L’électricité demeure rare en Afrique de l’ouest. Au niveau de l’espace CEDEAO -Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest-, un seul pays affiche un taux d’électrification dépassant les 80%, le Cap Vert. Pour tous les autres, celui-ci se situe dans une fourchette comprise entre 15 et 65%. Et en moyenne, le taux d’électrification au niveau de la région avoisine les 40%.
Le taux le plus élevé est celui du Cap-Vert avec plus de 80% de la population ayant accès à l’électricité, devant le Ghana (65%), le Sénégal (56%), la Côte d’Ivoire (55%), etc. Les autres pays dont le Nigeria (35%) ont des taux d’électrification faible. Une situation qui contribue à maintenir la région ouest-africaine dans un cercle vicieux de pauvreté, d’instabilité et de sous-développement.
Audelà, la production d’électricité est très inégalement répartie au niveau de la région.
Pour réguler cette situation, la CEDEAO a lancé, en fin de semaine dernière, le marché régional de l’électricité de l’Afrique de l’ouest. La cérémonie, présidée par Abdoulaye Bio Tchané, ministre béninois du Plan et du développement, a été marquée par la présence de 13 autres ministres en charge de l’énergie au niveau de la région.
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Selon le ministre béninois de l’Energie, «la mise en place du marché régional de l’électricité est nécessaire pour résoudre le problème de la répartition des ressources énergétiques entre les pays et pour combler le fossé entre l’offre et la demande d’électricité».
L’objectif de ce marché est de pallier le déficit d’approvisionnement en quantité et en qualité d’électricité au niveau de la région. Une situation qui handicape le développement économique au sein de la CEDEAO.
Il est attendu à ce que ce marché régional d’électricité puisse permettre aux Etats de la région de bénéficier d’un approvisionnement électrique régulier, fiable et à un coût compétitif.
Seulement, s'il est évidemment utile de créer un marché régional de l’électricité, il est surtout primordial d’investir dans la production d’électricité au niveau de la région. Car les pays de la région accusent un déficit de production d’électricité énorme. L’exemple type de ce déficit est illustré par le Nigéria. La première puissance économique du continent, avec ses 190 millions d’habitants et qui pèse plus de 70% du PIB de la CEDEAO, ne dispose que d’une capacité de production installée autour de 10.000 MW. A titre de comparaison, l’Afrique du Sud, trois fois moins peuplée, produit 45.000 MW. En plus, sur la capacité dont dispose le Nigeria, constituée essentiellement de centrales thermiques au gaz, les défaillances font que la capacité de production réelle oscille entre 4.000 et 7.000 MW.
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C’est dire que le marché régional ne va pas résoudre grand-chose au niveau de l’amélioration du taux d’électrification si des efforts ne sont pas fournis en matière d’augmentation des capacités.
Pourtant, la région dispose d’un potentiel exceptionnel pour la production d’électricité. Elle compte de nombreux producteurs de pétrole dont le Nigéria (premier producteur africain), le Ghana, la Côte d’Ivoire et le Niger. Concernant le gaz, le Nigeria dispose également d’importantes réserves de gaz naturel.
Le Ghana et la Côte d’Ivoire possèdent plusieurs champs gaziers qui alimentent leur marché local. En plus, la mise en service depuis 2011 du gazoduc de l’Afrique de l’ouest, long de 678 km et censée alimenter le Bénin, le Togo et le Ghana depuis le Nigeria, devrait contribuer à développer la production d’électricité du continent. A cela il faut ajouter les importantes découvertes de gaz à la frontière mauritano-sénégalaise, estimées à 450 milliards de mètres cubes.
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En outre, au niveau des énergies renouvelables, le potentiel est exceptionnel. A ce titre, la CEDEAO met l’accent sur la production d’électricité via les énergies vertes. Dans ce cadre, le Centre pour les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique de la CEDEAO (CEREEC) veut produire 10.000 MW à l’horizon 2020 et faire passer la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique de la région de 12 à 35% en 2020 et 45% à l’horizon 2030.
La région a un potentiel hydroélectrique important qui dépasserait 25.000 MW dont presque le quart serait localisé en Guinée. Sur ce potentiel, à peine 20% sont aujourd’hui exploités. Le solaire constitue aussi une source important à même de fortement contribuer à la résorption du déficit en électricité du continent.
Toutefois, projets d’envergure, comme celui du programme solaire Noor au Maroc, n’a été développé au niveau de région.
Reste que rien au niveau des énergies renouvelables, il faudra 35 milliards de dollars d’investissement pour produire les 10.000 MW.
D'où la nécessité de mutualiser les investissements et d'initier des projets communs structurants pour la production d'électricité, à l'image des barrages hydroélctrique de l'OMVS -Organisation de la mise en valeur du fleuve Sénégal- regroupant 4 pays: Sénégal, Mali, Mauritanie et Guinée.
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Enfin, pour disposer d’un marché de l’électricité efficient, en plus de la production, il faut également développer des réseaux de distribution d’électricité. Or, à l’heure actuelle, il existe peu d’interconnexion électrique entre les pays entre les pays de la CEDEAO. Outre les investissements que nécessiteront la mise en place des lignes électriques, il faudra également investir dans l’harmonisation du voltage des réseaux de transmission.