Cameroun: le Tramadol, cet antalgique devenu un fléau pour la jeunesse

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Le 09/02/2020 à 15h43, mis à jour le 09/02/2020 à 15h47

Ce médicament aux propriétés antalgiques a été détourné de son usage. Désormais utilisé comme drogue, l'addiction et les dangers de la consommation de comprimés de Tramadol sans qu'il n'aient été préalablement prescrits pose des problèmes de santé, surtout auprès des jeunes Camerounais.

Ces simples comprimés blancs sont en train de devenir la terreur des chefs d’établissements scolaires au Cameroun.

Le Tramadol, également appelé Tramol, est un antalgique, qui agit à la fois comme un opioïde et un antidépresseur.

Cependant, son usage est actuellement détourné par de jeunes consommateurs de drogues, qui l’utilisent comme stupéfiant.

Le médicament procurerait à ses consommateurs un sentiment d'euphorie et une désinhibition, mais selon sources médicales, il présente un risque accru d’addiction.

Son prix très abordable - il ne coûte parfois que 100 francs CFA- en fait un produit à la portée des jeunes. Les milieux scolaires sont d'ailleurs l’un des lieux de distributions privilégiés des dealers et des trafiquants, aussi, dans les lycées et collèges, les responsables administratifs organisent désormais des fouilles régulières et inopinées pour tenter de débusquer ces comprimés.

Globalement, la consommation détournée du Tramadol ne cesse d'augmenter. Selon les forces de l’ordre, il n’est pas rare que des brigands ou des violeurs avouent en avoir consommé au moment de commettre leur crime. Les enfants abandonnés dans les rues de Yaoundé en sont également des consommateurs.

Dans son rapport pour l'année 2019, la douane camerounaise a révélé avoir saisi 624.520 comprimés de Tramadol dans le cadre d'une opération nommée «Halte au commerce illicite» (Halcomi), qui vise à protéger l’espace commercial local des produits de contrebande.

Par ailleurs, selon le Comité national de lutte contre la drogue, le Tramadol est la deuxième substance primaire la plus demandée (à raison de 44,62%) par les jeunes drogués âgés de 20 à 25 ans, juste après le cannabis (58,54%). Cette consommation commence d'ailleurs à poser de vrais problèmes de santé publique.

Contrebande

Face à ces chiffres alarmants, au détounement de son usage et aux dangers liés à une consommation de Tramadol sans qu'il n'ait été préalablement prescrit, le ministère de la Santé publique a placé ce médicament «sous contrôle» au Cameroun.

«A cet effet, l’importation du Tramadol est désormais subordonnée par l’obtention d’une autorisation d’importation (AOI) délivrée par le ministre de la Santé publique. Toute structure importatrice devra adresser trimestriellement les statistiques des importations, des exportations et des consommations du Tramadol. La consolidation de ces statistiques au niveau national permettra au Cameroun de communiquer des données trimestrielles à l’Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS)», indique une circulaire de la ministre de la Santé, Manaouda Malachie, en date du 2 décembre 2019.

Mais ce médicament continue cependant à être vendu frauduleusement, et la lutte ne fait que commencer. Vendu à la sauvette dans les rues, issu de réseaux de contrebande, il est encore plus dangereux, car mal conservé et mal conditionné. Son principe actif peut donc être altéré et mener ses consommateurs à ressentir des effets secondaires mettant directement leur santé en danger. 

Au ministère des Enseignements secondaires, l’année scolaire 2019/2020 a été placée sous le mot d'ordre suivant: «Ecole propre, gage de réussite scolaire et de meilleures perspectives professionnelles».

La lutte contre la violence et l'usage des drogues en milieu scolaire fait tout particulièrement partie des actions prioritaires mises en oeuvre cette année.

«Tournez le dos à tout ce qui peut vous détourner de vos études, à l’instar de la consommation de la drogue et d’autres stupéfiants», a ainsi exhorté la ministre, Pauline Nalova Lyonga, dans son message aux élèves du Cameroun. 

Par Patricia Ngo Ngouem (Yaounde, correspondance)
Le 09/02/2020 à 15h43, mis à jour le 09/02/2020 à 15h47