurs culturels qui ont lancé une pétition en ligne pour manifester leur indignation, et qui rassemble déjà plus de 1000 signatures.

Ceux-ci accusent le gouvernement de vouloir avoir la main mise sur leurs activités et de brider leur liberté d’entreprendre.

«Nous nous élevons contre plusieurs dispositions de ce projet de loi, notamment le degré d’intervention à outrance du ministre en charge de la Culture dans la vie des associations culturelles, le glissement du régime de déclaration à celui d’autorisation des associations à objet culturel et le régime de sanctions par trop sévères et pour des motifs qui en eux-mêmes posent déjà un problème quant à leur justesse», dénoncent-ils, entre autres griefs énumérés.

Ils se plaignent également de ne pas avoir été consultés, alors que «l’élaboration de lois d’un secteur aussi sensible doit être l’œuvre des professionnels en la matière», affirment-ils. Côté gouvernement, l’on affirme que ce projet de loi est la somme des avis des différents acteurs du secteur consultés sur l’étendue du territoire.

«C’est une activité qui a été largement inclusive et participative», affirme Blaise Nkene, deuxième conseiller au ministère des Arts et de la culture.

Selon ce dernier, la présente loi a été pensée dans l’intérêt des acteurs de ce secteur. «C’est un texte qui va améliorer les conditions de vie des artistes, leur donner la possibilité d’être financés. Ce qui n’existe pas dans la loi de 1990. Ce que nous avons écrit n’est pas nouveau. Nous avons tout simplement fait un rappel d’un certain nombre de principes de droit commun qui existent déjà dans la loi de 1990. Ces associations se créent et s’administrent librement, mais en respectant la législation et la réglementation en vigueur», ajoute-t-il.

Un collectif d’artistes a d’ores et déjà saisi les députés pour leur demander de ne pas voter la loi en l’état et propose que les acteurs du secteur soient associés à une relecture du texte.

Par Patricia Ngo Ngouem (Yaounde, correspondance)
Le 03/07/2020 à 07h56, mis à jour le 03/07/2020 à 13h10