Les éditeurs de presse réunis autour de l’association «Réseau des patrons de presse du Cameroun» (REPAC) ont décidé d’observer une journée «presse morte» ce lundi 4 mai 2020 sur toute l’étendue du territoire national, à l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse célébrée la veille sous le thème: "Le journalisme sans crainte ni complaisance".
Ce, à l’effet de dénoncer le «refus de l’Etat de soutenir la résilience de la presse à capitaux privés» face à la pandémie du coronavirus (Covid-19), alors que les mesures de restrictions prises par le gouvernement pour endiguer la propagation du virus ont entraîné l’accentuation de «la fragilité économique de la presse», disent-ils dans un communiqué publié le 28 avril dernier. Conséquence : la plupart des publications sont absentes des kiosques ce matin.
Les patrons de presse dénoncent également «le non-déblocage à temps de l’appui institutionnel de l’État», nouveau vocable employé pour définir l’aide publique à la communication privée suite à l’arrêté signé le 13 avril dernier par le ministre de la Communication, René Emmanuel Sadi.
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Cette aide était octroyée chaque année par l’Etat à tous les acteurs de la communication privée (médias audiovisuels, presse écrite et web, imprimeries, syndicats, associations professionnelles, etc.). Avec cet «appui institutionnel de l’Etat», les bénéficiaires désormais sont uniquement les entreprises de presse écrite «plus en butte à la précarité économique» selon le président du REPAC, François Mboke, ainsi que les médias en ligne.
Cet appui se fera notamment par l’octroi du matériel technique d’exploitation, l’appui financier à l’achat des intrants matériels essentiels à la production des contenus et à la distribution des journaux et une allocation financière pour la couverture d’événements nationaux et internationaux, précise l’arrêté ministériel.
Autres griefs avancés par les éditeurs de presse pour justifier leur action : «l’accumulation des arriérés de paiement des prestations dues à la presse par les organismes et administrations publics, l’amaigrissement croissant du portefeuille publicitaire, le non toilettage de la loi sur la communication sociale au Cameroun, les arrestations arbitraires des journalistes dans l’exercice de leur fonction et les peines privatives de libertés pour des faits de presse», entre autres.
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Ces derniers se disent cependant «ouverts à toute proposition venant principalement du gouvernement» pour la résolution de leurs problèmes. Dans un communiqué publié ce 3 mai 2020, le Syndicat national des journalistes du Cameroun (SNJC) déplore que la situation précaire des travailleurs des médias qui n’ont ni contrat, ni assurance sociale ni équipement de protection individuelle et accusent des retards de salaires, contraste avec le train de vie «extravagant et arrogant» de la majorité des patrons de presse.
Le SNJC appelle par ailleurs le chef de l’Etat, Paul Biya, à prendre des «mesures exceptionnelles» au profit des journalistes incarcérés et ceux contraints à l’exil dans le cadre de la crise anglophone qui secoue les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest depuis octobre 2016. Le Cameroun occupe le 134e rang (sur 180 pays) au classement mondial de la liberté de la presse 2020 établi par Reporters sans frontières (RSF), soit trois places de moins (131e) que l’année dernière.