Coronavirus: voici pourquoi Ethiopian Airlines maintient ses vols, malgré les risques encourus

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Le 03/02/2020 à 15h50, mis à jour le 03/02/2020 à 17h25

Si de nombreuses compagnies aériennes africaines (Royal Air Maroc, RwandAir ou Kenya Airways) ont suspendu leurs liaisons avec la Chine, la première compagnie aérienne africaine, Ethiopian Airlines, annonce le maintien de la plupart de ses vols vers la Chine. Voici la raison.

Face aux inquiétudes de propagation du coronavirus en Afrique, comme l'illustrent les multiples fausses alertes dans différents pays du continent, de nombreuses compagnies aériennes africaines ont décidé de suspendre leurs dessertes vers la Chine. C’est notamment le cas de Royal Air Maroc, de Kenya Airways ou encore de RwandAir. 

Mais la compagnie nationale éthiopienne maintient ses vols à destination de la Chine, bien que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ait déclaré l’épidémie «urgence de santé publique de portée internationale». La première compagnie aérienne africaine, Ethiopian Airlines, décide ainsi de prendre d'importants risques, alors même qu'elle est, aujourd’hui, leader du trafic aérien intra-africain.

Pourquoi donc ce choix risqué, en sachant pertinemment que l'Afrique est, de loin, le moins bien outillé pour faire face à un telle épidémie?

La réponse, limpide, des dirigeants d'Ethiopian Airlines est la suivante: c'est le business.

Selon le site Air Journal, la compagnie mentionne, dans un communiqué publié le jeudi 30 janvier 2020, que la Chine est un «marché stratégique» pour le développement d’Ethiopian Airlines.

Il faut dire qu’avec ses 5 destinations desservies en Chine -Pékin, Shanghai, Guangzhou, Chengdu et Hong Kong-, Ethiopian Airlines est la compagnie africaine qui dessert le plus de villes chinoises, et, de loin, celle qui réalise le plus de trafic, en termes de passagers, avec l’Empire du Milieu.

De nombreux ressortissant d’Afrique subsaharienne, dont ceux des pays de l’Afrique de l’Ouest et centrale, de plus en plus nombreux à se rendre en Chine, empruntent le hub d’Ethiopian Airlines de Bole, à Addis-Abeba.

La compagnie assurait en effet quasiment 7 vols journaliers entre son hub d'Addis-Abeba et les aéroports de Chine qu'elle dessert.

Toutefois, du fait des annulations de vols des passagers, la compagnie a été obligée de réduire le nombre de ses vols vers la Chine. La réduction des fréquences de vols concerne toutes les villes, excepté Hong Kong où elle garde ses 4 vols hebdomadaires. Pour les 4 autres villes, ce sera seulement 5 liaisons hebdomadaires vers Pékin, Shanghai et Guangzhou et 2 vols hebdomadaires pour Chengdu. 

Sur cette liaison précise, Ethiopian Airlines utilise de gros porteurs et la manne financière générée est donc assurément importante, et ce, d’autant que d’autres compagnies concurrentes, comme Kenyan Airways, RwandAir ou encore Royal Air Maroc, ne desservent désormais plus la Chine.

Mais faut-il vraiment faire courir ce risque de mettre en péril la sécurité sanitaire des populations éthiopiennes, et plus largement africaines, sur l’autel de stratégies à visées purement mercantiles? Un risque d'autant plus important que l’Afrique est réellement démunie face aux épidémies.

Celle d’Ebola, qui avait touché de plein fouet trois pays d’Afrique de l’Ouest –la Guinée, la Sierra Leone et le Liberia–, et avait causé la mort de plus de 11.300 personnes, est encore très vive dans les esprits. 

Mais Ethiopian Airlines n'est pas l'unique compagnie d'Afrique à considérer que l'argent n'a pas d'odeur. Au nord du continent, Air Algérie, qui avait provisoirement suspendu sa liaison avec la Chine, a finalement décidé d’annoncer le maintien de sa liaison Alger-Pékin.

«Nous travaillons en étroite collaboration avec le ministère de la Santé et nous avons pris des mesures préventives», a affirmé le porte-parole de la compagnie algérienne, tout en prenant soin de souligner que cette suspension temporaire n’était pas liée à l’épidémie du coronavirus.

Et pendant ce temps, dans le monde, de grandes compagnies aériennes, tant nord-américaines, qu'européennes et asiatiques ont été les premières à annoncer, en grand nombre, la suspension de leurs dessertes chinoises, en raison de la progression de l’épidémie. Face au simple bon sens, leur stratégie financière passe au second plan. 

Par Kofi Gabriel
Le 03/02/2020 à 15h50, mis à jour le 03/02/2020 à 17h25