Niger: l'adéquation formation-emploi pour éviter de produire de futurs chômeurs

VidéoPlusieurs milliers de jeunes sortent chaque année des écoles et instituts de formation du Niger. Même si une partie arrive à s'insérer dans le tissu économique, une autre peine encore à trouver un emploi du fait souvent de la non-actualisation de certaines filières de formation.

Le 20/08/2022 à 10h47

«Ce que les étudiants ou les nouveaux bacheliers n’ont pas compris, c'est que pour se former dans un domaine, il ne suffit plus seulement de le faire pour aller travailler pour quelqu’un. Il faut être capable de créer une entreprise. Beaucoup devraient prendre cela en compte car le plein emploi est saturé», explique Diataga Abdoulkarim, étudiant en master.

Chaque année, après les résultats du Baccalauréat, le choix des filières de formation pour les études supérieures constitue souvent un casse-tête et une préoccupation centrale des étudiants, et souvent des parents. Dans les écoles, universités et instituts de formation au Niger, les filières les plus sollicitées concernent les domaines du marketing, de la communication, du droit, des sciences sociales ou de la finance. Au total, une centaine de filières sont recensées dans le pays.

Pour faciliter l’accès à l’information mais également l’orientation des bacheliers, des forums sont souvent organisés, regroupant écoles de formation, entreprises, ministère de l’enseignement, étudiants et parents d'élèves.

Mamane Bachir, organisateur d'un salon de l’orientation, nous en parle: «Le problème est que vous avez des étudiants qui, après avoir embrassé une filière, se demandent ce qu’ils vont faire. En quelque sorte, ils laissent libre cours à la nature de leur donner une destination. Nous avons donc créé un événement qui rassemble l’essentiel de l’offre en matière d'éducation et de formation, ainsi que les consommateurs, c’est-à-dire les étudiants, les parents d'élèves qui payent les études et les entreprises qui recrutent ces étudiants une fois la formation achevée.» 

Son avis est partagé par Aliou Mahamadou Ali, nouveau bachelier: «Je suis venu suivre cette conférence pour que cela m’aide à faire le choix d’une filière dans une école de formation ou même à l’université».

Au Niger, l'Etat définit et oriente les politiques de formation, en plus de s'assurer que les formations et filières disponibles correspondent à la demande et au besoin sur le marché de l’emploi. «Nous sommes dans le cadre du système LMD, où la formation doit être adéquate à la demande du marché. Donc une filière peut être enseignée cette année et s’il n'y a plus de demande sur le marché, on peut la supprimer ou la remplacer par une filière dont la demande est forte», explique Pr Hamidou Moussa, directeur des enseignements au ministère de l’Enseignement supérieur.

Mais que valent réellement certaines filières? Répondent-elles concrètement aux besoins des entreprises? Pour Salif Mayaki, directeur général d’une agence de publicité, plusieurs métiers de la communication ne sont pas encore enseignés dans les écoles du Niger, ce qui constitue un handicap dans la recherche de certains profils. «90% des demandes de stage que nous recevons concernent le domaine de la communication des entreprises. Pour moi, je considère que cette filière n’est plus en phase avec les réalités actuelles. En agence de communication, nous avons besoin des directeurs artistiques, de concepteurs-rédacteurs, de media planners, etc., et c’est difficile d’en trouver localement», déplore-t-il.

Néanmoins, plusieurs écoles de formation au Niger ont déjà pris les devants en intégrant certains métiers d’avenir, notamment dans le numérique ou l’agriculture, dans leurs différentes filières de formation. «La technologie, l'agroalimentaire, ce sont des filières très porteuses mais jusqu'à présent les jeunes ne l'ont pas encore compris du fait peut-être que le pays ne dispose pas d’assez d’industries. Mais nous nous efforçons de valoriser ces filières», explique Inoussa Mahamane, formateur dans une école professionnelle.

«Vous avez aussi un nombre élevé de diplômés chômeurs. La plus grande partie de l’offre proposée par le secteur public ne répond pas à la demande des entreprises privées. Donc il est important que les métiers d’avenir qui sont liés à la digitalisation, à la numérisation, puissent être vulgarisés», renchérit Mamane Bachir.

Par Aboubacar Sarki (Niamey, correspondance)
Le 20/08/2022 à 10h47