Côte d'Ivoire: le marché des aphrodisiaques naturels connaît un franc succès

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Le 11/02/2017 à 10h36, mis à jour le 11/02/2017 à 12h05

«Attoté», «Petits colas», «Bazooka»… A Abidjan, les dénominations d’aphrodisiaques sont connues de tous les Ivoiriens. Ces derniers en raffolent pour aiguiser leur appétit sexuel.

Des communes d’Abobo (nord d’Abidjan) à Treichville (sud) en passant par Adjamé (centre) jusqu’à Yopougon (ouest), le marché à ciel ouvert des aphrodisiaques bat son plein. Et depuis deux ans, l’un de ces produits attire particulièrement les foules: c’est l’«Attoté». Présenté sous forme d’un liquide de couleur marron, dans une bouteille de 33 cl, ce produit, fabriqué dans le nord du pays par un guérisseur dont on vante des connaissances mystiques, a conquis les populations.

«Franchement, c’est très bon», réagit avec le sourire, Olivier Mahan, jeune entrepreneur de 36 ans. Quand j’en prends je me sens chaque fois léger et au lit je suis toujours très performant. Ce qui n’était pas le cas par le passé, où j’avais du mal à enchaîner deux rapports par nuit avec ma concubine.

Dans la capitale économique ivoirienne, Attoté (entre 1.000 et 2.000 FCFA, soit 1,5 et 3 euros, la bouteille) ne se vend plus seulement sur les marchés. Car certains en ont fait un véritable commerce, ouvrant au passage des magasins dédiés à cet aphrodisiaque. «Le produit marche très fort. Chaque jour, je peux en vendre dix bouteilles. Les clients sont exigeants, ils veulent surtout les commandes qui arrivent fraîchement de Korhogo (nord du pays)», relève Mamadou Sékongo, commerçant d’Attoté à Abobo.

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Les vertus de ce produit, selon Sékongo, originaire de Ferké (nord), agissent particulièrement contre les hémorroïdes et la fatigue générale. «Pour avoir déjà testé le produit, je peux témoigner de son efficacité. Seulement, il est arrivé un moment où certains individus fabriquent du faux. Ce qui fait que certains en doutent. Il faut donc savoir distinguer le faux du vrai», confie Fabrice Koné, gérant de cabine et vendeur d’Attoté pour arrondir ses recettes de la journée.

«Ce médicament est fait à base de plantes naturelles. Il existe depuis les temps anciens dans mon village. Mes parents le mettaient dans des canaris [jarres en argiles, ndlr] pour guérir les patients et j’ai décidé de le moderniser en le conservant dans de petites bouteilles et des bidons d’un litre», avait confié à la presse en 2016, le tradi-praticien Ouattara Djakaridja, concepteur de l’Attoté.

L’autre produit prisé est le «petit cola» une sorte d’amande à la couleur jaunâtre et goût amer proposé aux grands carrefours de Yopougon et Abobo. Cet autre énergisant est vendu comme de petits pains aux «connaisseurs». Est-ce que ça marche? «Il faut en consommer toute la journée pour en voir l’effet en pleine nuit. Les jeunes n’aiment pas trop çà pour cette raison, ils aiment ce qui est immédiat», explique Amara qui vend les amandes au carrefour de Siporex, dans la commune de Yopougon.

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Mais, à côté de ces stimulants, certains hommes ont recours au «Bazooka», un nom générique utilisé pour désigner des pommades destinées à grossir les attributs masculins. Ici, on part du produit naturel fait, dit-on, à base de bouse d’âne au produit de type asiatique, indien ou chinois. Là encore, si certains estiment que les effets sont probants, d’autres crient à l’arnaque. «Il est scientifiquement impossible d’élargir le sexe d’un adulte», soutient Yao Martial, médecin.

Que pensent les femmes sur la question? «Attoté, c’est un médicament dont l’efficacité est vérifiée, et je ne vois pas pourquoi un homme doit s’empêcher d’en prendre», répond Odette Akissi, ménagère. Mais Fatim Traoré, fonctionnaire, n’est pas de cet avis. «Consommer de tels produits fait souffrir la partenaire au lit. Je ne vois pas ce qu’il y a d’intéressant là-dedans. Je crois que le gouvernement doit interdire ces choses qui peuvent détruire l’organisme humain», avance-t-elle.

En effet, ces aphrodisiaques ne sont pas sans conséquences pour les consommateurs, même si certains avancent qu’ils ne provoquent aucun effet secondaire. Dans sa dernière parution, l’hebdomadaire ivoirien Allô police» a rapporté le témoignage d’un jeune homme qui a perdu sa virilité après un usage régulier d’aphrodisiaques de toutes sortes, allant des produits naturels aux produits chimiques. Une quête de performance qui fait des victimes silencieuses, d’où un succès qui ne tarit pas.

Par Georges Moihet (Abidjan, correspondance)
Le 11/02/2017 à 10h36, mis à jour le 11/02/2017 à 12h05