Libye: une influente avocate qui dénonçait la corruption de Saddam Haftar exécutée en pleine rue

Hanane al-Barassi a été abattue en pleine rue à Benghazi.

Hanane al-Barassi a été abattue en pleine rue à Benghazi.. DR

Le 11/11/2020 à 08h16, mis à jour le 11/11/2020 à 08h18

L'avocate libyenne Hanane al-Barassi a été abattue dans sa voiture mardi en pleine rue à Benghazi, a-t-on appris auprès d'une source sécuritaire dans l'Est de la Libye, un meurtre qui a suscité une grande émotion dans le pays.

Figure médiatique en Libye, Mme Barassi, 46 ans, donnait constamment la parole à des femmes victimes de violences, dans des vidéos qu'elle diffusait ensuite sur les réseaux sociaux. Elle dirigeait aussi une association locale défendant les droits des femmes.

"Hanane al-Barassi a été tuée par balles dans la Rue 20, l'une des plus grandes artères commerçantes de Benghazi", a dit à l'AFP la source sécuritaire, qui a requis l'anonymat.

"Quelques minutes auparavant, elle diffusait une vidéo en live sur Facebook", selon la même source.

Dans cette séquence, l'avocate issue d'une tribu influente de l'Est libyen critiquait, assise dans une voiture face caméra, des groupes armés proches de Khalifa Haftar, l'homme fort de l'Est, se disant "menacée".

Amnesty International a dénoncé l'assassinat de celle qui a "critiqué la corruption de plusieurs individus affiliés aux groupes armés dans l'est de la Libye".

"La veille de sa mort, Hanane a déclaré sur les réseaux sociaux qu'elle allait publier une vidéo exposant la corruption du fils du dirigeant de la LAAF (+armée nationale libyenne+, autoproclamée par Haftar, ndlr), Saddam Haftar", selon Amnesty.

"L'assassinat de Hanane met en évidence la menace qui pèse sur la vie des femmes qui s'expriment sur les questions politiques en Libye", a estimé l'ONG.

Les autorités de l'Est n'ont pas réagi.

Cette affaire intervient près d'un an et demi après la disparition de la parlementaire Siham Sergewa, enlevée par un groupe armé à Benghazi, après avoir critiqué l'offensive lancée par Haftar sur Tripoli. Elle n'est jamais réapparue.

L'assassinat de Hanane al-Barassi suscite une grande émotion dans le pays. C'est une nouvelle "effrayante et épouvantable et un rappel douloureux de la réalité sur le terrain, en particulier pour les femmes", a fustigé sur Twitter une autre avocate libyenne, Elham Saudi, elle aussi connue pour son engagement associatif.

Cela "rappelle d'autres crimes pour lesquels personne n'a été puni", a commenté Hanan Salah, chercheuse à l'ONG Human Rights Watch (HRW).

La Libye a sombré dans le chaos après la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011, déchirée entre le Gouvernement d'union nationale (GNA) basé dans l'Ouest à Tripoli, reconnu par l'ONU, et un pouvoir incarné par Khalifa Haftar.

Après l'échec de l'offensive du maréchal en avril 2019 pour s'emparer de la capitale, les combats ont cessé en juin 2020.

Un cessez-le-feu permanent a été conclu en octobre. Des représentants libyens de tous bords ont débuté lundi des pourparlers directs en Tunisie, sous l'égide de l'ONU, pour trouver un règlement politique au conflit.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 11/11/2020 à 08h16, mis à jour le 11/11/2020 à 08h18