RD Congo: 4 évasions et plus de 5.000 prisonniers dans la nature

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Le 13/06/2017 à 13h11, mis à jour le 13/06/2017 à 17h53

Du 17 mai au 11 juin de cette année, les prisons congolaises ont fait preuve de négligence sur le plan sécuritaire. En ce court laps de temps, quatre évasions ont été enregistrées permettant à plus de 5.000 prisonniers de s'évader. Les explications.

Quatre importantes évasions ont eu lieu en République démocratique du Congo, dans une période trouble caractérisée par une sérieuse crise politique, due à la tension électorale.

Le 17 mai, pendant que les Congolais commémoraient le 20e anniversaire de la libération de la RDC par l'AFDL, des personnes non identifiées ont attaqué la prison centrale de Makala. Bilan: plus de 4.000 prisonniers se sont évadés, le bâtiment administratif a brûlé, des véhicules ont été incendiés et on déplore des pertes en vies humaines.

Le 20 mai, soit trois jours plus tard, 90 détenus s'évadent de la prison de Kasangulu. 

Comme si cela ne suffisait pas, samedi 10 juin, le Parquet de Matete a été pris pour cible, victime du même type d'attaque que la prison centrale de Makala. Là encore, le bâtiment administratif a été brûlé, des véhicules incendiés, des prisonniers se sont évadés et il y a des pertes en vies humaines.

Dimanche 11 juin, vers 15h00, c'est la prison de Kangbayi à Beni qui subit le même traitement : 932 prisonniers ont quitté leurs cellules.

Des voix s'élèvent déjà, surtout du côté du Rassemblement, pour demander le départ du ministre de la Justice, Alexis Thambwe Mwamba, patron du secteur.

Après, Georges Kapiamba, le président de l'ACAJ, qui a exigé la démission du patron de la justice pour son incapacité à maitriser les détenus dans les prisons de la République Démocratique du Congo, un député originaire de la province du Nord-Kivu, Kiro vient de demander l'interpellation d'Alexis Thambwe Mwamba à l'Assemblée nationale.

Il a promis de transformer son interpellation en une motion de défiance pour éjecter Alexis Thambwe Mwamba de sa chaise de ministre d'État en charge de la Justice et garde des Sceaux.

Kiro lui reproche de n'avoir pas pris les mesures idoines après l'attaque de Makala afin d'éviter ce qui s'est passé à la prison de Beni.

Le président du Centre d’études pour la promotion de la paix, la démocratie et les droits de l’homme (CEPADHO) Omar Kavota accuse la rébellion ougandaise des Forces démocratiques alliées (ADF) d’être à l'origine de l’attaque contre la prison de Beni survenue le dimanche 11 juin 2017. Omar Kavota souligne que le mode opératoire de cet assaut tend à prouver que ce sont bien les ADF qui en sont les auteurs.

«Les assaillants n’avaient qu'un objectif. C’est depuis le 20 août 2016 que le procès sur les ADF est en cours à Beni. Nombre d’entre eux ont été condamnés. D’autres étaient attendus lors des audiences de la Cour opérationnelle de Nord-Kivu. Ce sont des ADF qui ont attaqué la prison. Parce qu’avant de libérer les détenus, ils ont commencé à appeler des noms inscrits sur une liste», a expliqué le président de CEPADHO.

Cet activiste propose d’ériger un camp militaire aux environs de la prison. Il souhaite que les évadés soient retrouvés avec un renfort de Kinshasa et transférés dans des prisons de haute sécurité comme Angenga.

Le ministre de la Justice, Alexis Thambwe Mwamba, révèle ce vendredi 19 mai que le nombre de prisonniers s’élevait à 8.210 avant l’évasion massive, mercredi dernier, consécutive à l’attaque attribuée par les autorités aux adeptes du mouvement politico-religieux Bundu Dia Mayala.

Thambwe Mwamba l’a dit à l’Assemblée nationale où il se trouve actuellement pour s’expliquer sur cette évasion.

"A la veille de l’évasion , il y avait 8.210 prisonniers à Makala. Les gens qui sont dehors sont très dangereux. Nous reconnaissons le haut degré de dangerosité de certains des évadés. Il y a eu complicité à l’intérieur comme à l’extérieur et au sein même des agents commis à la garde de la prison", a-t-il déclaré.

Le ministre de la Justice a, par ailleurs, refusé de donner le nombre exact de prisonniers évadés. Mais il a indiqué que le "nombre le plus important est celui des hommes en prison et non celui de ceux qui sont en cavale".

Selon un document administratif de la prison centrale de Makala parvenu à actualité.cd, environ 4.191 détenus se seraient évadés de la prison.

Le ministre de la Justice, Alexis Thambwe Mwamba, a annoncé, ce vendredi 19 mai 2017, devant l'Assemblée nationale que des sanctions vont être prises à tous les niveaux de responsabilité suite à l’attaque mercredi 17 mai de la prison centrale de Makala.

«Les arrêtés sont prêts, on ne va pas frapper du menu fretin, mais des personnes à haut niveau de responsabilité. Les têtes vont tomber», a affirmé Alexis Thambwe Mwamba.

Le ministre de la Justice a également appelé la population à la vigilance contre les évadés qui, selon lui, sont «dangereux».

«Je voudrais réellement signifier que les personnes en cavale sont d’un degré de dangerosité extrême, ils ne vont pas hésiter à tuer et violer. On a déployé des forces de sécurité partout dans la ville pour que la population n’ait pas peur. Nous avons à gérer une situation sécuritaire complexe».

Plusieurs députés nationaux ont déploré les conditions carcérales partout dans le pays. Les élus ont également désapprouvé la déclaration du ministre Thambwe Mwamba, lors de sa visite jeudi 18 mai dernier à la prison centrale de Makala. Il a traité «d’idiot» tout individu qui qualifierait l’attaque contre la prison centrale de Makala d’un montage du gouvernement.

Par Tshieke Bukasa (Kinshasa, correspondance)
Le 13/06/2017 à 13h11, mis à jour le 13/06/2017 à 17h53