La nature a horreur du vide. Le désengagement des États-Unis de l’Afrique a facilité l’implantation des puissances émergentes, notamment la Chine, la Turquie et l’Inde, et le retour de la Russie. une évolution qui a délogé l’Oncle Sam de son titre de premier partenaire économique du continent, avec les impacts que l’on devine en matière de diplomatie et d’influence. Face à cette situation, les États-Unis ont décidé de reprendre pied dans le continent, afin de ne pas se laisser distancer.
C’est dans cette optique que s’inscrit le déploiement régional de la dernière-née des agences de développement américaines, l’US International Development Finance Corporation (DFC), institution qui a pour vocation d’intervenir dans des projets de développement dans les pays à revenu faible et intermédiaire, et ce, des secteurs comme l’énergie, l’assainissement, les infrastructures, la santé ou la technologie. Elle consent ainsi à des prêts, des garanties de prêts, des investissements directs et une assurance contre les risques politiques dans le cadre de projets de développement menés par le secteur privé, et fournit des études de faisabilité et des assistances techniques.
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Née en décembre 2019 de la fusion de l’Overseas Private Investment Corporation (OPIC) et du Development Credit Authority (DCA) de l’Agence des États-Unis pour le développement international (Usaid), la DFC entend se placer comme une alternative aux véhicules d’investissement chinois en Afrique, en particulier l’initiative «Belt and Road», et à pallier l’incapacité des institutions financières américaines d’aide au développement existantes à suivre le rythme des besoins d’investissement en Afrique.
Dès sa création, la DFC a installé, en janvier 2020, un bureau à Johannesburg, en Afrique du Sud, pour couvrir la région d’Afrique australe. Elle est aujourd’hui en cours d’implantation à Abidjan (Côte d’Ivoire), pour la région d’Afrique de l’Ouest, et à Nairobi (Kenya), pour la région d’Afrique de l’Est.
Suivant la même logique, l’agence prépare, selon le média Africa Intelligence, l’ouverture d’un bureau à Rabat, au Maroc, afin de couvrir l’Afrique du Nord, zone que convoitent les puissances rivales. Un choix qui s’explique par le poids régional de l’économie marocaine, la solidité du partenariat entre les États-Unis et le Royaume du Maroc et la volonté des autorités américaines de renforcer leur soutien financier aux alliés africains. Avant de disposer de ses propres locaux, le bureau de la DFC sera logé dans l’enceinte de l’ambassade américaine.
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Quel sera le rôle assigné au bureau marocain de la DFC? Toujours selon Africa Intelligence, «le représentant de la DFC à Rabat aura pour mission de réaliser un premier tri sur les demandes de financement émanant des pays d’Afrique du Nord, avant de les transmettre au siège de l’institution à Washington. Il prêtera particulièrement attention aux projets d’infrastructures logistiques et ceux concernant les minerais et les métaux stratégiques, deux des secteurs prioritaires de la DFC».
Il est à noter que depuis sa création, la DFC a concentré ses financements sur l’Afrique subsaharienne. Sa principale intervention dans le continent concerne le projet du Corridor de Lobito, qui vise à permettre l’acheminement du cuivre de la République démocratique du Congo (RDC) et de la Zambie jusqu’à la côte atlantique de l’Angola. D’un coût compris entre 1 et 2,3 milliards de dollars, ce projet est fortement soutenu par les États-Unis: la DFC y contribue avec un financement de 553 millions de dollars.
Les États-Unis misent sur ce mégaprojet pour marquer leur retour dans le continent, tout en coupant l’herbe sous le pied de la Chine, qui tente d’imposer son monopole sur les ressources minières stratégiques (cuivre, cobalt, lithium…) de cette région. C’est d’ailleurs ce projet ambitieux qui pousserait le président américain Joe Biden à effectuer sa seule unique visite sur le continent africain, attendue durant les dernières semaines de son mandat.