Covid-19: comment l'île Maurice a endigué la progression du virus

Ile Maurice.

Ile Maurice. . DR

Le 18/08/2020 à 08h11, mis à jour le 18/08/2020 à 08h55

En avril dernier, l’île Maurice figurait parmi les pays les plus touchés par la pandémie du Covid-19 en Afrique. Depuis, les autorités ont pris des mesures qui ont porté leurs fruits. Maurice est aujourd'hui le pays le moins affecté du continent avec seulement deux cas actifs. Explications.

Début avril 2020, Maurice était le 12e pays le plus touché par la pandémie du Covid-19 en Afrique, et même le plus affecté proportionnellement à sa population de 1,27 million d’habitants. Dépendant fortement du tourisme, l'île craignait le pire au début de la crise sanitaire. 

Depuis trois mois, Maurice a réussi à stopper la propagation du virus. Le pays n’enregistre de nouveaux cas que de manière sporadique. En se donnant pour priorité à la santé de ses citoyens, l’Etat insulaire semble pour le moment en passe de réussir son pari.

En plus de l'imposition des distanciations sociales, du port de masque et de l’interdiction de rassemblement, Maurice, contrairement à d'autres pays africains, a suivi les suggestions de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en multipliant les tests Covid-19.

Le pays a réalisé, à la date d’aujourd’hui, un total de 221.234 tests de dépistage, ce qui signifie que 17,42% de sa population a été testée. A titre de comparaison, les deux pays qui ont réalisé le plus de tests Covid-19 en Afrique, à savoir l’Afrique du Sud et le Maroc, ont réalisé respectivement 3,40 et 1,60 million de tests. Toutefois, rapportés à leurs populations, ces chiffres représentent 5,66% de la population sud-africaine et 4,32% de celle du Maroc.

Grâce à ces tests, les autorités mauriciennes ont réussi à isoler les cas positifs et leurs contacts et à briser la chaîne de contagion.

Depuis mi-avril, les cas sporadiques enregistrés viennent essentiellement des ressortissants mauriciens rentrés au pays et placés en quatorzaine.

A la date du 17 août, le pays compte 346 cas confirmés, dont 334 rétablissements (soit taux de guérison de 96,53%) et 10 décès pour un taux de létalité de 2,89%. Partant, le pays ne compte plus que 2 cas de Covid-19 actifs (cas importés). C’est dire que le pays a réussi à enrayer l’expansion de la pandémie.

Grâce aux tests pratiqués à grande échelle, les porteurs du virus ont été rapidement identifiés, généralement avant que les symptômes de la maladie n’apparaissent. Les traitements administrés très tôt ont limité l’aggravation des cas et réduit par la même occasion le taux de létalité. Depuis le 27 avril dernier, aucun décès n’a été enregistré dans le pays.

Ceci fait de Maurice un modèle en matière de gestion de la pandémie en Afrique.

Si le cas mauricien est salué, il faut aussi souligner que le pays bénéficie d’un certain nombre de facteurs favorables à la mise en place de sa stratégie. Le fait que Maurice soit un Etat insulaire a favorisé sa protection naturelle. Le pays le plus proche de Maurice est Madagascar situé à plus de 1.000 km de distance.

Toutefois, cela n’enlève en rien le succès de la stratégie mise en place par les autorités mauriciennes qui ont permis le déconfinement depuis le 15 juin. Le Cap Vert et Sao Tomé & Principe, qui sont aussi des îles, ont encore du mal à stopper la pandémie sur leur territoire. Le Cap Vert compte plus de 3.180 cas pour moins de 600.000 habitants et Sao Tomé & Principe avec un peu plus de 115.000 habitants enregistre plus de 885 cas.

Autre facteur favorable dans le cas de Maurice: sa faible population. Il faut y ajouter la bonne gouvernance des dirigeants et la discipline des Mauriciens qui respectent les mesures sanitaires édictées par les autorités, ce qui est loin d’être le cas dans de nombreux pays africains.

Enfin, les autorités ont privilégié la santé de la population au détriment de l’économie. C’est pourquoi le pays a pris très au sérieux le confinement de la population et a fermé ses frontières pour éliminer les contagions importées, mais sacrifié du même coup le secteur stratégique du tourisme qui représente 23% du produit intérieur brut, en comptant les activités indirectes.

Malgré la maîtrise de la pandémie, les autorités mauriciennes ont décidé de maintenir les frontières du pays fermées pour éviter une nouvelle vague de contagion. A ce titre, le cas tunisien montre clairement que Maurice a raison. Depuis l’ouverture de ses frontières le 27 juin dernier, la Tunisie, qui était considérée également comme un modèle dans la lutte contre la pandémie, a vu le nombre de nouveaux cas croître de manière sensible et presque doubler par rapport à la période d’avant confinement pour atteindre 2.107 cas à la date du 16 août.

Le Premier ministre mauricien Pravind Jugnauth a été ferme face aux opérateurs et aux travailleurs en déclarant: «la santé publique avant tout». En contrepartie, l’Etat mauricien assure une allocation mensuelle à l’ensemble des salariés affectés. De quoi atténuer les mécontentements.

Conséquence, la seconde vague de la pandémie du Covid-19 qui a suivi les processus de déconfinement enclenchés partout en Afrique et les ouvertures des frontières a épargné Maurice, malgré le retour des ressortissants au pays.

Par Moussa Diop
Le 18/08/2020 à 08h11, mis à jour le 18/08/2020 à 08h55