Guinée: le lafidi, ce plat qui unit les ethnies et veut séduire l’Unesco

Le lafidi que la Guinée souhaite inscrire au patrimoine immatériel de l'Unesco.

Le 19/02/2025 à 13h21

VidéoLa Guinée est déterminée à faire inscrire son plat traditionnel, le lafidi, au patrimoine immatériel de l’Unesco. Ce plat simple, à base de riz, se déguste à tout moment de la journée, particulièrement le matin. La promotion de ce plat, commun à toutes les régions du pays, revient à favoriser l’agriculture et la transformation locales: quand on mange du lafidi, on consomme 100% guinéen.

Pour les citoyens guinéens, la journée commence souvent par un plat de lafidi. Un petit détour dans un établissement scolaire montre qu’à la pause, tous les jours, les enseignants voient leurs élèves se précipiter vers la vendeuse de lafidi, attirés par cette spécialité populaire.

Samba Diallo, enseignant, rappelle que le terme de «lafidi, c’est une appellation maninka. Chez les Peuls, on parle de fouti, et chez les Soussou, c’est du malé khoulangni. Cette nourriture est en quelque sorte un patrimoine culturel guinéen, facile à préparer. Lorsque vous achetez un plat de lafidi à 5.000 francs guinéens, cela vous permet de tenir toute la journée

Et puis, M’mah lafidi, un nom désormais célèbre, incarne cette tradition. À 84 ans, elle se réveille chaque matin et après 54 ans de service, continue de vendre son lafidi, fidèle à sa passion et à son métier. «C’est devenu mon métier. Depuis le régime du président Ahmed Sékou Touré, je commercialise ce plat. Par jour, je pouvais cuisiner jusqu’à 400 kilos de riz, ici chez moi, il y avait toujours des files interminables de clients. Le riz, directement sorti du feu, était aussitôt déversé dans l’assiette. C’était intense. Aujourd’hui encore, c’est le même procédé» raconte l’octogénaire.

Aujourd’hui, pour lui rendre hommage, ainsi qu’à toutes les femmes qui perpétuent ce patrimoine culinaire guinéen, un festival a été lancé, celui du lafidi.

Ce festival rassemble toutes les variétés possibles de ce plat devenu une véritable institution, rappelle Dioumessy Senkoun, initiateur du festival. «Au-delà de la célébration, on a constaté que le lafidi est le seul plat qui transcende toutes les régions. Nous voulons aujourd’hui nous battre pour que le lafidi soit labellisé, afin qu’il fasse partie des plats inscrits au patrimoine immatériel de l’Unesco».

Derrière ce plat humble, se cache toute une économie. Des agriculteurs aux transformateurs de produits, tous dépendent du Lafidi. Il fait vivre de nombreuses familles et constitue un moteur pour l’économie locale, confie Dioumessy Senkoun. «Tout ce qui entre dans la conception du lafidi est cultivé localement: gombo, l’aubergine... tout est produit par nos paysans. Nous favorisons l’écoulement de ces produits en mettant en avant le lafidi. Quand tu fais du lafidi, tu es tenu d’acheter du riz local auprès des paysans, rien n’est importé».

Aujourd’hui, le lafidi est considéré comme le plat le plus cuisiné en Guinée. Pratique, abordable et sain, il est un véritable trait d’union entre les différentes régions du pays, non seulement du point de vue culinaire, mais aussi sur le plan social et culturel.

Par Mamadou Mouctar Souaré (Conakry, correspondance)
Le 19/02/2025 à 13h21