Aux Pays-Bas, la consommation et la vente de cannabis ne sont pas légalisées, mais réglementées. La drogue est vendue dans les fameux coffee shops, à raison d'une quantité maximale de 500 grammes par lieu de vente et de 5 grammes pour chaque client. Sans aller jusque là, d’autres pays, notamment européens, ont assoupli les règles de détention et de consommation de cette drogue.
En Espagne, il est permis d’en fumer chez soi ou dans des "cannabis social clubs". Au Portugal, jusqu’à 25 grammes, on ne risque rien en cas de contrôle. En Italie, la quantité est limitée à 5 grammes. En Suisse jusqu’à 10 grammes, on ne risque que 100 francs d’amende.
Evidemment, jusqu’ici les législations de la plupart des pays étaient frileuses et le sont restées.
En revanche, en 2013, l’Uruguay a choisi de franchir le rubicond en légalisant de manière beaucoup plus large la production à titre personnel, la vente et l’achat en pharmacie, et la consommation dans des clubs spécifiques.
Cette décision semble avoir été le début d'une déferlante. Plusieurs pays ou régions comme le Canada et certains Etats des Etats-Unis ont depuis suivi le mouvement.
Lire aussi : Sénégal: faut-il décriminaliser la consommation de cannabis?
Depuis quelque temps, certains pays africains semblent avoir flairé le très gros potentiel de cette plante, dont les vertus thérapeutiques sont vantées un peu partout dans le monde. Pour le moment, ce sont les pays de l’Afrique australe qui font figure de pionniers, en l’occurrence l’Afrique du Sud, le Lesotho et le Zimbabwe.
Dans ce dernier pays, après le dispositif légal d’avril 2018, c’est la semaine dernière que les règles concernant la culture, la transformation et l’exportation de cannabis ont été précisées. Et les autorités du pays affichent clairement l’objectif de faire du chanvre une des sources de devises du pays, notamment en mettant l’accent sur sa transformation, aussi bien dans la filière pharmaceutique que dans celle du textile.
Ainsi au Zimbabwe, trois types de permis sont délivrés, pour les agriculteurs, les industriels et les laboratoires de recherches ou les chercheurs. Ceux qui veulent se lancer dans la production agricole ne pourront néanmoins vendre qu’aux industriels, pour éviter que les consommateurs n’aient directement accès à l’herbe brute, dans un but purement récréatif. Il s’agit donc d’un encadrement permettant de prévenir les éventuelles dérives. En effet, pour les autorités zimbabwéennes, cette légalisation n’a été faite que dans un but purement thérapeutique et industriel. Il y a néanmoins une précision de taille: pour être producteur ou insdustriel, il faut débourser la rondelette somme de 50.000 dollars afin d'acquérir la licence.
En Afrique du Sud, la législation est un peu complexe, puisque par un arrêté de la Cour suprême sud-africaine datant de 2018, la consommation de cannabis est bel est bien dépénalisée. Sauf qu’ici, il y a lieu de préciser qu’il s’agit d’une consommation privée et non en public. Le juge adjoint de cette plus haute juridiction du pays avait estimé que "la consommation ou la possession de cannabis par un adulte dans un endroit privé et à des fins personnelles ne constituait pas une infraction pénale".
Lire aussi : Afrique du Sud: le cannabis fait désormais le bonheur des malades
Par cette décision qui fait office de jurisprudence, la Cour suprême sud-africaine invalidait toutes les lois qui en criminalisaient la consommation privée et par conséquent, la détention dans une logique de consommation personnelle.
Mais en ne disant rien sur la consommation en public et surtout sur la vente, la cour confirmait leur caractère illégal. Du coup, les petites quantités allant jusqu’à quelques grammes ne font pas l’objet de poursuites judiciaires. En revanche, gare aux mules qui veulent transporter des quantités importantes notamment vers les pays voisins.
Quoi qu’il en soit, beaucoup en Afrique du Sud estiment que cette brèche ouverte par la Cour suprême permettra d’aller vers une légalisation beaucoup plus claire, notamment pour la commercialisation. Plusieurs entreprises investissent déjà. En revanche, il n’est toujours pas question de cultiver le chanvre comme peuvent le faire les agriculteurs du Zimbabwe voisin.
La culture n’est autorisée qu’à titre personnel, elle doit donc se faire au domicile du consommateur et ne pas dépasser une certaine quantité. Enfin, les produits dérivés ne doivent pas contenir plus de 0,2% de tétrahydrocannabinol (THC; le principe actif qui contribue à modifier l’état de conscience du consommateur).
Enfin, il y a le Lesotho qui est le tout premier pays africain à avoir légalisé la production agricole du cannabis, mais uniquement à des fins thérapeutiques. En pratique, il faut une licence de production, comme au Zimbabwe. La première entreprise à en avoir bénéficié est Medigrow Lesotho, mais très vite d’autres ont acheté la licence pour installer de vastes plantations. A croire que les deux millions de Sothos se soignent au THC ou au CBD (le cannabidiol est une autre molécule du cannabis, utilisée pour calmer le système nerveux).
Lire aussi : Tanzanie: 30 hectares de cannabis détruits
En tout cas, ces pays d’Afrique australe se préparent pour le marché international qui pourrait s’ouvrir progressivement, même s’il est évident qu’il fera l’objet d’un contrôle très strict, notamment dans les premières années de légalisation de la culture du chanvre. Ce faisant, ils prennent une longueur d’avance sur le reste du continent, notamment par le biais de l’encadrement légal et surtout la mise en place d’entreprises structurées capables de démarcher des clients américains, canadiens, voire européens.
Dans les autres parties du continent, même si la culture existe, et souvent à très grande échelle, l’heure est encore à la pénalisation de la production et surtout de la vente.