Il avait précisé que ce forum aurait lieu dans un délai bref six mois plus tard, après que son pouvoir eut été définitivement sauvé d'une vaste offensive rebelle grâce à l'intervention de centaines de paramilitaires russes, des "mercenaires" de la société privée de sécurité Wagner selon l'ONU.
Mais l'ouverture de ce dialogue incluant aussi la société civile, et dont Bangui a toujours dit exclure les groupes armés, a été mainte fois repoussé depuis.
"Le Dialogue Républicain est convoqué du lundi 21 au dimanche 27 mars 2022 à Bangui", précise un décret signé mardi par Touadéra.
Sept jours, une durée relativement courte pour une réunion, à l'Assemblée nationale, de "plus de 450 participants issus des forces vives de la Nation, opposition et société civile", selon le porte-parole de la présidence Albert Yaloke Mokpeme. Elle portera "sur la paix et de la sécurité", a précisé ce dernier à l'AFP.
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Et dans un délai de convocation très court également: six jours après le décret présidentiel.
D'autant que des leaders de l'opposition ont assuré mardi soir à l'AFP qu'ils n'étaient pas au courant avant l'annonce du décret lu sur les ondes de la radio nationale, ni encore invités.
Durée et délai courts
"Nous voulions qu’il se déroule au mois d’avril, cela laissait plus de temps aux participants pour s’organiser", a déclaré à l'AFP le député Martin Ziguélé.
"C’est un peu précipité, nous avons des thèmes importants à aborder, je n’ai pas reçu d'invitation et, jusqu’à ce matin, ils composaient encore la liste des participants", a renchéri le député Anicet-Georges Dologuélé, ancien Premier ministre et fondateur de la COD-2020, la principale plate-forme de l'opposition.
Touadéra, au pouvoir depuis 2016, avait été réélu le 27 décembre 2020 avec 53,16% des suffrages mais seul un électeur inscrit sur deux avait eu la possibilité de se rendre aux urnes dans un pays occupé aux deux tiers par des groupes armés.
Et en pleine offensive d'une coalition de rebelles lancée à la veille du scrutin pour renverser Touadéra.
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Depuis lors, Bangui a repris le contrôle de la majorité du pays grâce à une offensive fulgurante menée par des centaines de paramilitaires russes, des instructeurs non armés selon Moscou, des "mercenaires" de Wagner selon l'ONU et la France, qui les accusent de crimes de guerre contre les civils, et d'avoir fait main basse sur les richesses du pays, notamment ses diamants et son or.
Le pouvoir n'a jamais dit clairement quels étaient les buts de ce Dialogue républicain au-delà de vagues promesses d'inclure davantage l'opposition et la société civile dans la gestion du pays, dominée largement, comme à l'Assemblée nationale, par le Mouvement Coeurs Unis (MCU) de Touadéra et des partis alliés ou satellites.
Crimes contre l'Humanité
"Les propositions qui émergeront de cette semaine de consultation, si elles sont retenues, se transformeront en feuille de route pour les différents ministères, décrets ou textes de loi", se contentait d'expliquer mardi soir Mokpeme, martelant: "L'objectif est un retour à la paix et la sécurité".
Cette annonce longtemps attendue survient au lendemain de celle de l'arrestation au Tchad voisin, et du transfèrement à la Cour Pénale Internationale (CPI) de La Haye, d'un chef de groupe armé, Maxime Mokom, accusé de crimes de guerre et contre l'Humanité. Transfèrement qui a réjoui le gouvernement de Touadéra, lequel avait pourtant fait de Mokom un de ses ministres en 2019 avant qu'il ne rejoigne la rébellion.
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Mokom, 43 ans, était le chef d'un groupe armé dit antibalaka, des milices d'autodéfense à dominante chrétienne et animiste, créées en 2013, au début de la guerre civile qui perdure aujourd'hui en Centrafrique, notamment par le président François Bozizé qui venait d'être victime d'un coup d'Etat mené par des groupes armés majoritairement musulmans alliés sous la bannière de la Séléka.
Des affrontements très meurtriers et des crimes et atrocités contre les civils ont atteint leur paroxysme entre 2013 et 2015, l'ONU accusant les deux camps de crimes de guerre et contre l'Humanité, avant de connaître une accalmie relative à partir de 2018.
"Les centrafricains la réclamaient de longue date, cela va dans le sens de la lutte contre l’impunité", a assuré le porte-parole de la présidence M. Mokpeme à l'AFP.