Transport aérien: Afrique, terre de conquête de Turkish Airlines et d’Emirates

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Le 01/08/2016 à 07h36

L’Afrique devient une destination prisée des grandes compagnies de transport aérien international qui contrôlent 80% du trafic entre le continent et le reste du monde. Les compagnies africaines sont globalement démunies face aux géants mondiaux du secteur qui étendent leurs tentacules.

L’Afrique ne pèse que 3% du trafic mondial, mais elle est devenue depuis quelques années le théâtre d’une concurrence rude entre les grandes compagnies aériennes mondiales pour le contrôle de son ciel. Il faut dire que les projections tablent sur une croissance vigoureuse du secteur du transport.

Selon la Commission africaine de l’aviation civile (CAFAC), le secteur devrait afficher une progression moyenne de l’ordre de 8% sur les cinq prochaines années dans le sillage de la nouvelle dynamique que connaît le continent. Si les traditionnelles compagnies aériennes des grands pays européens sont toujours omniprésentes, comme c’est le cas d’Air France, de British airways et de Lufthansa, d’autres acteurs aux dents longues sont engagés dans cette rude bataille du contrôle du ciel africain.

Ainsi, si le groupe Air France/KLM réalise à lui seul 20% de parts de marché sur le trafic entre l’Afrique et l’Europe, désormais, il faudra compter sur de nouveaux acteurs dont Qatar airways et surtout Emirates et Turkish Airlines.

Ces compagnies sont attirées par les flux de trafic de plus en plus dense entre l’Afrique et le reste du monde.

Aujourd’hui, de nombreux voyageurs venant d’un pays africain transitent d’abord par Dubaï avec les vols d’Emirates pour se rendre en Asie, en Europe et au Moyen-Orient, et même, ironie du sort, vers d’autres pays africains !

Turkish airlines met plein les gaz

Pour sa part, Turkish airlines a fait de l’Afrique sa priorité absolue. Pour son PDG, Temel Kotil, «c’est une nouvelle Chine proche de l’Europe». Du coup, en l’espace de trois années, la compagnie turque a doublé son réseau sur le continent. Mieux, elle est devenue la compagnie aérienne la plus présente sur le continent avec actuellement 48 destinations dans 36 pays africains sur un total de 283 destinations.

Pour sa part, Emirates couvre 150 destinations dans le monde assure la desserte de 22 destinations dans 19 pays africains.

Conséquence de cette rude concurrence, les compagnies aériennes non africaines contrôlaient, à elles seules, en 2015, 80% du trafic entre le continent et le reste du monde. Ainsi, toutes les compagnies africaines se partagent seulement 20% du trafic restant.

Et dans ce cadre, le hub de Casablanca joue un rôle important pour Royal Air Maroc et demeure le hub le plus important entre l’Afrique et l’Europe. La proximité du Maroc vis-à-vis des pays d’Europe de l’ouest (France, Espagne, Allemagne, Belgique, etc.) constitue un atout positif pour la compagnie marocaine face aux hubs de Dubaï et d’Istanbul. Ainsi, la RAM assure le transport de 1,2 million de voyageurs en l’Afrique, dont 80% en continuation. Les hubs d’Istanbul et de Dubaï portent surtout préjudice aux compagnies d’Afrique de l’est: Ethiopian airlines, Kenyan airways et EgyptAir.

Elles poussent aussi les anciennes compagnies européennes présentes historiquement sur le continent à réagir, intensifiant ainsi la concurrence au détriment des compagnies africaines. Ainsi, Air France, qui détient 20% du capital d’Air Côte d’Ivoire, et qui compte plus de 300 vols hebdomadaires sur le continent, compte faire d’Abidjan son hub régional. Une manière de protéger sa position stratégique déjà ébranlée par Royal Air Maroc et conserver son pré-carré africain dans l’aérien.

Exacerbation de la concurrence

Enfin, face aux arrivées de nouveaux acteurs aériens puissants dans le ciel africain, les transporteurs du continent restent globalement impuissants du fait de la force de frappe de ces opérateurs. A titre d’exemple, Turkish airlines compte une flotte de 293 avions dont 7 cargos, soit le cumul des cinq premières compagnies aériennes africaines en termes de flotte: Ethiopian airlines, EgyptAir, South african airlines, Royal Air Maroc et Air Algérie. Quant à Emirates, sa flotte s’établit à 250 appareils en exploitation, dont 15 cargos.

Outre la puissance des ces compagnies qui sont en plus globalement plus compétitives, il faut aussi souligner que ces nouveaux entrants sur le marché du continent, comparativement aux compagnies africaines, sont réputées parmi celles offrant les meilleurs qualité de service au niveau du secteur.

Partant, ces deux compagnies ouvrent ainsi les nouvelles destinations à tour de bras tout en multipliant les accords de partenariats stratégiques avec les compagnies africaines les plus en vue.

In fine, la conquête du ciel africain ne fera que s’exacerber dans les années à venir. Reste à savoir quelles seront les compagnies qui seront à même de tenir cette confrontation. Si la RAM a réussi sa restructuration, EgyptAir, Kenya airways et South african airlines s’y engage dans un environnement des plus incertain.

A défaut d’accords stratégiques et de regroupement entre compagnies africaines, il n’est pas exclu que certains de ces compagnies tombent dans les escarcelles des pavillons étrangers.

Par Moussa Diop
Le 01/08/2016 à 07h36