"Le Cameroun de demain, qui se construit sous nos yeux, n'aura plus grand-chose à voir avec celui d'hier (...) C'est à la fois une chance et un défi. Saisissions cette chance et relevons ce défi", a déclaré samedi Paul Biya, dans un discours aux jeunes.
Au Cameroun en 2014, selon les dernières statistiques accessibles, 75% de la population avait moins de 25 ans et n'avait donc connu que Paul Biya comme président.
Biya, qui a intégré le palais présidentiel d'Etoudi en 1982, leur a demandé samedi d'exercer leur droit de vote aux prochaines élections, dont la présidentielle.
Lui ne s'est pas encore prononcé sur sa candidature à un éventuel septième mandat. Ses soutiens le présentent comme leur candidat naturel, tandis que ses détracteurs voient en son âge un motif suffisant pour essayer de briguer sa succession.
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Si plusieurs candidats sont d'ores et déjà déclarés, le camp présidentiel a su contenir au fil des ans les voix discordantes: "M. Biya a mis en pratique l'adage +diviser pour mieux régner+ et rester ainsi au sommet d'un système sans que puissent s'organiser - et encore moins se coaliser - les forces qui auraient pu lui disputer son pouvoir", estime le chercheur Stéphane Akoa.
Biya a verrouillé l'accès aux postes et institutions clés, jusqu'à la récente création du Conseil constitutionnel, début février, composé de onze membres, tous issus du parti présidentiel, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc). Il doit notamment valider les résultats des élections.
Les présidents de l'Assemblée nationale - Djibril Cavaye Yeguié, 74 ans dont 26 à ce poste - et du Sénat - Marcel Niat Njifendi, 84 ans et premier président de l'institution créée en 2013 -, le chef d'état-major des armées - René Claude Meka, 79 ans dont 17 à ce poste - et le directeur de la société nationale d'hydrocarbures - Adolphe Moudiki, 79 ans dont 25 à ce poste -, sont tous des proches du chef de l'Etat.
Ancien séminariste catholique et étudiant à Sciences Po à Paris, Biya a "mis en place un dispositif autour de lui, qui fait que le système, c'est lui", note un observateur.
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Paul Biya, qui garde de fait un large contrôle sur un pays où plus d'un tiers des habitants vit avec moins dé 2 euros par jour est néanmoins souvent critiqué du Cameroun pour ses absences répétées, souvent de plusieurs semaines, principalement en Suisse.
Ces absences ont laissé planer au fil des ans des questions sur l'état de santé du président. Fin janvier encore, des rumeurs ont couru sur celui-ci, vite démontées par une apparition à la télévision d'Etat samedi.
Paul Biya aime garder le secret autour de lui et de son agenda politique, laissant à ses ministres le soin de communiquer. Si de l'avis de tous, il a le sens de la formule, ses apparitions sont aussi rares que scrutées.
Amateur de costumes en alpaga et autres cravates de soie, le "Sphinx" a dressé son bilan samedi: le groupe jihadiste Boko Haram a une capacité de nuisance "considérablement réduite", la situation de crise en régions anglophones "s'est apaisée" et l'économie s'est "embellie", selon lui.
Pourtant, les incursions jihadistes se poursuivent dans l'Extreme-Nord tandis que la situation sécuritaire dans l'ouest anglophone ne fait que s'aggraver. Dimanche, trois gendarmes y ont été tués, dans une crise qui s'est peu à peu muée en conflit de basse intensité.
L'armée - qui s'en défend - y est accusée par des témoignages d'habitants d'exactions, tandis que les attaques contre les symboles de l'Etat se multiplient par des hommes armés se réclamant de l'"Ambazonie", du nom de l'Etat indépendant qu'ils entendent créer.
"Avec les troubles en régions anglophones et la menace persistante de Boko Haram, les élections de 2018 vont être un défi plus important que les précédentes", estime Hans De Marie Heungoup, chercheur au centre d'analyse International Crisis Group (ICG).