Le ministre de la Santé publique, Manaouda Malachie, veut prendre le taureau par les cornes et en finir avec le phénomène des "médicaments de la rue" au Cameroun.
Cette semaine, le responsable gouvernemental s'est personnellement rendu dans certains points de vente illicite à Yaoundé, la capitale, afin de discuter avec ces commerçants informels.
Il s'agissait là d'une démarche de sensibilisation en prélude d'une campagne de répression, leur a-t-il fait savoir, aussi pédagogiquement que fermement.
«La loi N°90/035 du 10 août 1990 en son article 53 stipule que tout délit, étalage ou distribution de médicaments est interdit sur la voie publique, dans les foires et marchés à toute personne même titulaire du diplôme de pharmacien», a-t-il notamment déclaré.
Par conséquent, Manaouda Malachie tient à attirer l’attention de ceux qui exercent cette activité illégale à travers des étals, des kiosques, des pro-pharmacies ou même des magasins de stockages illégaux, qu’ils sont passibles de poursuites judiciaires, conformément à la législation en vigueur, a-t-il indiqué, dans un communiqué publié juste avant la mise en place de cette campagne de sensibilisation.
Lire aussi : Faux médicaments: ces «remèdes» qui font mal à l’Afrique
Par ailleurs, le ministre annonce l’opérationnalisation, aussi bien au niveau central que de chaque région, d’une Brigade chargée spécialement de sillonner les villes et localités du pays, en vue de procéder, avec l’appui d’autres administrations concernées, à la saisie et destruction systématique de ces médicaments et produits.
Faux médicaments
Une campagne donc pour lutter contre ce phénomène tenace. Une de plus. Sera-t-elle plus efficace que les précédentes opérations coups de poing? Difficile de le dire, car faute notamment de ressources humaines et financières pour mener cette lutte et de communication suffisante, il faut avouer que les vendeurs de rue de médicaments n'ont pas été, jusqu'ici, véritablement inquiétés par les pouvoirs publiques.
Pourtant, les dangers encourus par les populations victimes de ce phénomène répréhensible, et les conséquences néfastes des médicaments de la rue sur la santé ainsi que sur l’économie camerounaise, sont évidentes.
Lire aussi : Cameroun: le décès d’une fillette de 8 mois relance le problème de trafic de médicaments
Selon une étude de l’Ordre national des pharmaciens du Cameroun (ONPC), les médicaments de rue regroupent les produits contrefaits, des faux médicaments et des médicaments à l’origine de bonne fabrication mais sortis du circuit normal de distribution.
Aussi, les complicités de certains distributeurs de médicaments avec ces réseaux illicites sont-elles évidentes. Selon l’ONPC, «de nombreux personnels relevant du domaine de la santé, aussi bien des pharmaciens, des délégués médicaux, des médecins prescripteurs, de laboratoires et des sociétés chargées de la distribution des médicaments ont une responsabilité dans ce commerce illicite».
Par ailleurs, le recours à ces pseudos-médecins de rue, sans formation, est également fortement ancré dans les habitudes de nombre de consommateurs, pouvoir d'achat oblige, les pharmacies classiques étant considérées comme trop onéreuses, surtout que les "vendeurs de rue" ont entre-temps élargi leurs palettes de produits.
Lire aussi : Cameroun: l'Etat va fabriquer localement tous ses médicaments essentiels
Parmi les médicaments contrefaits les plus vendus figurent notamment les antipaludiques, les anti-inflammatoires, les analgésiques, les antibiotiques et les vitamines.
«Ce circuit illicite représente un peu plus de 25% du marché du médicament national, alors que 40% des "médicaments de la rue" proviennent de la contrebande», selon l'ordre des pharmaciens camerounais.