Côte d’Ivoire. Rébellion du Nord: 16 ans après, que sont devenues les grandes figures des Forces nouvelles?

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Le 23/09/2018 à 10h19, mis à jour le 23/09/2018 à 10h46

Le 19 septembre 2002, un groupe d’insurgés lançait la première rébellion en terre ivoirienne pour tenter de déloger Laurent Gbagbo. 16 ans après, ses grandes figures, civiles ou militaires, ont connu des fortunes diverses. Retour sur les trajectoires divergentes des chefs de la rébellion du Nord.

Ils ont dirigé de main de fer une réebellion armée qui a fini (indirectement) par avoir la tête de Laurent Gbagbo. Mais les grosses figures des Forces nouvelles sont loin d’être rentrées dans l’anonymat. Actifs dans les couloirs du pouvoir ivoirien pour les militaires, d’autres, les civils en disgrâce avec l’exécutif, se sont regroupés autour de Soro Guillaume dont ils continuent d’être de fidèles compagnons.

Guillaume Soro

Lors du déclenchement de la rébellion, il s’est imposé comme un chef charismatique. L’ex-secrétaire de la FESCI, le syndicat estudiantin où il s’est forgé, a été, à la fin de la rébellion, premier ministre, puis président de l’assemblée nationale. Il s’est montré discret ces derniers mois alors que les spéculations sur ses ambitions présidentielles vont bon train.

Affoussiata Bamba

Avocate, la porte-parole de la rébellion, est une femme de poigne. Elle a intégré le gouvernement ivoirien, au ministère de la Communication, en 2012. Elle est ensuite entrée en disgrâce suite à son échec à la députation de Cocody face à une certaine Yasmina Ouegnin. Elle avait annoncé sa victoire bien avant la fin du dépouillage des bulletins. Affoussiata Bamba est aujourd’hui dans le cercle proche de Guillaume Soro dont elle est une inconditionnelle.

Alain Lobognon

Dans les premières heures de la rébellion, Alain Lobognon avait pris le pseudonyme d’Adjudant Beugré. Membre du cabinet civil de Soro Guillaume, dont il est un intime, il fut nommé en 2011 ministre des Sports. C’est sous son administration que les Éléphants de Côte d’Ivoire remportèrent la coupe d’Afrique des Nations de football en 2015 avec un certain Hervé Renard.

Mais il fut éclaboussé par un scandale de détournement de la prime de l’équipe. Il a de tout temps nié toute implication dans cette affaire qu’il a présentée comme une manœuvre pour faire sortir les pro-Soro du gouvernement. Actuellement député de Fresco, ville balnéaire du sud ivoirien, il est également candidat à la mairie de cette ville. Il est aujourd’hui l’un des soutiens les plus actifs de Soro Guillaume

Sidiki Konaté

Il est l’un des bras droit de Soro Guillaume qu’il secondait quasiment dans la rébellion. Ministre, il fut débarqué avant de faire son retour lors du dernier remaniement ministériel en juin dernier. Un retour perçu par certaines langues comme un moyen d’éloigner ce pilier de l’entourage de Guillaume Soro.

Soumaïla Bakayako

Colonel dans l’armée ivoirienne, il vire à la rébellion dont il fut la plus prestigieuse ressource militaire. Il en devient le chef d’état-major. Après la crise postélectorale, il est nommé à la tête de l’armée ivoirienne et bénéficie de promotions successives. Général de brigade, général de division, puis général de corps d’armée, le plus haut grade dans l’armée ivoirienne. Il est admis à la retraite fin 2016 suite à des troubles dans l’armée. Il a été par la suite nommé en mars dernier à la tête du conseil d’administration de la SIR, société nationale de raffinage, l’une des plus importantes du pays.

Ibrahim Coulibaly dit IB

Ibrahim Coulibaly dit «IB» est l’un des membres fondateurs et chefs emblématiques de la rébellion. L’homme qui a revendiqué la paternité de la rébellion a été vite éclipsé par un Guillaume Soro avec qui il a eu maille à partir. Il avait ensuite disparu des radars suite à des affrontements entre factions rivales de la rébellion. A la suite de la crise électorale de 2010, il réapparaît cette fois à la tête du «commando invisible», un groupe armé qui harcela les forces armées ivoiriennes. A la reddition des forces restées fidèles à Gbagbo, il trouve la mort officiellement lors d’affrontements avec les forces pro-Ouattara auxquelles il aurait refusé de se soumettre.

Tuo Fozié

Il a été la toute première figure connue de la rébellion à se dévoiler en septembre 2002. Il a intégré l’administration préfectorale à la fin de la rébellion. Il a été récemment nommé préfet de région du département de Bouaké, la grande ville du centre ivoirien, l’ex-fief de la rébellion.

Chérif Ousmane

Transfuge de l’armée ivoirienne, il jouissait d’une grande réputation avant son entrée dans la rébellion. Considéré comme soldat émérite, il constitua la «Compagnie Guépard», la troupe d’élite de la rébellion. Il intégra après la rébellion la garde présidentielle, en charge de la sécurité du chef de l’Etat ivoirien. Lieutenant-colonel, il a été nommé en janvier 2017 à la tête du bataillon commando-parachutiste, un des corps d’élite de l’armée ivoirienne. 

Issiaka Ouattara dit Wattao

Personnage haut en couleur, il fut l’un des principaux chefs militaires de la rébellion. Personnage attaché au bling bling, il est réputé pour cumuler des voitures de luxe. Lieutenant-colonel, il est le commandant de la garde républicaine, unité en charge de la sécurité des institutions. Il a effectué plusieurs stages de formation dans les académies militaires du Maroc.

Hervé Touré Pelikan dit Vetcho

Ex-chef d’état-major particulier de Soro Guillaume, l’on garde de lui l’image du militaire à la barbe qui a capturé Laurent Gbagbo à son domicile. Egalement lieutenant-colonel, il a fait son entrée à l’ENA, l’Ecole nationale d’administration, d’où il devrait embraser une carrière de diplomate.

Koné Zakaria

Autre figure militaire de la rébellion, réputé être membre de la confrérie des Dozo (chasseurs traditionnels mystiques), il s'était brouillé avec les autres chefs militaires et Soro Guillaume durant la rébellion. Il avait dû se retrancher au Burkina. Il a ensuite fait son retour au sein des Forces nouvelles et a pris part à la chute de Laurent Gbagbo. Lieutenant-colonel, il dirige l’Unité de Commandement et de soutien de l’état-major ivoirien.

Par Georges Moihet (Abidjan, correspondance)
Le 23/09/2018 à 10h19, mis à jour le 23/09/2018 à 10h46