"Comment briser les obstacles pour améliorer le commerce agricole régional en Afrique centrale?" Telle est la principale question à laquelle tente de répondre l’étude de la Banque mondiale (BM) présentée il y a quelques jours à Yaoundé, la capitale du Cameroun. Un rapport qui a identifié quelques goulots d’étranglements comme le manque d’organisation commerciale des producteurs, la mauvaise qualité des infrastructures de transport, le nombre élevé des intermédiaires, la volatilité des prix, les tracasseries administratives, etc.
L’étude analyse également l’impact des risques sécuritaires et des crises politiques qui modifient les courants et les flux commerciaux. Et ce, tout en aggravant les impacts subis par le commerce agricole dans la région, et en augmentant les pertes et les risques que les commerçants doivent prendre, ainsi que le développement de l’informel.
«Le conflit (avec Boko Haram, Ndlr) a graduellement perdu en intensité depuis 2014-2015, la violence et les attentats-suicides se sont poursuivis en 2017 et le niveau de menace reste élevé dans les régions de l’Extrême-Nord, du Nord et de l’Adamaoua. Sur le territoire camerounais et à la frontière, Boko Haram a réussi à perturber aussi bien les activités de production que le commerce.
Lire aussi : Nigeria: 36 orpailleurs abattus par des voleurs de bétail présumés
Le groupe s’est mis à financer ses activités en accordant des prêts aux commerçants, exigeant un pourcentage de leurs bénéfices en retour», révèle notamment l’étude.
Par ailleurs, dans les départements du Mayo-Sava et du Mayo-Tsanaga, des centaines d’enlèvements ont été signalés, le groupe ayant kidnappé des personnes pour les réduire au travail agricole forcé, pour ensuite vendre la récolte sur les marchés camerounais et nigérians.
«Les ventes de bétail volé sur les marchés du Nigeria et du Cameroun sont une autre source de revenus pour Boko Haram. D’après les estimations, depuis 2013, le groupe a volé au moins 17.000 têtes de bovins et des milliers d’ovins et de caprins au Cameroun, pour une valeur d’environ 6 millions de dollars (environ 3 milliards de francs CFA)», indique l’étude de la Banque Mondiale.
Lire aussi : Cameroun. Crise anglophone: la détention d’armes à feu interdite dans le nord-ouest
Conséquence, entre autres, les commerçants ou les éleveurs se rendant au Nigeria ont dû payer pour la sécurité de leur passage. Le transit de bovins à destination du Nigeria passant par la ville camerounaise de Yagoua (Extrême-Nord) est passé de 53.662 animaux en 2015 à environ 33.000 animaux en 2016 et 2017 (une réduction de 39%).
Le transit d’ovins est également passé de 2.482 animaux en 2015 à 1.373 en 2016, avant de remonter légèrement à 1.944. En gros, le commerce dans le nord du Cameroun et dans le bassin du lac Tchad a considérablement diminué et les réseaux commerciaux locaux ont dû trouver d’autres sources de revenus ou réorienter leurs activités vers d’autres régions du Cameroun.
«Dans les parties nord du Cameroun, la situation sécuritaire induite par Boko Haram a réduit les flux commerciaux entre le Cameroun et le Nigeria, ainsi que le transport de bétail du Tchad vers le Nigeria. De plus, le corridor Douala-N’Djamena a également été perturbé à cause du risque d’attaques sur le dernier tronçon (Mora-Kousséri). Le nombre d’incidents transfrontaliers de vol de bétail au Cameroun a également augmenté tant du côté nigérian que du côté tchadien, limitant les transactions transfrontalières habituelles et faisant momentanément fluctuer les prix du bétail», peut-on également lire dans ce rapport.